Encore une fois cette saison, la compagnie Jean-Duceppe ne réserve pas de surprise pour Noël. Dans sa tradition des comédies légères des Fêtes, elle présente Pourquoi pas?, la version québécoise d'Old Love, de l'Ontarien Norm Foster, avec entre autres Pauline Martin et Claude Prégent.

On dit de Norm Foster que c'est «l'auteur de théâtre canadien le plus joué au pays». Or, curieusement, pas un seul média national (le Globe and Mail, le National Post) ne figure parmi la centaine d'extraits de critiques sur son site Internet... C'est que le prolifique dramaturge (40 pièces en 30 ans) est rarement produit par les grandes compagnies de Toronto ou de Vancouver. Foster fait du théâtre d'été à l'année, dans toutes les provinces: sa dernière pièce créée au Québec remonte à 1997 par le Piggery Theatre de North Hatley. Un spectateur averti en vaut deux.

Le sujet de la pièce est l'amour entre une veuve et un divorcé à qui la vie, côté coeur, n'a pas fait de cadeau. Car retomber follement amoureux à 60 ans et plus, c'est possible et beau... mais pas facile. Surtout quand l'objet de cet amour est une femme cynique, désabusée et résignée à ne plus flirter avec Cupidon... Mais Bob (Claude Prégent) ne jure que par Jacqueline (Pauline Martin), la femme de son ex-patron qu'il a croisée à quelques reprises il y a 25 ans (mais jamais oubliée) dans des partys de bureau de l'entreprise. De plus, il est plutôt du genre persévérant. Très persévérant. Pourquoi pas? est donc l'histoire d'une conquête amoureuse entre deux baby-boomers solitaires.

Au mieux, la production mise en scène par Monique Duceppe nous offre du comfort theatre qui sans éviter les clichés et les bons sentiments nous fait sourire ici et là. Car Foster sait livrer quelques répliques drôles et un peu vulgaires pour nous faire bouger de nos sièges. Et aussi des jeux de mots. Comme ce traiteur cubain infect (mais engagé par Jacqueline à chaque party de bureau de son mari?!) qu'on surnomme «Fidel Gastro»...

Fort heureusement, Norm Foster ne veut que nous faire oublier nos problèmes et passer une agréable soirée. L'auteur a découvert le théâtre sur le tard, à 31 ans; il était animateur de radio avant. Son manque de culture théâtrale transparaît dans son écriture assez banale : une succession de monologues annonçant une action ou un flash-back. La psychologie est sommaire et l'oeuvre a un léger parfum suranné : on n'a pas vu des personnages boire autant de café depuis Des dames de coeur, le téléroman de Lise Payette. Pourquoi pas? semble avoir été écrit dans les années 80... et non en 2008!

En Jacqueline, Pauline Martin se débrouille très bien même si parfois son accent bouge, passant de la femme d'Outremont à la fille du Saguenay sans raison. Claude Prégent est aussi juste et crédible dans la peau du tendre naïf sans malice. Par contre, dans des rôles secondaires, Yvan Benoit et Danielle Lépine jouent de façon très caricaturale.

La mise en scène peu inspirée de Monique Duceppe n'arrange pas les choses. Dans un décor épuré et très froid de Marcel Dauphinais, elle suggère des changements de lieux et de temps répétitifs, sous une musique qui sonne comme de la musak. Dans une scène, Jacqueline surprend une conversation entre son fils et sa bru. Comme le plateau est vide et sans cloison, elle s'avance en plein centre de la scène, sur un monticule, en robe de chambre et une tasse de thé à la main, pour écouter à la porte... pendant près de cinq minutes.

Le critique s'est alors pincé pour voir s'il n'était pas en train de rêver!

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Pourquoi pas?, jusqu'au 4 février au Théâtre Jean-Duceppe.