Ils ont 35 ans. Ils sont tous les deux célibataires en pleine crise existentielle. Lui, c'est Bob, poète raté sympathique, immature et ténébreux: le genre qui «lit du Dostoïevski pour se remonter le moral»! Bob négocie aussi des jobines avec des truands, mais plus par paresse et naïveté que par méchanceté. Elle, c'est Helena, une avocate sexy qui a un penchant pour le sauvignon blanc, les bars à la mode et les aventures avec des hommes mariés.

Vous aurez compris qu'ils ne sont pas vraiment faits l'un pour l'autre. Et pourtant...

L'auteur écossais David Greig a repris tous les clichés des comédies romantiques hollywoodiennes pour les retourner à l'envers dans sa sympathique pièce de théâtre musicale Midsummer, à l'affiche de La Licorne. Le titre Midsummer fait référence au solstice d'été, la nuit la plus courte de l'année qui sera, inversement, une soirée longue de péripéties pour ce couple impossible.

Folle nuit

Comme dans «les films de filles», on assiste à une rencontre improbable entre deux solitudes de sexe opposé. Mais attention! Ici, le ciel bleu ne s'effondre pas; la terre ne s'écroule pas; et l'amour n'inonde pas les matins. En fait, Piaf ne chante pas non plus. Après leur rencontre, Bob et Helena traîneront encore leur mal de vivre dans les rues d'Édimbourg. Il va saboter son job pour la mafia. Elle va rater le mariage de sa soeur (et vomir dans les marches de l'église sur sa robe de demoiselle d'honneur...). Comme rien ne fonctionne, ils décident de s'enivrer et de dépenser l'argent volé par Bob. Au cours de cette nuit rocambolesque, le couple croise des gothiques qui les initient au bondage japonais (sic!).

Et vont-ils finir ensemble et avoir des enfants? Je ne dirai rien même sous la torture ou le bondage japonais...

Mais je peux affirmer que, sans réinventer la dramaturgie, David Greig signe une jolie fable, remplie de clins d'oeil au romantisme. Midsummer est un texte qui manie bien la dérision et les ruptures de ton. Le récit est entrecoupé de chansons drôles (belle musique de Gordon McIntyre et beaux arrangements de Pierre-Luc Brillant). Cette production du Théâtre La Manufacture bénéficie d'une traduction colorée et vivante d'Olivier Choinière. Pierre-Luc Brillant et Isabelle Blais collent bien à la peau de ses antihéros désirant recommencer leur vie.

La mise en scène de Philippe Lambert s'apparente à la formule cabaret. Les acteurs exécutent leurs chansons aux micros, guitare sous le bras, assis à un tabouret. Les changements de costumes pour jouer des personnages secondaires se font à vue (parfois, ça frise l'amateurisme et la caricature). Mais bon... la proposition n'a pas la prétention de faire spectaculaire ou léchée. Au contraire. C'est une pièce intime, imparfaite. Un spectacle de redoux qui annonce le printemps, et qui veut simplement réchauffer nos âmes givrées.

Midsummer (une pièce et neuf chansons). Texte de David Greig. Au Théâtre La Licorne, jusqu'au 13 avril.