Un spectacle des Cowboys fringants, c'est une affaire de chansons et d'énergie. Un bon spectacle des Cowboys fringants, c'est la même chose, mais avec encore plus d'énergie. Sur scène comme dans la salle. Hier, au National, le courant qui passait entre le groupe et la salle était plus qu'électrique. Électromagnétique, disons. D'une puissance qu'on ne voit pas souvent... sauf dans un spectacle des Cowboys fringants.

Karl Tremblay n'a eu qu'à entonner les premières notes de Droit devant que la foule chantait déjà avec lui. Cinq minutes plus tard, ça grouillait frénétiquement à l'avant-scène pendant l'ironique La manifestation et tout autant pendant Ti-cul et La reine, deux autres chansons à la rythmique enflammée.

À voir Jean-François Pauzé (guitare), Jérôme Dupras (basse) et Marie-Annick Lépine (violon et flûte rose, entre autres), on se demandait comment ils allaient tenir le rythme pendant plus de deux heures. Surtout, on se demandait comment Karl allait s'en tirer. Il avait beau s'économiser un peu et sauter moins que les autres, porter de tels textes exige un souffle du souffle et de la tenue.

Or, plus d'une heure plus tard - après un entracte, bien sûr -, tout ce beau monde, semblait encore plein d'énergie. Détrempé, sans doute, mais encore frais. Karl chantait Le chêne et le roseau, d'une voix douce et belle qu'on lui a découvert sur l'album L'expédition, alors qu'il venait tout juste d'enfiler quelques autres titres trépidants comme Sainte-Paix, Camping Ste-Germaine et la toujours poignante L'hiver approche. De vrais marathoniens.

Ce qui étonne encore, après toute ces années, c'est qu'ils se donnent toujours avec autant de conviction que de spontanéité. Grosso modo, ils ont suivi le plan de match. Leur spectacle d'hier a mis en valeur les titres marquants de leur dernier disque (dont Histoire de pêche, Entre deux taxis et La tête haute) et plusieurs incontournables (En berne, 8 secondes, Le gars d'la compagnie). Ce qui n'a pas empêché le groupe d'en rajouter une ici et là.

Saisissant au vol une intervention où Karl faisait référence à la banlieue, Jean-François Pauzé a gratté les premiers accords de Repentigny-by-the-sea, qui date de 1997, et que le groupe a interprété sur-le-champ. Le chanteur lui-même a avoué ne pas savoir comment il faisait pour se rappeler les paroles de cette chanson-là, que le groupe n'avait pas joué depuis deux ans, a-t-il assuré.

Un scénario semblable s'est produit en deuxième partie lorsque le même Jean-François a coupé la parole au chanteur pour entonner Agadou, point de départ d'un petit délire où Les Cowboys ont essayé de jouer au chansonnier en refaisant du Paul Piché (Mon Joe, pas mal tout croche), puis 23 décembre. Ils ont eu plus de succès avec la toune de Beau Dommage, même si tout le monde cherchait les accords...

L'autre chose que le spectacle d'hier a permis de constater, c'est que leur « nouveau » groupe - avec Marc-André Brazeau à la batterie et Daniel Lacoste à la guitare électrique - est fort bien soudé. Marie-Annick fait toujours un tabac avec ses furieux solos de violons (toujours accueillis avec enthousiasme), Jean-François mouline avec aplomb et efficacité sur sa guitare acoustique et Jérôme se révèle un bassiste d'une musicalité redoutable.

Mais ce qui compte le plus dans tout ça, c'est que Les Cowboys écrivent des chansons qui parlent aux gens. Comme Par chez-nous, portrait sensible d'une ville minière dédiée hier à tous ces gens qui perdent leur emploi en ces temps de crise économique. Comme En berne. Comme Plus rien. Les Cowboys fringants écrivent des chansons que les gens vont chanter encore longtemps. Avec ou sans eux.