Ce n'était pas une soirée ordinaire pour Marie-Chantal Toupin. Ce n'était même pas une «rentrée montréalaise» ordinaire. Hier, au Métropolis, elle soulignait surtout ses 10 ans de carrière. Une décennie de travail acharné - elle en a fait, des spectacles - et de succès à la radio.

Les anniversaires du genre, le monde du spectacle ne les laisse pas passer sans en garder une trace. Des cameramen ont d'ailleurs tourné autour de la chanteuse pendant tout le spectacle d'hier. Une équipe trop réduite pour qu'on puisse conclure d'emblée qu'un DVD est en préparation, mais on ne sait jamais.

Marie-Chantal Toupin a dit vouloir un «gros, gros, party» pour souligner ses 10 ans de carrière. Elle a plutôt offert une rétrospective menée rondement: un peu plus de 90 minutes pop-rock musclée, sans entracte et sans trop de bavardage entre les chansons. Ça rockait et ça roulait, les virages étaient bien négociés, vraiment, rien à redire sur ce plan.

La rockeuse a surtout chanté pour son public, serrant bien des mains à l'avant-scène, mais aussi pour les caméras, qu'elle prenait régulièrement la peine de regarder droit dans les yeux. Toute voix dehors, le geste économe et assuré, elle s'est imposée naturellement dès la première chanson, À distance, et est demeurée presque parfaitement en contrôle jusqu'à la fin, mis à part un petit trou de mémoire au moment de Lac Éthier.

Elle n'a eu aucun mal à se faire entendre non plus: non seulement possède-t-elle une voix puissante à laquelle elle ne permet aucun pirouette imprévue, mais le son était tellement fort, qu'il aurait fallu être sourd comme un pot pour ne pas l'entendre rouler ses «r» et étirer les syllabes dans Maudit Bordel. Tellement pas subtile, cette sono, que c'en était assourdissant.

L'univers musical de Marie-Chantal Toupin n'a pas été construit à partir de matériaux particulièrement subtils, c'est vrai. Son rock chausse de gros sabots et peu des textes qu'elle interprète s'apparentent à de fins escarpins. Sauf que plusieurs de ses chansons possèdent des mélodies ou des refrains hyper-accrocheurs. Elles dégagent. Il faut bien se rendre à l'évidence, c'est très efficace.

Détail agaçant, malgré les guitares qui rugissent et les authentiques larmes versées, le spectacle d'hier sentait aussi le calcul. Marie-Chantal Toupin ne s'est pas ménagée - tant s'en faut. C'est assurément une bête de scène, mais plus proche de la manière polie et impeccable de Céline Dion que de celle, excessive, moins politiquement correcte et plus enthousiasmante de son autre modèle, Marjo.

Histoire d'en offrir le plus possible, Marie-Chantal Toupin a «osé» (le terme est d'elle) en amalgamer quelques-uns en des pots-pourris dont le plus réussi a été celui liant Un endroit où pleurer, Sans regrets, Toé c'est moé et Comme j'pourrais te l'dire. À l'inverse, sa version du classique d'Harmonium Pour un instant, livrée avec Christian Sbrocca, a été franchement ratée.

Moment d'émotion avant le rappel: la chanteuse a reçu une plaque soulignant les 10 000 exemplaires vendus de son autobiographie et a fait l'objet d'un hommage de la part d'une animatrice de radio. L'aparté a permis d'établir clairement que l'affection dont jouit la rockeuse ne tient pas qu'à ses chansons: ses fans l'aiment aussi pour son histoire, son «parcours d'espoir» pour reprendre le sous-titre de l'autobiographie célébrée hier. Marie-Chantal Toupin n'est pas que la chum de fille qui sait brasser la cage, désormais elle incarne aussi une valeur dans l'air du temps: la résilience.