Elle est partie de loin, Lynda Thalie. Son premier disque, Sablier, elle l'a publié en 2002. Il n'était pas parfait, mais il comptait une pièce intitulée Marsa. Une habile chanson pop, qui avait tout pour devenir le premier tube arabisant fait au Québec. Sauf que la radio l'a passé sous silence, ou presque. La jeune chanteuse n'a pas baissé les bras pour autant.

Sa détermination s'est révélée payante. Son spectacle «La rose des sables», présenté mardi au Théâtre Corona, était commandité par la station de radio la plus écoutée à Montréal. Tout un revirement de situation. Sa salle était bien remplie et franchement enthousiaste. Le plus intéressant n'est toutefois pas que Lynda Thalie se soit trouvé un public, mais qu'elle se soit trouvée elle-même.

La jeune femme vue sur scène hier soir n'est plus la débutante qui hésitait entre ses envies pop et ses racines algériennes. L'approche pop demeure, mais elle est mise au service de chansons aux sonorités franchement plus arabes. Plus exotiques, dirons certains. Plus intéressantes au strict plan musical, dirons-nous tout simplement. Plus habitées, aussi.

Mine de rien, Lynda Thalie a fait un pari osé: rassembler son archipel identitaire dans un seul et même spectacle. Ça veut dire chanter en arabe, mais surtout en français. Une majorité de compositions originales, mais aussi du Dalida (Histoire d'un amour) et afficher son attachement au Québec dans un pot-pourri amalgamant notamment Y'a pas grand-chose dans le ciel à soir et Dans la prison de Londres. Tout un programme.

Et puis? Ça marche à fond. À l'aise comme un poisson dans l'eau sous ces magnifiques éclairages rouge et jaune, elle a présenté un spectacle à la fois énergique et nuancé, où sa voix flexible a joué un rôle de premier plan, tout en sachant laisser le plancher à ses musiciens. Judicieux dosage, peut-être dû à sa collaboration avec le metteur en scène Pierre Boileau.

Elle a un peu versé dans l'exotisme de pacotille (sa chanson Melilla), a parfois brisé le rythme en parlant trop longuement entre les chansons et, en début de soirée, la sonorisation manquait franchement de rondeur. Mais ce qu'on retient de ce spectacle, c'est plutôt la force et la grâce de ses chansons comme Kfaya et Galouli (dédiée à «toutes les femmes dans le monde qui ne peuvent pas élever la voix»), ainsi que les accents gitans et méditerranéens qui enveloppent Ana Akida.

Ce qu'on retient de ce spectacle - qui sera présenté en supplémentaire le 24 septembre -, c'est qu'au-delà des étiquettes, un véritable univers musical est en train de naître. Lynda Thalie a trouvé son ton (un peu engagé), sa manière (souvent dansante et énergique) et son bonheur (contagieux). Malgré la charmante Marsa, on n'aurait pas cru la chose possible il y a sept ans.