Neuf mois après la sortie de son plus récent disque Cosmologie, Dumas a enfin présenté son nouveau spectacle vendredi à la Cinquième salle de la Place des Arts. Alors qu’il démarre une nouvelle tournée qui durera au moins jusqu’en mai 2024, il démontre encore une fois qu’il est un performeur aussi spectaculaire qu’inventif.

C’est fou comment Dumas réussit à nous surprendre d’un spectacle à l’autre. Après le formidable solo Nos idéaux, qu’il a présenté près de 200 fois, puis la tournée souvenir Le cours des jours, qui s’est étirée pendant et après le temps pandémique, il propose maintenant un voyage dans sa « cosmologie personnelle », mais complètement remaniée.

Avec une carrière qui s’étire sur plus de 20 ans, des succès à la pelle et des fans fervents, Dumas pourrait s’asseoir sur ses lauriers et livrer ses chansons sans trop se forcer. Mais c’est oublier à quel point l’auteur-compositeur-interprète est une tête chercheuse qui aspire sans cesse à se renouveler. Ce qu’il fait en s’entourant de musiciens complices de longue date — Marc-André Larocque à la batterie, qu’il retrouve après 12 ans, et le fidèle François Plante à la basse —, et de sang neuf : Gabriel Godbout-Castonguay, claviériste au groove impeccable qui vient à peine de finir de tourner avec Les Louanges, et le prodigieux multipercussionniste de The Brooks, Philippe Beaudin.

La présence de Beaudin a un effet absolument subjuguant. Sur un tapis de synthés, les percussions se juxtaposent à la batterie et se marient à la basse omniprésente, donnant au répertoire de Dumas un côté percussif, on pourrait même dire parfois explosif, qu’on n’aurait jamais imaginé. Dès les premiers instants, alors que les musiciens s’installent dans le noir pendant qu’on entend un battement sourd comme celui d’un cœur, on sent qu’on entrera dans un monde planant, mais aussi très puissant et lourd… et dansant bien sûr, on est chez Dumas tout de même.

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Dumas s’entoure de musiciens complices de longue date.

Le chanteur a choisi d’ouvrir la soirée avec trois nouvelles chansons, L’ailleurs, Leitmotiv et Tout passera. Qui sont certes excellentes, mais les « casser » alors qu’il ne les avait à peu près jamais jouées devant public était un risque. Il l’a relevé avec courage, même si on voyait qu’il peinait à placer sa voix et trouver ses marques. On a eu un petit moment d’inquiétude, mais c’était oublier à quel point Dumas est un artiste expérimenté qui sait construire un spectacle comme pas un.

En enchaînant avec J’erre, le chanteur et guitariste a mis évidemment le public dans sa poche et retrouvé son sourire qui en disait long. Il avait pris son erre d’aller et quelques chansons plus tard, il faisait lever tout le monde d’un seul geste. Avec un enchainement trépidant de Journée parfaite, Mouvement et Miss Ecstasy, la Cinquième salle s’est alors transformée définitivement en piste de danse, avec seulement quelques moments de repos jusqu’à la fin.

Entre Le déserteur de Fort Alamo évanescent et un Compte à rebours très funk, des moments plus acoustiques avec Quelque part et Chicago, un réjouissant mash-up du Bonheur avec Close to me de The Cure, le mélange de congas et de guitare électrique sur Nébuleuse et l’envolée techno de Bleu Clair, Dumas a fait le lien entre toutes ses époques en les ramenant au même niveau : celui d’aujourd’hui.

Mais comme on est dans le concept de la cosmologie, ses chansons flottaient aussi dans l’espace, un peu dans la pénombre, enveloppées d’une lumière qui provient essentiellement de la scène. Avec ses lignes de couleur (ou de vie, ou du temps) qui défilent derrière, l’éclairage conçu par François Lévesque, qui a travaillé déjà sur la tournée Nos idéaux, évoque le mouvement et notre court passage sur Terre, un thème qui est cher à Dumas et qui transcende son répertoire.

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Un spectacle qui flotte un peu dans l’espace.

Après la transe techno du Soleil à son zénith et le défoulement collectif sur Ne me dis pas, quand Dumas a pris sa guitare et ses lunettes lumineuses pour venir se promener dans les allées et chanter Vertigo, le plaisir était à son comble. « Si vous saviez comment ça a été un long voyage. Ça me touche que vous soyez là », a-t-il dit en revenant au rappel pour un Linoléum tout en douceur, chantée en grande partie par le public.

En entendant ensuite les gens faire spontanément les chœurs sur Alors alors, un moment qu’on aurait voulu qu’il ne finisse jamais, on s’est dit que Dumas est plus que jamais dans la lignée du Français M, qu’on a pu voir à Montréal cet été : une bête de scène hors du commun au répertoire rassembleur, qui mise sur le plaisir partagé et la surprise, et qui livre un spectacle-évènement à chaque fois.

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Dumas

« C’est un privilège que vous soyez venus encore plonger dans l’inconnu avec nous », a-t-il dit avant de terminer avec Passer à l’ouest, qu’il conclut avec les mots « pour vous retrouver » en tendant les bras vers la salle.

Plonger dans l’inconnu avec Dumas ? N’importe quand.

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