Blanche-Neige, vous voyez, la fille parfaite qui travaille tout le temps au bonheur des autres, et qui rêve qu'un jour son prince viendra? Ça, c'est le conte et le film de Disney. Mais dans la pièce concoctée par la chorégraphe Manon Oligny pour les finissants du département de danse de l'UQAM, la version est...très différente!

Manon Oligny est une chorégraphe iconoclaste qui, depuis ses débuts, s'attaque avec pertinence aux images du corps et des relations homme femme en maîtresse de la déconfiture sentimentale et de l'hypersexualisation habituelle. On pense à des pièces comme L'écurie (2008, en collaboration avec l'écrivaine Nelly Arcan), La boucherie (2005), 46''00''05 (2003) ou 24xCaprices (2001 en collaboration avec l'écrivaine Christine Angot), en se disant que si elle s'attaque à Blanche-Neige, wow! ça ne sera pas triste, ni convenu.

Elle-même bachelière en danse de l'UQAM, elle s'est vu passer commande pour le spectacle chorégraphique dirigé de fin d'études. Oligny avait déjà frappé avec Le carnaval des animaux (pas selon Saint-Saëns) en 2008, pour les finissants de LADMMI. Elle réitère avec Blanche-Neige (pas selon Disney) du 8 au 11 avril à l'Agora de la danse.

«C'est génial! dit-elle d'emblée, 20 danseurs c'est un luxe qu'on ne peut jamais s'offrir en temps normal. Tout un défi pour moi!» Vingt, soit 18 filles et deux gars, et il aura fallu signer un accord avec le syndicat pour que le spectacle ait lieu malgré la grève.

«J'ai mis tout le monde en Blanche-Neige, poursuit Oligny, j'ai fait faire exactement le costume du film de Disney, c'est vraiment tripant!» Et les deux gars? «En haut il sont Blanche-Neige, en bas ils sont loups. Parce que la symbolique sexuelle du loup qui éveille la sexualité endormie de Blanche-Neige est beaucoup plus forte que celle du prince.» Dixit.

Tout d'ailleurs lui vient d'une lecture de l'envers du conte, sous son côté trouble, voire dénonciateur: «Ce que dit la psychanalyse c'est que Blanche-Neige a un grave problème d'existence: les sept nains la trouvent très belle, mais n'ont aucun désir pour elle (ils sont gais) et la belle-mère lui interdit de devenir femme, voulant carrément la tuer. La pauvre fille est l'incarnation de la perfection, condamnée au travail, à la propreté, jusqu'à l'arrivée du prince! Dans cette pièce j'ai voulu poser toutes ces questions: sommes-nous encore toutes des Blanche-Neige? Attendons-nous un prince? Et si le prince ne vient pas?»

Il y a forcément beaucoup à faire avec un mythe aussi universel et une icône féminine aussi ancrée dans notre inconscient collectif: «J'ai joué sur une idée d'usine. Toutes les 20 Blanche-Neige sont toujours sur scène et sont tout le temps occupées comme des petits robots dans une usine. J'ai gardé la chanson du film (Un jour mon prince viendra), mais j'ai évacué tous les autres éléments, belle-mère, pommes, nains...La seule chose qui différencie chacune des Blanche-Neige c'est leur petite culotte. J'ai laissé chaque interprète libre de choisir la sienne et c'est la seule façon de les distinguer.» C'est bien du Manon Oligny, et pas du Walt Disney en effet. Elle va nous réveiller tout ça!

Les Printemps de la danse

Avril revient et avec lui, du 2 au 30 exactement, les Printemps de la danse qui permet de voir gratuitement, dans 11 maisons de la culture de Montréal, des pièces de la relève chorégraphique. Cette année Mandragore, de Brice Noeser; ILS, de Frédéric Marier (extrait), El fin del infinito, de Hinda Essadiqi et Aladino R. Blanca ainsi que les capsules radiophoniques Radio-Danse de Gaétan Leboeuf. Voir exactement les dates et les lieux sur le site de Tangente, partenaire de l'événement: www.tangente.qc.ca

Prochaine imprudanse!

Allez, une petite imprudanse pour finir: la ligue d'impro mouvement et ses danseurs fous se produit encore le 5 avril au café de l'Usine C, cette fois Rouges contre Verts. Il faut avoir vu ça une fois, ambiance et découvertes assurées! www.imprudanses.com.

 

À l'agenda

Blanche-Neige (pas selon Disney), de Manon Oligny, du 8 au 11 avril, à l'Agora

Punto Ciego, du Rubberbanddance Group, du 1er au 4 et du 7 au 11avril à la Cinquième salle

Le sacre du printemps et RE-,II, par les GBCM, du 2 au 4 avril au Maisonneuve

Biennale de Gigue contemporaine, du 2 au 5 avril à Tangente.