Présence, assurance, précision, intimisme, humour, richesse harmonique, mélodies gracieuses et poignantes, arrangements suaves, rimes triées sur le volet.

Qu'on se le dise, il y a une différence tangible entre la performance fragile de Sylvie Paquette offerte aux dernières FrancoFolies de Montréal et ce spectacle donné mardi soir au Lion d'or, spectacle qu'elle reprendra samedi.

 

On s'attendait à beaucoup après la sortie de son récent Tam Tam, très bien reçu par la critique, et dont la version sur scène ne s'annonçait pas évidente, vu le caractère ambitieux de ce folk de chambre. D'autant plus que plusieurs ont vu dans cet album le plus bel accomplissement de Sylvie Paquette, dont la carrière s'avère aussi longue que discrète.

Mise en nomination pour la première fois cette année à l'ADISQ (catégorie folk contemporain), elle n'a jamais obtenu de véritable succès populaire dans ce marché consensuel qu'est le nôtre.

Ce qui ne l'a pas empêchée de persévérer et d'atteindre ces résultats pour le moins remarquables. On peut le dire haut et fort: Sylvie Paquette doit actuellement être considérée parmi les plus accomplies auteures-compositrices-interprètes de l'Amérique francophone, d'autant plus que le choix judicieux de ses paroliers en étoffe considérablement la facture - Martine Coupal, Dave Richard, Frédérick Baron, Alain Leprest, Jean Fauque, etc.

Interprété sous la direction du contrebassiste Philippe Brault (Pierre Lapointe, etc.), le contenu de Tam Tam et les extraits d'albums précédents (Souvenirs de trois et Oser) ont ainsi trouvé un son probant sur scène. On ne sait quelle potion magique Sylvie Paquette a absorbé au cours des derniers mois, elle semble en tout cas avoir mis fin à ses inhibitions et hésitations proverbiales sur scène, que l'on a encore pu noter durant la saison estivale.

Mardi soir, elle était fin prête à se laisser aller, usant d'un humour absurde et autodérisoire, humour féminin truffé d'anecdotes qui contrebalancent le caractère intimiste (et peut-être un peu linéaire) de ses thématiques chansonnières - qu'elle résume elle-même comme une «exploration de l'état amoureux», avec ses phases extatiques, ses plateaux, ses gouffres.

Un été de rodage a donc permis à Sylvie Paquette et ses musiciens (Philippe Brault, contrebasse et guitare, Sheila Hannigan, violoncelle, Denis Faucher, claviers et voix) de créer la transposition idéale de cet ambitieux Tam Tam, réalisé par Paul Pagé et Daniel Bélanger - qui en signe aussi les très beaux arrangements et que Sylvie a voulu aider à faire connaître, selon ses dires, devant un auditoire hilare. Ce ne sera pas la seule séance de bidonnage; pour ne citer qu'un autre exemple, on retiendra le récit pissant de son séjour chez le bassiste et réalisateur californien Larry Klein, l'ex de Joni Mitchell.

Même actualisé, le folk à guitare acoustique peut être fade, prévisible, soporifique. Chez Sylvie Paquette, le folk est enrichi de superbes ponctions dans d'autres mondes sonores, il devient un superbe folk de chambre si je puis me permettre l'expression. On applaudira donc l'intérêt que portent ces musiciens au minimalisme américain, à la musique classique tout autant qu'à différentes tendances de la pop de grande qualité.

Dans cette optique, on aura remarqué de solides séquences d'archets frottés en tandem par le violoncelle et la contrebasse, on aura déduit que cette présence des cordes acoustiques va bien au-delà de l'habituelle moquette de service. L'absence de percussionniste, a-t-on également noté, n'empêche pas livraison générale de manquer de groove; de subtils rythmes de synthèse peuvent aussi se greffer lorsque besoin il y a.

La chanteuse se permettra même un exercice réussi d'échantillonnage en direct avec la chanson Le coeur dans l'eau. Il flottera bellement jusqu'à un second rappel: Tant de toi Et tant de Sylvie, au grand bonheur de ses fans.

Sylvie Paquette au Lion d'or samedi soir à 20h.