Les trois jours de Casteliers, les Petits bonheurs, les Coups de théâtre, la 25e saison de la Maison Théâtre, les créations et les adaptations du petit théâtre L'Illusion... l'année 2008 n'a pas manqué de souffle, ni d'occasions pour les enfants et les ados de se divertir. Retour sur une saison riche en contenu, dont plusieurs productions ont, encore une fois, été réalisées avec bien peu de moyens.

Le théâtre jeunesse se porte plutôt bien si l'on se fie à la fréquentation des festivals et des nombreuses pièces proposées cette année par plus d'une vingtaine de compagnies de théâtre - sans compter les compagnies étrangères de passage. Bien sûr, un spectacle comme celui de Winnie l'ourson (Disney), attire autrement les foules, mais les artisans et créateurs de la scène jeune public ont leurs fidèles.

 

Cela n'empêche pas la plupart des compagnies de théâtre d'ici de réaliser des projets artistiques avec presque rien. Je pense notamment aux pièces de l'Illusion (Pain d'épice représentée récemment), mais aussi à l'Ubus Théâtre (L'écrit), qui présente ses pièces dans des autobus scolaires, au Théâtre de Quartier, qui présentait cette semaine Glouglou, au Caroussel, et à tellement d'autres.

Comme pour les productions «adultes», il y a des flops... Et la créativité des artistes n'est parfois pas suffisante pour compenser le manque de moyens, mais la plupart du temps, la magie opère. La qualité des productions est étonnante. Claire Voisard, directrice et fondatrice de L'Illusion (qui prépare sa 30e saison) a de nombreux projets d'adaptation et de création. Mais comme plusieurs de ses collègues, parlez-lui de l'état du théâtre jeunesse et vous verrez son visage s'assombrir... un peu.

«Parfois je m'étonne de tout ce qu'on réussit à faire... avec rien, avoue-t-elle. La manière dont est soutenu ce théâtre est atroce. L'aide des trois Conseils des arts est gelée depuis 10 ans. Malgré les États généraux du théâtre (l'an dernier), l'aide aux compagnies stagne. La demande existe pourtant. Les parents rêvent d'activités culturelles pour leurs enfants. Mais nos gouvernements n'investissent pas dans la culture.»

Même son de cloche au Théâtre de Quartier, dirigé par Louis-Dominique Lavigne et Lise Gionet. «C'est une belle période artistiquement, explique Lise Gionet. Mais nous travaillons dans des conditions extrêmement difficiles. Il n'y a pas de marché au Québec pour les tout-petits. Sauf les diffuseurs spécialisés comme la Maison Théâtre, L'Arrière-Scène ou les Gros Becs, il y a un véritable problème de diffusion au Québec», tranche-t-elle.

«Nous avons un seul lieu de diffusion (la Maison Théâtre), mais est-ce que ça suffit?, demande encore Claire Voisard. Est-ce que le théâtre pour adultes pourrait se permettre de n'avoir que le TNM? Le théâtre pour enfants est multiple. Les enfants ne sont pas tous pareils. Je pense à une compagnie comme la nôtre, comme Les Deux Mondes, le Théâtre de Quartier, le Caroussel, si toutes ces compagnies pionnières, qui existent depuis 30 ans, ne sont pas soutenues, comment allons-nous encourager la relève?»

La Maison Théâtre

Du côté de la Maison Théâtre, lieu de diffusion de 25 compagnies de théâtre, le bilan est somme toute positif. La Mecque du théâtre jeunesse d'ici (essentiellement les 5 à 12 ans) a d'ailleurs entamé à l'automne sa 25e saison, ce qui démontre bien, selon la directrice des relations avec le public, Diane Chevalier, la vitalité du secteur jeunesse.

Mme Chevalier est consciente de la morosité ambiante et du sous-financement de certaines compagnies de théâtre, mais elle estime que la Maison Théâtre joue bien son rôle de diffuseur. L'an dernier, la Maison Théâtre a rejoint plus de 73 000 enfants. «Les deux tiers de notre public proviennent des écoles, explique-t-elle, mais on travaille très fort pour attirer aussi des familles. On va les chercher une à une.»

Un des faits marquants de l'année est, selon Diane Chevalier, le retour en force du théâtre pour ados. «Il y a à peine cinq ans, nous évoquions la mort du théâtre pour ados, avoue-t-elle, mais aujourd'hui, on constate que les créateurs s'y intéressent et que le public existe et apprécie.»

À ce titre, mentionnons deux pièces géniales présentées en reprise à la Maison Théâtre cette année. Cette fille-là, de Joan Macleod, et Assoiffés, de Wajdi Mouawad. Deux autres pièces marquantes pour le public adolescent ont été présentées aux derniers Coups de théâtre: le théâtre-film Kiwi, de Daniel Danis, et Isberg, un texte de Pascal Brullemans proposé par le Clou!

De l'autre côté du spectre, les tout-petits ont quand même été gâtés en 2008. Avec le festival Petit bonheurs, qui s'adresse aux enfants de 0 à 6 ans, plusieurs productions leur étaient destinées, notamment par des créateurs français et belges, assez doués en matière d'éveil. Et puis, avec le boom de naissances des dernières années, n'est-ce pas le public de demain qu'il faut dès aujourd'hui sensibiliser au théâtre?