L'ex-chef libéral Stéphane Dion a été injustement traité par le réseau de télévision CTV pendant la campagne électorale de l'automne dernier, a conclu le Conseil canadien des normes de la radiotélévision (CCNR) après avoir étudié de nombreuses plaintes au sujet de la diffusion de ses «faux départs» lors d'une entrevue réalisée par le chef d'antenne de l'Atlantique, Steve Murphy.

Le CCNR, qui a été formé par les radiodiffuseurs eux-mêmes, estime que la première question posée par M. Murphy au politicien québécois était mal formulée et difficile à comprendre, y compris pour un auditeur anglophone. Il n'est donc pas étonnant que M. Dion, dont la langue maternelle est le français, ait demandé des précisions.

D'après le comité qui a étudié la plainte, la question portait à confusion, notamment parce qu'elle mélangeait le présent et le passé, ainsi que l'indicatif et le subjonctif. «On ne peut pas simplement jeter le blâme pour le malentendu sur la personne interviewée», peut-on lire dans la décision rendue publique mercredi.

Le Conseil souligne en outre que le journaliste avait consenti aux reprises - qui sont monnaie courante dans le métier - et qu'en conséquence, les extraits ratés n'auraient jamais dû être mis en ondes, qu'ils auraient dû être «écrasés».

«Même si la question avait été posée convenablement, il est probable que l'engagement pris par le radiodiffuseur de permettre les recommencements aurait eu l'effet d'interdire le contenu filmé. Dans les circonstances, la question était mauvaise et l'engagement a été pris», écrivent les personnes chargées d'étudier les plaintes.

En les diffusant d'abord dans le cadre du bulletin de nouvelles de l'Atlantique, puis d'un bout à l'autre du pays à l'émission politique Mike Duffy Live, CTV a violé tant le code de déontologie des journalistes que celui dont les radiodiffuseurs se sont doté.

Le CCNR conclut que la diffusion «manquait de courtoisie» et constituait une présentation «injuste et inappropriée» des nouvelles et des points de vue.

Cette décision risque de mettre un peu de baume sur les plaies de M. Dion, qui a démissionné de son poste de leader du Parti libéral du Canada en décembre dernier.

La diffusion des «faux départs» de l'entrevue à CTV avait considérablement nui au politicien en le montrant comme un homme incompétent en anglais et indécis dans ses réponses, à quelques jours du scrutin.

Le chef conservateur Stephen Harper n'avait pas hésité à tirer avantage de la situation. A la surprise générale, il avait même modifié sa routine habituelle pour commenter, le soir même, l'événement qui entachait l'image de son principal concurrent.

L'affaire avait fait couler énormément d'encre et suscité de nombreux débats parmi les parlementaires et les journalistes.

Mike Duffy ne travaille plus pour CTV mais il continue à arpenter quotidiennement les couloirs du parlement. Il a en effet été nommé sénateur par le premier ministre Stephen Harper, peu avant Noël, en même temps que 17 autres sympathisants conservateurs.