L'argent a toujours été au coeur des problèmes de Passe-Partout. La querelle judiciaire qui fait présentement rage entre les membres du «trio de fantaisistes» formé par les célèbres personnages de Passe-Montagne, Passe-Partout et Passe-Carreau n'a rien de surprenant, affirme Carmen Bourassa, productrice de séries jeunesse qui a agi à titre de responsable pédagogique pour la populaire émission.

«Les chicanes autour de l'argent ont toujours fait partie du paysage de Passe-Partout. Par moments, ça frisait l'enfer, raconte Mme Bourassa, interrogée hier par La Presse à propos de la bataille qui oppose les trois principaux personnages de l'émission. Ceux-ci ne s'entendent pas sur les droits des ventes des DVD, sortis en magasin en 2006.

«Au départ [en 1977], ils ont très vite senti, comme nous, que cette série serait un succès, poursuit celle que l'on considère comme la mère de cette production télévisuelle. Le contrat qui avait été négocié à l'époque, ils ont voulu le renégocier pour obtenir un meilleur salaire. Ils ont menacé de faire une grève.» Les jeunes téléspectateurs sont passés à deux cheveux de voir disparaître des ondes les noeuds papillon et les souliers «mangeurs de camion» de Passe-Montagne.

«Dès qu'ils ont commencé à se plaindre, je leur ai dit: «Vous ne faites pas pitié. C'est vous qui allez faire le plus d'argent dans cette série»», dit-elle.

En raison des nombreux problèmes qui ont marqué l'émission, Mme Bourassa - notamment productrice d'À plein temps, Pin-Pon et Cornemuse - n'a guère été surprise d'apprendre, la semaine dernière, qu'il y avait une mésentente entre les comédiens, plus de 30 ans après la diffusion des premières émissions.

Dans une requête déposée le 13 janvier en Cour supérieure, Jacques L'Heureux, l'interprète de Passe-Montagne, et sa comparse Marie Eykel, alias Passe-Partout, ainsi que leurs maisons de production demandent à Claire Pimparé et à l'auteur-compositeur Pierre F. Brault de leur rembourser chacun la somme de 95 855 $.

La mise en vente des DVD reproduisant les 125 premiers épisodes de la populaire série est à l'origine de la mésentente. Les profits nets générés par la vente des coffrets, que l'interprète de Passe-Carreau et M. Brault ont encaissé, seraient beaucoup plus élevés que ce qu'ils auraient dû recevoir en vertu d'une entente signée en 2006. Ceux-ci ont empoché un septième de 55 % des profits nets alors que le contrat stipulait que leur part s'élevait plutôt à un septième de 35 %.

L'avocate représentant Jacques L'Heureux et Marie Eykel, Me Margaret Weltrowska espère toujours que les deux parties en viennent à une entente à l'amiable afin d'éviter une bataille juridique. Elle souligne toutefois que, pour le moment, Claire Pimparé et Pierre F. Brault ont été peu collaborateurs.

«Évidemment, c'était l'approche favorisée au départ par mes clients, mentionne Me Weltrowska. Ils ont été très patients. Ils essaient de régler ce dossier-là depuis plus de six mois. Mais malheureusement, il n'y a eu aucune manifestation de l'autre côté.»

Pour sa part, l'avocat de Claire Pimparé et de Pierre F. Brault, Me Stéphane Roy, a refusé de commenter.

Par ailleurs, cette chicane concernant les droits n'est pas la première à survenir. Lors de la sortie des DVD en 2006, l'un des créateurs de l'émission, Laurent Lachance, avait intenté une poursuite contre Jacques L'Heureux, Marie Eykel et leurs maisons de production afin de faire reconnaître son droit d'auteur.

Quant à elle, Carmen Bourassa se tient à l'écart de toutes ces querelles. «Je n'ai pas le goût de vieillir avec de la rancoeur», confie la dame de 67 ans.

«Passe-Partout, c'est une poule aux oeufs d'or, illustre-t-elle. Sauf que la poule n'est jamais morte, ça fait un peu plus de 30 ans qu'elle survit parce que depuis les débuts, il y a beaucoup de gens qui aiment cette émission. C'est ce qui a permis d'éviter que cette série ne tombe, malgré ses problèmes.»