À un mois de la diffusion de l'adaptation française des Invincibles sur la chaîne culturelle Arte, entre le 9 et le 30 mars, les premières critiques dans les médias s'annoncent déjà très favorables.

Lundi midi, la rencontre avec toute l'équipe de l'émission, organisée dans une brasserie branchée de l'Odéon, a attiré une dizaine de journalistes des plus divers. Depuis les chroniqueurs de magazines télé jusqu'à une journaliste du quotidien communiste L'Humanité, qui s'était déplacée parce qu'elle trouvait la série «très bien, plutôt en phase avec l'époque».

Selon l'hebdo des professionnels Le film français, «l'adaptation est réussie, la série innove par le ton, impolitiquement correct, et la forme...» (bédé, interviews face à la caméra). Chez MakingProd, la jeune boîte qui a piloté le projet depuis les débuts et le coproduit, on vous dit volontiers que «les projections ont ravi aussi bien des journaux grand public que Le Monde».

Tout dépend maintenant de la réception du public. «Nous visons au moins 3 % de parts d'audience, dit François Sauvagnargues, patron des fictions sur Arte, c'est-à-dire environ 600 000 téléspectateurs. Un public jeune, que nous voulons fidéliser.»

Moins d'autos et de maisons

Pour faire plus français, les prénoms ont été changés, de même que les activités professionnelles des protagonistes. On cherchait une ville de province pour y situer l'action: c'est finalement Strasbourg qui a été choisie. Pour le reste, on a été fidèle à la trame principale, on a gardé les bédés d'origine et bien sûr, l'idée des interviews face à la caméra.

«On n'a fait que les adaptations nécessaires, dit l'une des quatre scénaristes, Brigitte Bémol, qui incarne aussi la «future ex» d'un personnage. Comme la saison passait de 12 épisodes à 8, on a supprimé des scènes et parfois, on en a inventé de nouvelles. Et bien sûr, on a fait les ajustements indispensables pour tenir compte des différences de mode de vie: en France, on vit en appartement, pas dans des maisons individuelles, la bagnole est moins omniprésente, etc.»

«Mais on a gardé l'essentiel: les aventures de quatre jeunes gars de notre époque qui refusent de vieillir», résume la scénariste.

Le travail d'écriture - à quatre - a été bouclé en six mois à peine pour l'adaptation des 35 épisodes québécois d'origine, un record semble-t-il: «François Létourneau et Jean-François Rivard (auteurs québécois des Invincibles) ont été parfaits et ils nous ont fait totalement confiance, explique Brigitte Bémol. On leur a montré les grandes lignes de notre adaptation, on s'est mis d'accord et ils nous ont entièrement fait confiance. Sur deux points, ils ont été intraitables: ils acceptaient n'importe quelle musique sauf le hip-hop. Et pour l'épisode des brosses à dents, ils ont refusé de changer pour un autre accessoire.»

Les «adulescents»

Cette série sur les «adulescents» (ou des jeunes qui refusent de devenir adultes) a été produite par une bande de jeunes: les producteurs Mathieu Viala et Stéphane Drouet sont en début de carrière. Comme Brigitte Bémol, Alexandre Castegnetti, l'un des deux réalisateurs, est également l'un des quatre scénaristes. Mises à part quelques vedettes françaises - de rang moyen - qui font ici et là une apparition, les acteurs sont tous des inconnus du grand public. Ce qui a permis à la Québécoise Marie-Ève Perron, fraîchement débarquée à Paris il y a deux ans, de décrocher le rôle de «Cathy casse-couilles» (la copine de Carlos, devenu Hassan en France)... mais à titre de comédienne française.

Le tournage de la première saison a nécessité trois mois, à raison de 700 000 euros par épisode de 52 minutes. Un budget à la fois modeste et important: «Le tournage est de qualité, surtout pour les scènes extérieures, dit le producteur Mathieu Viala, et je vous jure que 120 figurants, ça coûte cher!»

Comme l'écrit Le film français dans son dernier numéro, présenter Les Invincibles est «un pari ambitieux» pour la chaîne franco-allemande, qui a jusqu'ici diffusé des fictions «sérieuses», souvent historiques. Pour une audience âgée de plus de 50 ans en moyenne. Cette fois, la chaîne «intello» veut attirer un public dans la vingtaine, à dominante masculine, mais pas seulement, sur un créneau horaire assez particulier: deux épisodes de 52 minutes chacun mis bout à bout à partir de 22 heures, quatre mardis de suite, entre le 9 et le 30 mars.

Si tout se passe bien, la deuxième saison, déjà tournée, sera programmée à l'automne ou au printemps prochain. L'écriture de la troisième saison est terminée et le tournage est prévu dans un avenir proche.