Vous l'avez vu dans C.A., Taxi 0-22 et J'ai tué ma mère, vous le verrez la semaine prochaine dans la peau de César Borgia de la minisérie The Borgias, qui succédera aux Tudor dans les grilles de Showtime et Bravo! Pour François Arnaud, parfaitement bilingue, cette remarquable percée au petit écran pourrait débouler sur d'autres projets d'envergure internationale. De gros bonnets de Hollywood lui font déjà de l'oeil. Ça commence bien, non?

Le temps de pianoter OMG sur un téléphone intelligent, François Arnaud a gravi les vertes collines hollywoodiennes et changé son statut d'inconnu pour celui de star en devenir. Tout récemment, le jeune acteur montréalais a même mangé avec le superproducteur Jerry Bruckheimer, alias M. Hollywood, qui exploite les franchises les plus tonitruantes - et les plus lucratives - du cinéma et de la télévision comme CSI, Without a Trace, The Amazing Race, National Treasure et Pirates of the Caribbean.

Pour l'instant, ses auditions pour M. Bruckheimer ne se sont pas traduites en rôle concret, mais bon: François Arnaud se fait rapidement un nom à Hollywood. Déjà, son visage carré tapisse les plus gros panneaux publicitaires de Los Angeles à New York. Tout ça pour la minisérie The Borgias du réseau Showtime dans laquelle il incarne César Borgia, le fils impitoyable de Rodrigo Borgia, incarné par le grand Jeremy Irons. Un premier rôle dans cette somptueuse oeuvre d'époque que la chaîne Bravo! fait démarrer au Canada le dimanche 3 avril, à 22h. CTV repassera les neuf épisodes d'une heure The Borgias en mai.

«J'avoue, j'ai eu des meetings aux États-Unis que des gens qui sont à Hollywood depuis 10 ans n'ont jamais eus. J'ai accès à des scénarios que je n'aurais jamais eus avant», relate François Arnaud, conséquence du buzz positif qui enveloppe The Borgias, une série historique dans la lignée des Tudor et de Rome.

Franc et déterminé

L'acteur de 25 ans se pointe au rendez-vous avec un look négligé, mais étudié: bottes Sorel noires, jean usé et chemise à carreaux bleu et blanc. Pour les photos, François Arnaud sait exactement où regarder dans l'objectif et comment se placer devant une caméra. Il s'inquiète même de ses traits tirés. Allez-vous faire des retouches? demande-t-il candidement. Réponse: il n'en a aucunement besoin.

Avec ses grands yeux clairs, ses dents perlées et sa fossette qui lui divise le menton, François Arnaud a le physique (et la tête) pour percer chez les Américains. En entrevue, il ne se censure pas: il est direct, franc et déterminé, quitte à paraître un brin snob, ce qu'il n'est pas.

«Mon but, ce n'est pas de quitter le Québec. Des projets et des rôles intéressants ici, il y en a. Mais il y en a un par année. Et il faut que tu l'obtiennes. Je ne vois pas pourquoi je dirais non à un rôle dans un film de Steven Soderbergh pour continuer à jouer dans Caméra café. Moi, je veux être dans le prochain Bernard Émond, mais aussi dans le nouveau Batman. Ce que je n'ai pas envie de faire, ce sont des projets minés d'avance, où tout le monde sait que c'est de la merde et où tout le monde espère que personne ne s'en rendra compte», glisse-t-il.

Sur le circuit des festivals, François Arnaud a été repéré par un agent américain, Barry McPherson de l'agence APA, dans la foulée du succès international du film J'ai tué ma mère, où il incarnait Antonin, l'amoureux de Xavier Dolan. «J'ai réalisé la meilleure chose pour moi. Dans une grande agence d'artistes comme la CAA, j'aurais été perdu dans le lot. Ces grosses boîtes recrutent beaucoup d'acteurs pour bloquer les auditions. Ils ne veulent pas que tu fasses compétition à un Zac Efron, par exemple. L'agence APA, ce n'est pas juste une place de vedettes. Ils ont un rapport plus personnel avec nous», explique-t-il sur un ton calme et posé.

Avant de viser les grands studios américains, François Arnaud a d'abord tâté le marché français, sans trop de succès. «Je n'avais pas de problème avec l'accent français. Mon père a une maison en France et j'y ai peut-être passé le quart de ma vie. J'avais contacté quelques agents. Mais j'ai senti de la froideur et du snobisme, se souvient-il. Pourtant, les Français seraient prêts à laisser tomber André Téchiné et François Ozon pour un deuxième rôle dans 90210», se désole-t-il.

Puis, après plusieurs auditions, il a décroché son prestigieux rôle dans The Borgias, une minisérie réalisée par Neil Jordan, l'Irlandais qui a été derrière la caméra pour The Crying Game et Interview with a Vampire. Fin juin, à Budapest, Arnaud a entamé le long tournage des Borgias, une flamboyante coproduction entre le Canada, l'Irlande et la Hongrie. Cette absence de cinq mois lui a notamment fait renoncer à son rôle de Théo dans le téléroman Yamaska, à TVA.

Corruption, sang et sexe

The Borgias s'amorce en 1492 alors que la succession du pape Innocent VIII s'organise au Vatican. Les ambitieux Borgia, de descendance espagnole, rivalisent avec de puissantes familles italiennes pour le trône, multipliant les magouilles, meurtres et autres crimes pour s'accrocher au pouvoir.

«Est-ce pire que les Bush? Chose certaine, les Borgia sont plus intelligents», avance François Arnaud. Une fois élu pape, Rodrigo Borgia (Jeremy Irons) deviendra Alexandre VI et baignera encore plus dans la corruption, le sang et le sexe.

François Arnaud a lu plusieurs fois Le Prince de Machiavel, un ouvrage inspiré de son personnage, César Borgia. «J'aime mieux lire des trucs comme Le Prince que des biographies sur l'histoire des Borgia. Les faits concernant les Borgia ont souvent été racontés par leurs ennemis», relève-t-il.

Selon Arnaud, The Borgias se colle aussi «près de la réalité que ça peut l'être». La série ne montrera cependant pas la prétendue relation incestueuse qu'aurait entretenue César avec sa jeune soeur Lucrèce. «Rien de tout ça n'a été prouvé. Je crois qu'ils ont plutôt été l'amour d'une vie, l'un de l'autre. Ils ont été très proches», confie François Arnaud.

L'accent

Comme dans Rome ou Les Tudor, les personnages dialoguent presque tous en anglais d'Angleterre. Dans la vraie vie, François Arnaud parle un anglais nord-américain, sans trace de français. «Il n'y a personne qui sait que je suis francophone quand je parle anglais», indique-t-il. Dans The Borgias, il s'exprime avec un délicat soupçon de «cockney». «Mon personnage a une énergie plus intime, moins dans l'arrogance. L'idée, c'était qu'on pense le moins possible à l'accent. Je ne voulais pas non plus me mettre à jouer et à parler comme Maggie Smith», relate l'acteur, qui a décroché son diplôme du Conservatoire d'art dramatique en juin 2007.

De nature timide, François Arnaud, l'amant de Marie-Thérèse Fortin dans Les grandes chaleurs de Sophie Lorain et le fils gai de Patrick Huard dans Taxi 0-22, avoue avoir été «un peu hystérique» quand il a obtenu le rôle de César Borgia. Et son partenaire de jeu Jeremy Irons, oscarisé pour Reversal of Fortune, n'a pas du tout été chiant ou condescendant. «Il n'est pas froid. Il appelle tout le monde baby. Il est très méticuleux dans son travail», se souvient François Arnaud. En guise de préparation, le comédien s'est astreint à plusieurs leçons d'équitation et de maniement d'épée.

La première saison des Borgia se déroule sur une période de deux ans. Étant donné tout le battage publicitaire qui entoure ce produit télé, on s'imagine qu'une suite est déjà dans les cartons. Est-ce signé? François Arnaud sourit énigmatiquement, demande à son attaché de presse s'il a le droit d'en parler, et repart avec ses verres fumés sur le bout du nez. La réponse viendra plus tard. Peut-être.

*****

Los Angeles ou Montréal ?

«J'aime mieux vivre à Montréal. Mais plus je vais à Los Angeles, plus j'aime ça. On dit que Los Angeles est une grosse banlieue et je hais la banlieue. Il y a quand même des quartiers cool comme Silver Lake et Los Feliz», dit François Arnaud.

Critique éclair

Si vous suivez avidement Les Tudor, vous adorerez The Borgias. C'est le même type d'émission de qualité, bien emballée, bien costumée et rythmée par une musique angoissante.

Dans le rôle du patriarche Rodrigo Borjia, Jeremy Irons est parfait en homme assoiffé de pouvoir, prêt à tout pour grimper les échelons. Il a cette lueur de folie dans l'oeil qui le rend inquiétant.

François Arnaud, dans la peau de César Borgia, tire bien son épingle du jeu, même s'il marmonne un peu trop souvent entre ses dents. Ce rôle important lui ouvrira les portes de tous les plus grands studios hollywoodiens, c'est clair.

Une des belles surprises de The Borgias, c'est le Canadien Colm Feore, le partenaire de Patrick Huard dans Bon Cop, Bad Cop, qui incarne le grand rival de Rodrigo Borgia, le cardinal Della Rovere. Il fera tout pour débarrasser Rome des Borgia.

Showtime et Bravo ! parlent de la série The Borgias comme de la «série de tous les péchés» et de la famille « du crime originel ». Après avoir visionné les deux premières heures, un constat s'impose : c'est loin d'être aussi sulfureux et scandaleux que promis. Oui, les scènes de violence se multiplient au deuxième épisode. Mais rien pour se plaindre au CRTC. N'empêche: on ne s'emmerde pas deux secondes avec ce clan dysfonctionnel. En espérant que Radio-Canada en achète les droits pour une diffusion en français.