Elle s’est déguisée en Nemo. A fait des pieds et des mains pour la rencontrer. Puis a finalement réussi à l’interviewer. Julie Snyder, qui a diffusé son fameux entretien avec Ellen DeGeneres au lancement de La semaine des 4 Julie, en janvier 2020, revient sur la carrière de l’humoriste et animatrice américaine, en quatre temps.

« Yep, I’m Gay »

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Ellen DeGeneres a fait la une du Time Magazine.

C’est l’une des unes du Time Magazine qui ont le plus fait jaser. Un certain 14 avril 1997 qui est passé à l’histoire. C’était il y a 25 ans, et pour l’une des toutes premières fois, une vedette lesbienne américaine sortait médiatiquement du placard, de manière aussi sobre que retentissante. « Et cela a eu un impact majeur dans la société américaine, commente Julie Snyder. Elle a même ensuite perdu son emploi ! [...] À l’époque, moi, je faisais un talk-show : Le Poing J. Ayoye, elle perd sa job ! Wo ! Moi, déjà, je trouvais ça précaire être une femme et animer un talk-show à TVA. Juste être une femme, je trouvais ça tough. Une chance que j’étais hétéro ! » Une sortie qui a drôlement brassé la société américaine, et, pour ce, « bravo ! ». « Elle a fait évoluer la société, elle a ouvert la porte – défoncé la porte ! – pour tous les homosexuels ! Et elle en a payé le prix... »

Coming out de son personnage

Le 30 avril 1997, soit deux semaines après ce fameux coming out, le personnage qu’elle incarne dans la sitcom Ellen sort à son tour du placard dans un épisode à la fois mémorable et historique. The Puppy Episode bat à l’époque des records de cotes d’écoute. « C’est un grand moment, souligne Julie Snyder, et c’est très intéressant, parce que Ellen était une sitcom, mais aussi une sorte de téléréalité, quand on l’analyse avec le prisme actuel. [...] Il y avait quelque chose de l’autofiction. [...] Il y a vraiment quelque chose de précurseur. » Mais il y a plus : « Elle a créé une convergence, poursuit Julie Snyder, avec sa une dans le Time Magazine, puis ses cotes d’écoute record. Il y a là une stratégie opportuniste, d’un bon opportunisme [...] parce qu’elle en a fait quelque chose de très constructif. » Pour le meilleur, mais aussi pour le pire. La controverse autour de son homosexualité aura en effet raison de l’émission.

Dory, le grand retour

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Scène de Finding Nemo

Après avoir disparu du décor, c’est avec la doublure de Dory (Finding Nemo), quelques années plus tard, qu’Ellen DeGeneres se « reconstruit » et fait surtout son grand retour public. Un contrat qui l’occupe pas moins de trois ans. « Ellen DeGeneres m’a dit en entrevue qu’elle était un peu comme Dory, un peu mêlée, se souvient d’ailleurs Julie Snyder. Mais c’est quand même incroyable que ce soit un poisson qui l’ait ramenée à Hollywood ! » Au cours de l’entrevue, l’animatrice américaine est aussi revenue sur cette période trouble qui a précédé ce grand retour, abordant de front sa disgrâce et sa dépression.

Le voyage au Rwanda avec les gorilles

Depuis 2003, Ellen DeGeneres anime son émission homonyme, avec le succès retentissant que l’on sait (en dépit des remous des dernières années). Entre autres moments phares, Julie Snyder retient celui-ci. C’était il y a quatre ans. Pour ses 60 ans, Portia de Rossi, la femme d’Ellen DeGeneres, a fait une incursion surprise sur son plateau pour lui offrir un cadeau pour le moins inusité : un voyage au Rwanda pour voir les gorilles, et surtout une fondation en son nom (le Ellen DeGeneres Wildlife Fund). Un moment clé, selon Julie Snyder, parce qu’il incarne à lui seul bien des aspects du personnage : « C’est juste beau, c’est un cadeau de sa femme, en hommage à son idole, Dian Fossey. [...] Et puis moi, j’aime beaucoup les animaux. De savoir que son idole est Dian Fossey [NDLR : célèbre primatologue américaine], ça nous sensibilise à la protection de l’environnement. Elle, son rêve, ce n’est pas d’aller dans un château en Espagne [...], mais d’aller voir les gorilles. C’est vraiment le fun comme rêve, c’est inspirant ! Et la végétarienne en moi est contente ! »

Regardez l’extrait d’Ellen DeGeneres qui parle de son voyage au Rwanda

Les dessous de l’entrevue

Julie Snyder s’en souviendra longtemps. C’était en juin 2019, dans les studios de Warner, en Californie. « Les bureaux d’Ellen DeGeneres sont à côté de ceux de Clint Eastwood, c’est vraiment impressionnant ! » Mais n’entre pas là qui veut. « C’est assez militaire, rit-elle. C’est quasiment plus compliqué qu’entrer au Liban ! Très structuré et formaté. » Cela dit, « on nous a très, très bien traités », la faisant passer d’abord dans une loge (garnie de photos de l’animatrice avec plusieurs de ses invités vedettes, à savoir « le monde entier ! »), puis une roulotte, avant d’arriver enfin sur le plateau. On imagine à peine le stress. « Moi, j’ai vomi mon stress », se souvient-elle, en riant toujours. « Mais finalement, ça s’est super bien passé. Elle était super drôle, super généreuse. »