De la Finlande à la Corée du Sud en passant par l’Angleterre, le Brésil et l’Islande, le cinéaste Hugo Latulippe est parti à la recherche du bonheur. Précision : pas de son bonheur personnel, bien sûr, mais rien de moins que du bonheur collectif. Le résultat de cette ambitieuse mission, Le projet Bonheur intérieur brut, sera diffusé tous les mardis sur les ondes de TV5.

En 10 épisodes, et après avoir fait le tour de 14 pays, rencontré 69 personnages, le réalisateur qui s’est fait connaître avec La course destination monde tente de cerner ce qui donne un sens à nos vies et nous rend tous globalement plus heureux.

En gros : si ce n’est pas l’argent (et on sait qu’au-delà d’un certain seuil, ça ne l’est pas), qu’est-ce que c’est ? La santé (de l’esprit), l’éducation (perpétuelle), les relations (humaines) ? Tout y passe, avec la touche plus personnelle du réalisateur à qui l’on doit Bacon, le film et Ce qu’il reste de nous (coréalisé avec François Prévost), et qui a ajouté ici la musique, l’océan, même la méditation à l’équation.

Nous avons visionné deux épisodes en rencontre de presse mercredi, et en toute transparence, dur de ne pas regarder la série sans sourire. Cyniques s’abstenir, on est ici pour rêver un monde meilleur, et c’est très clair dès les toutes premières prises de vue. La bande-annonce en dit long sur le ton, et la portée de la quête en question, aussi philosophique que pratico-pratique, d’ailleurs.

« On a longtemps pensé que le produit intérieur brut était gage de richesse, que le matériel, l’argent serait pour toujours la mesure, l’apogée d’une vie réussie, entend-on Hugo Latulippe expliquer à la narration. Mais qu’est-ce qui ne tourne pas rond dans notre course folle ? »

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Hugo Latulippe, réalisateur

Nous nous sommes mis en quête d’une autre manière de vivre nos vies, en quête de sociétés plus amples, plus sages et d’une autre échelle pour la suite.

Hugo Latulippe, réalisateur

C’est ainsi que le cinéaste part ici à la rencontre de personnages variés, certains plus convenus – la première ministre d’Islande, le fondateur du Happiness Research Institute ou le fondateur du mouvement Slow Food –, d’autres plus inédits : une chorale en Afrique du Sud, une équipe féminine de football au Brésil, un moine en Corée du Sud. Sans oublier plusieurs scientifiques, philosophes, même des économistes de renom. On le suit littéralement dans son périple, à travers ses réflexions et toutes ses interrogations, comme si on entrait dans la discussion.

Pour le bonheur collectif

L’a priori, on l’a dit, est d’emblée « positiviste », c’est même écrit tel quel dans le document de presse. « Je cherche, écrit le réalisateur, des semblables à aimer, des manières de trouver une paix intérieure, une adéquation avec ma nature, avec la nature… et avec notre époque. Sachant bien l’échelle des choses et la minusculité de nos existences individuelles, je pars à la rencontre d’inventeurs fous, de sages et de communautés inspirantes qui détiennent des éléments du puzzle – si petits soient-ils – qu’il nous faudra pour remettre le monde à l’endroit. » Ne cherchez pas de détracteurs ici, il n’y en aura pas. C’est une série d’auteur, après tout, et il ne s’en cache pas.

D’ailleurs, pour la petite histoire, c’est TV5 qui a pris contact avec Hugo Latulippe pour ce projet, que le réalisateur a d’abord gentiment refusé. « Je ne fais plus de télé et le bonheur individuel, ça ne m’intéresse pas beaucoup », a-t-il confié en toute franchise mercredi, en marge du visionnement, au Cinéma Moderne. « Beaucoup de gens parlent de ça, et moi, la psycho pop, ça m’intéresse zéro ! » Puis, en pèlerinage au Japon, il a eu une illumination : et si on axait la question sur le bonheur collectif ? « Ça, ça m’intéresserait ! Le bonheur des peuples et des sociétés ! » Angle accepté, on l’aura deviné.

À noter qu’il a aussi insisté pour que le tout soit produit dans le Bas-Saint-Laurent, là où il vit aujourd’hui, d’où le partenariat avec Tapis Rouge Films, dans une production carboresponsable (un reboisement social est prévu à Kamouraska pour compenser les émissions carbone de la production).

Parlant de production, on vous épargne le casse-tête logistique du tournage, qui s’est étiré sur cinq ans, dès 2019 et à travers toute la pandémie. Annulations d’entrevues in extremis et voyages en avion (non prévus) inclus.

Il faut savoir que les différentes variables étudiées (à l’origine des différents épisodes), que ce soit la santé, l’accès à la nature ou l’esprit de communauté, sont toutes tirées du World Happiness Report des Nations unies, un rapport qui classe les pays non pas selon leur produit intérieur brut, mais bien selon leur score en matière de bonheur. À l’origine de ce rapport, « ce sont des économistes qui travaillent à complexifier la définition de la richesse », précise le réalisateur, qui interroge l’un d’eux à Londres, dans l’épisode (le deuxième) sur la richesse.

Le verdict de tout ce beau périple ? « La variable vérifiée par la science et qui sort dans les données, avant la santé du corps ou l’argent, c’est le coefficient de communautés dans ta vie. C’est ça, la première variable, la première affaire qui sort [à la source du bonheur]. S’il y a une chose à retenir, c’est ça ! »

Et maintenant, une fois cela dit, que fait-on, ose-t-on ? « Moi, ce qui m’intéresse, ce sont les catharsis, répond Hugo Latulippe. Comment on se met en marche pour que nos vies soient cohérentes avec ce qu’on sait et ce qu’on pense ? En disant tout haut ce qu’on sait… »

Dès le 30 janvier à 20 h sur TV5. En ligne sur TV5Unis.

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