Puissante, engagée, passionnée, celle qui avait le pouvoir de « faire et défaire des carrières » dans le monde de la télévision québécoise était aussi d’une grande loyauté envers les siens et porteuse de valeurs féministes. Beaucoup ont tenu à lui rendre hommage lundi soir.

« Louise Cousineau pouvait faire ou défaire une carrière, une émission de télé », se souvient Julie Snyder. L’animatrice et productrice est toujours restée proche de Mme Cousineau, même après son départ de La Presse. L’annonce de la mort de la chroniqueuse lundi soir a été un choc pour elle.

« C’était la femme la plus puissante des médias », tranche Julie Snyder au bout du fil. « À Radio-Canada, ils prenaient leurs décisions en fonction de ses chroniques. »

« C’était un monument du journalisme québécois », abonde dans le même sens Philippe Cantin, ancien vice-président de l’information et éditeur adjoint de La Presse. « C’était aussi une référence en télévision : les gens l’écoutaient, lui faisaient confiance. »

Louise Cousineau était une conteuse-née, un véritable personnage, tant dans ses écrits que dans sa vie. Une présence hors norme dont a témoigné en ligne l’ex-journaliste de La Presse et député de Québec solidaire Vincent Marissal lundi soir.

Ses pantoufles dans la salle de rédaction, sa cigarette allumée dans son tiroir pour braver l’interdiction, son humour grinçant, ses chroniques assassines, c’est toute une époque qui part avec Louise.

Vincent Marissal, ex-journaliste de La Presse et député solidaire, sur X

« On tremblait quand on avait une conférence de presse avec elle, se souvient aussi Mme Snyder. On voulait être sûrs qu’elle allait aimer le buffet ! »

Passionnée et passionnante

La plume aiguisée et franche de Louise Cousineau se reflétait tant dans sa personnalité que dans ses relations. Elle ne se gênait pas pour dire ce qu’elle pensait. Et elle était de celles qui profitent des bonnes choses, affirme Julie Snyder.

« C’était quelqu’un qui aimait vraiment la vie : bien manger, bien boire et fumer. »

« C’était la femme la plus droite et la plus honnête que j’ai jamais rencontrée », renchérit son amie de longue date Claire Samson, ex-députée et qui a fait carrière dans les médias. Les deux se sont rencontrées quand Mme Samson était attachée de presse à Radio-Canada. « Je lui ai dit : “Qu’est-ce que vous attendez de moi ?”, se remémore Mme Samson. Et elle m’a répondu : “Des scoops !” »

L’amitié des deux femmes s’est poursuivie pendant des décennies. La santé déclinante de Louise Cousineau attristait Mme Samson, qui a continué de la visiter jusqu’à la fin. « Je suis très peinée d’apprendre sa mort, mais en même temps, je suis soulagée pour elle, a-t-elle confié à La Presse. Connaissant Louise, elle n’aurait pas voulu poursuivre sa vie dans ces conditions-là, c’est sûr. »

Travail de qualité et féminisme

Dans le travail de Louise Cousineau, certaines valeurs tenaient lieu de ligne directrice. « Elle n’avait qu’un seul patron, je pense, et c’est le public », estime Julie Snyder.

En parallèle, la chroniqueuse a soutenu le travail des femmes dans le monde de la télévision, à une époque où elles y étaient bien moins nombreuses.

L’auteure et scénariste Sylvie Payette, à qui on doit notamment Chambres en ville, l’a souligné en ligne lundi soir : « J’ai eu de la chance qu’elle apprécie mon travail, a-t-elle écrit sur X. Je sais qu’elle égratignait parfois, c’était une passionnée. On attendait ses critiques avec inquiétude. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

L’animatrice et productrice Julie Snyder

Ce que je retiens d’elle : une femme féministe à l’époque où ce n’était pas à la mode, où on était à des années-lumière du mouvement #metoo. Je retiens une femme puissante qui soutenait les femmes.

L’animatrice et productrice Julie Snyder

Les témoignages ont afflué sur les réseaux sociaux lundi après l’annonce de la mort de la chroniqueuse. Plusieurs ont tenu à souligner son legs et sa personnalité plus grande que nature.

« Je vous aimais parce que franche, frontale, pas de courbette, pas de rectitude, du vrai, du mordant, du tendre, de l’esprit et un grand amour de la vie », s’est ému sur X le ministre et ex-journaliste Bernard Drainville.

« Elle a défini l’espace critique de la télévision avec audace, droiture, humour et une sensibilité aiguë de la nature du média », a aussi analysé Bruno Boutot, journaliste et consultant, sur la même plateforme.

L’auteur et réalisateur Stéphane Laporte, lui, a conclu son hommage par un clin d’œil : « Paix à son âme. Si jamais la vie éternelle est plate, Dieu va se le faire dire ! »