Nouvelle adaptation du roman du même nom de James Clavell, Shōgun est une série grandiose qui se déroule à la veille d’une guerre civile au Japon, au début du XVIIsiècle. La Presse s’est entretenue avec Justin Marks et Rachel Kondo, cocréateurs des 10 épisodes qui seront diffusés sur Disney+.

Le livre et la minisérie

PHOTO FOURNIE PAR PARAMOUNT TELEVISION

Richard Chamberlain dans la minisérie Shōgun de 1980

Certains ont probablement lu le livre de James Clavell, paru en 1975. Certains ont possiblement vu la minisérie diffusée sur NBC cinq ans plus tard. Les deux œuvres ont marqué l’imaginaire, alors que des millions d’exemplaires du roman ont été vendus et que l’adaptation télévisuelle a remporté des prix Emmy et Golden Globe. Bien que le feuilleton américain a été entièrement tourné au pays du Soleil-Levant, il présentait surtout le point de vue du marin britannique John Blackthorne, interprété par Richard Chamberlain. Justin Marks et Rachel Kondo, cocréateurs, scénaristes, producteurs exécutifs ainsi que mari et femme, se sont assurés que le patrimoine japonais soit davantage représenté dans leur nouvelle adaptation. « Afin de raconter une histoire basée sur des faits historiques du Japon féodal, on devait aller bien plus loin que notre zone de confort occidentale. Sans dire que notre regard n’était pas pertinent, il devait être modulé. Ainsi, nous avons travaillé avec une petite armée de producteurs, de conseillers et d’experts japonais en langage, en histoire, en culture, même en coiffure et en maquillage », indique en entrevue virtuelle Justin Marks, qui a entre autres écrit Top Gun : Maverick et The Jungle Book.

La véritable histoire

PHOTO MICHAEL TRAN, AGENCE FRANCE-PRESSE

Rachel Kondo et Justin Marks, cocréateurs, scénaristes et producteurs exécutifs de Shōgun 

Shōgun est en partie inspirée de la vie du pilote anglais William Adams, dont le bateau néerlandais s’est échoué sur les côtes du Japon en 1600. Son arrivée coïncide avec le début d’une lutte de pouvoir entre cinq seigneurs pour la tête du pays à la suite de la mort du Taikō, membre du régime impérial ébranlé par la montée des samouraïs. L’éclatement d’une guerre civile qui se prolongera sur une centaine d’années s’en suivra. « Le roman de James Clavell, qui est un véritable accrolivre [page-turner], a été notre étoile Polaire par rapport à l’approche du récit. Il suit le parcours interconnecté de trois personnages – Toranaga, Mariko et Blackthorne – qui ont chacun un passé et une histoire propres à eux », souligne Rachel Kondo, qui est aussi autrice. Elle note qu’il aurait fallu que la série dure 50 heures pour inclure tous les personnages du livre de l’écrivain mort en 1994.

Visionnez une vidéo pour en savoir davantage (en anglais)

Les personnages

  • Cosmo Jarvis incarne John Blackthorne.

    PHOTO KURT ISWARIENKO, FOURNIE PAR FX

    Cosmo Jarvis incarne John Blackthorne.

  • Hiroyuki Sanada dans le rôle de Yoshii Toranaga

    PHOTO KURT ISWARIENKO, FOURNIE PAR FX

    Hiroyuki Sanada dans le rôle de Yoshii Toranaga

  • Anna Sawai joue Toda Mariko.

    PHOTO KURT ISWARIENKO, FOURNIE PAR FX

    Anna Sawai joue Toda Mariko.

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John Blackthorne est cette fois incarné par Cosmo Jarvis (Lady Macbeth, Persuasion), dont le jeu rappelle celui de Tom Hardy. Protestant loyal à la Couronne, il tente de s’immiscer dans les relations commerciales entre Portugais catholiques et Japonais, qui se sont convertis au christianisme en grand nombre depuis la venue des Européens, il y a 60 ans. Le seigneur Yoshii Toranaga – inspiré par Tokugawa Ieyasu, qui a vécu de 1543 à 1616 – est interprété par le brillant Hiroyuki Sanada (The Twillight Samurai, John Wick : Chapter 4). Il sauve la vie du marin, alors que Japonais et Portugais le considèrent comme une menace. Au départ, son intérêt pour le Britannique est purement stratégique, mais une confiance réciproque s’établit graduellement grâce entre autres à Toda Mariko (Anna Sawai, qu’on a pu voir dans F9 et la série Monarch : Legacy of Monsters). Interprète du daimyo Toranaga, elle enseigne mœurs et coutumes à Blackthorne, puis des liens se tissent entre eux. « Hiroyuki Sanada est né pour jouer ce rôle », affirme Rachel Kondo. « La plupart des autres acteurs japonais ne sont pas connus en Occident ou on ne les a jamais vu jouer dans leur propre langue. J’étais heureux de les faire découvrir », ajoute Justin Marks.

Notre avis

PHOTO FOURNIE PAR FX

Hiroyuki Sanada est aussi l’un des producteurs de Shōgun.

Certaines critiques ont comparé Shōgun à Game of Thrones. Ce n’est pas tout à fait juste, car cette dernière est une fiction fantastique qui s’est déployée sur huit saisons. On peut y voir des parallèles dans la trame narrative d’une grande ampleur ancrée par des personnages aussi mystérieux que fascinants, joués avec finesse. Le souci d’authenticité de Shōgun est remarquable, en commençant par une importante proportion des dialogues en japonais. Le reste aurait dû être en portugais, mais on accepte le choix de l’anglais pour faciliter la compréhension. Le récit se déploie sans se précipiter et l’action se fait rare en début de parcours. Notre patience est toutefois récompensée par des revirements inattendus et des scènes d’une brutalité et d’un réalisme stupéfiants. Justin Marks nous a expliqué en entrevue qu’une bonne partie des décors ont été construits dans un vaste studio et sur un terrain de 30 acres à Burnaby, en Colombie-Britannique, afin de « rendre un monde qui n’existe presque plus tangible ». Shōgun est convaincant, au point d’avoir l’impression de regarder la plus passionnante des leçons d’histoire.

Sur Disney+ dès le 27 février