Dérider le public de Juste pour rire, avec une comédie d'une incroyable légèreté, déjà vieille de quatre décennies, tel était le défi casse-cou de Serge Postigo, qui s'est attaqué à Boeing Boeing, de Marc Camoletti.

Tous les clichés sont au rendez-vous (l'Allemande rustre, l'Espagnole bouillante, l'Américaine olé olé...), dans cette comédie très sixties, où la caricature est aussi présente que sur la place Jacques-Cartier. Quant à l'intrigue, on ne saurait imaginer plus prévisible: un architecte qui mène de front une vie sentimentale avec trois jolies hôtesses de l'air, suscitant ainsi l'admiration de son vieux copain coincé et la réprobation de sa bonne acerbe. Il fallait s'attendre à ce que claquent les portes!

Sur papier, on pourrait croire que pour sa première expérience à la mise en scène, Serge Postigo s'est lancé dans une galère destinée à piquer du nez. Or, il s'avère non seulement un comédien comique formidable, mais aussi un excellent directeur d'acteurs.

Vous comprendrez que la qualité du jeu est cruciale pour rendre digeste cette pièce comico-rétro-kitsch qui «ne réinvente pas l'eau chaude» (pour paraphraser Berthe la bonne, défendue par la truculente Alexandrine Agostini).

L'efficacité de la mise en scène de Postigo tient certainement au goût de la démesure qu'il a insufflé à toute la production. Chacune à sa manière, les trois actrices déguisées en hôtesses de l'air rétro (Catherine-Anne Toupin, Karine Belly et Marie Turgeon) esquissent à gros traits des fantasmes féminins. Leur jeu est intelligent, exagéré, débridé, délirant...

L'intrépide Alexandrine Agostini, dans les habits d'une bonne revêche et excédée, est un autre des nombreux points forts de Boeing Boeing. Serge Postigo et Pierre-François Legendre, de leur côté, composent un tandem de Québécois aux moeurs légères tout à fait hilarant. Que de bons mots, par ailleurs, pour l'adaptation «québécoise» également signée Serge Postigo, qui a ouvert les possibilités comiques de cette pièce.

Peu de temps morts, beaucoup de turbulences, de singeries et de rires francs dans cette folie estivale de deux heures. Il n'est pas donné au premier comique venu de réinventer le genre «maîtresse dans le placard». Boeing Boeing s'acquitte de cette tâche avec fraîcheur et intelligence.

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Boeing Boeing, texte de Marc Camoletti, adaptation et mise en scène de Serge Postigo, au Monument-National jusqu'au 18 juillet et du 6 août au 8 septembre au Chapiteau Bromont.