Cinq adolescents, une étape importante. Plus que quelques cours à réussir et ils vivront ce moment attendu avec impatience. Leur passage de la deuxième à la troisième secondaire. Leur entrée dans le pavillon des grands, là « où on devient des hommes ».

Mais qu’est-ce qu’un homme au juste ? C’est cette question que l’auteur et metteur en scène Maxime Mompérousse explore dans Hégémonie, pièce destinée aux 12 ans et plus à l’affiche à la Maison Théâtre.

Un sujet d’actualité, puisque l’automne dernier, l’effet sur les adolescents québécois d’influenceurs machistes, comme Andrew Tate, a fait les manchettes. Si certains disent qu’Hégémonie s’oppose à cette masculinité toxique, en entrevue avec La Presse après une représentation, Maxime Mompérousse a des réserves quant à ce terme. « J’ai fait exprès de ne pas l’utiliser dans ma description de projet parce que, pour moi, ce terme-là est parfois mal compris, surtout avec les adolescents. Il y en a qui font des amalgames et qui vont dire que les hommes sont toxiques. Ce n’est pas là qu’on veut aller », explique-t-il.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Les six comédiens, Harou Davtyan, Fabrice Yvanoff Sénat, Émanuel Frappier, Camille Blouin-Picard, Vincent Kim et Maxim St-Amant, reçoivent les applaudissements des jeunes spectateurs.

Avec ce groupe de cinq amis qu’il présente sur scène, l’auteur souhaitait montrer un « éventail de masculinités », car, à ses yeux, il n’y a pas une seule façon de devenir et d’être un homme, peu importe les idéaux véhiculés dans la société.

Rencontres en classe

Pendant son processus d’écriture, Maxime Mompérousse s’est rendu dans des écoles secondaires en 2020 et en 2021 pour discuter de cette thématique. Garçons et filles ont nourri sa réflexion sur la masculinité. « Le sujet qui revenait le plus souvent, c’est l’impression qu’un homme ne pouvait pas être vulnérable et ne pouvait pas montrer ses émotions », révèle-t-il.

« J’ai grandi avec ce concept-là aussi, mais on acceptait ça, c’était normal, poursuit l’auteur de 32 ans. Aujourd’hui, il y a des questionnements. »

Beaucoup de questionnements, constate-t-il. Du côté des adultes, comme chez les jeunes. Il déplore toutefois le fait que les adolescents n’aient pas nécessairement les ressources pour trouver des réponses. « Dans l’époque à laquelle on évolue, avec l’internet, avec la technologie, ils sont bombardés d’informations. […] Mais ils n’ont pas vraiment de livre d’instructions pour les aider à se repérer dans ces questionnements-là. Ça m’a frappé », affirme-t-il.

Je donne toujours cet exemple d’un adolescent de 13 ans qui, en classe, m’a dit : « Je ne sais plus comment dire à une fille que je l’aime. Je préfère ne pas le dire. Si j’aborde une fille, je peux être vu comme un agresseur. » C’est dommage !

Maxime Mompérousse

Pistes de réflexion

Avec Hégémonie, Maxime Mompérousse ne souhaite surtout pas faire la morale aux jeunes ou leur dire quoi penser. Il a toutefois voulu lancer des pistes de réflexion pour que cette période de transition où les garçons deviennent des hommes se passe plus sereinement.

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Les comédiens Émanuel Frappier et Vincent Kim rencontrent les jeunes spectateurs après la pièce.

D’abord, il démontre que bâtir des ponts entre les garçons et les filles peut être bénéfique. « Quand on est jeune, qu’on est entre gars, on ne parle pas aux filles. On ne sait pas ce qui se passe dans le monde des filles », fait valoir l’auteur. Pour recréer cette séparation sur scène, il a fait le choix de ne montrer aucun personnage féminin. On les entend, mais on ne les voit pas. Or, au cours de la pièce, un des adolescents osera tisser des liens avec une nouvelle élève et sera agréablement surpris.

L’auteur a aussi mis de l’avant un personnage « super authentique ». « Il est très bizarre, mais il s’assume beaucoup », décrit-il. Ce garçon volubile qui adore Le roi lion et se soucie peu du regard des autres est une invitation à « s’embrasser comme on est ».

S’aimer entièrement

C’est ce que Maxime Mompérousse aimerait que les jeunes retiennent de sa pièce. « S’aimer, ce n’est pas seulement aimer nos qualités et nos forces, c’est aussi apprécier nos défauts et ce qu’on considère qui nous rend plus faible ou plus vulnérable. Une personne, c’est un tout. »

Les cinq personnages, que l’on suit à travers leurs histoires d’amour ou d’amitié, leurs difficultés scolaires et l’épreuve du deuil, sont d’ailleurs loin d’être parfaits. Et lorsqu’on entend les chuchotements dans la salle et qu’on voit les regards échangés entre certains jeunes spectateurs au cours de la pièce, on comprend que ces derniers se reconnaissent (ou voient leurs amis) dans ces cinq hommes de demain.

La pièce Hégémonie est présentée jusqu’au 23 février, à la Maison Théâtre.

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Qui est Maxime Mompérousse ?

  • Diplômé de l’École de théâtre du collège Lionel-Groulx
  • À la télévision, il a notamment joué dans District 31 et Au secours de Béatrice.
  • Au théâtre, on a pu le voir dans de nombreuses pièces, dont M’appelle Mohamed Ali.
  • Touche-à-tout, il est aussi metteur en scène, auteur, et il étudie en réalisation.
  • Sa pièce Hégémonie a été présentée pour la première fois dans le cadre de la Rencontre Théâtre Ados, en 2022.