Les amateurs de voitures qui achètent des revues américaines le savent bien : contrairement à nous, les Américains calculent la consommation d'essence en miles par gallon d'essence. De grandes parties de l'Amérique latine, le Japon et l'Inde divisent aussi la distance parcourue par la quantité de carburant, mais avec le système métrique, ce qui donne des kilomètres par litre.

Une nouvelle étude américaine affirme que ce choix en apparence anodin a un impact important sur la lutte contre l'effet de serre. C'est qu'il est beaucoup plus difficile de comparer la consommation en kilomètres par litre plutôt qu'en litres par kilomètre.« Comme aux États-Unis les voitures les plus gourmandes ont des chiffres de consommation moins élevés, l'automobiliste moyen a de la difficulté à comparer deux voitures », explique Jack Soll, un économiste de l'Université Duke, en Caroline-du-Nord, qui cosigne l'étude parue dans la revue Science. « À notre avis, ça peut expliquer une partie de la popularité des modèles qui consomment beaucoup d'essence. »

La consommation d'essence des voitures neuves vendues au Canada est de 8,6 L/100 km, contre 11,6 L/100 km aux États-Unis.

Si un automobiliste échange une voiture qui affiche 10 miles au gallon (MPG) pour une voiture qui fait 20 MPG, il économise cinq gallons sur une distance de 100 miles. Remplacer une voiture qui fait 25 MPG pour une autre qui fait 50 MPG résulte en une économie deux fois et demie moins importante, deux gallons par 100 miles. Le problème, c'est qu'à première vue, le premier changement semble moins impressionnant que le second.

En mesures canadiennes, on passe de 23,5 à 11,8L/100 km dans le premier cas, et de 9,4 à 4,7L/100 km dans le deuxième cas. On voit tout de suite où le gain est le plus grand.

« Notre manière de calculer la consommation d'essence accentue l'impression d'efficacité pour les petites voitures, et les rend moins impressionnantes pour les 4X4 et les autres mastodontes des routes », dit M. Soll, qui a eu l'idée de l'étude avec des discussions sur la consommation d'essence en se rendant au travail avec sa Camry hybride avec des collègues. « Or, ce sont précisément les propriétaires de 4X4 qui gagneraient à améliorer un peu leur performance à la pompe. »

L'étude a demandé à 78 cobayes de gérer une flotte de 200 véhicules. La moitié étaient des 4X4 faisant 15 MPG, et l'autre des petites voitures faisant 34 MPG. Les participants pouvaient remplacer les 4X4 pour des modèles similaires affichant 19 MPG, ou les voitures par des modèles affichant 44 MPG.

Quand on leur donnait seulement ces informations, les trois quarts des cobayes n'arrivaient pas à comprendre que les économies d'essence étaient plus importantes pour le remplacement des 4X4. Mais quand on transformait la mesure de la consommation en gallons par 100 miles, les deux tiers prenaient la bonne décision.

Au Canada, une commission scientifique mise sur pied lors du passage du système impérial au système métrique en 1979 est arrivée aux mêmes conclusions que les chercheurs américains, et a recommandé que la consommation d'essence des voitures soit mesurée en litres au kilomètre plutôt qu'en kilomètres au litre. Avant, la consommation était mesurée en gallons impériaux au mile, selon Jean Riverin de Transports Canada.

Le système impérial n'est pas en cause, précise M. Soll. « Dans des pays comme l'Inde, où on calcule en kilomètres par litre, notre analyse tient toujours. » Le site de nouvelles économiques indien Livemint rapporte que la Société des constructeurs automobiles indiens a refusé de fournir les chiffres de consommation en litres au 100 kilomètres.

Une fonctionnaire du gouvernement américain avec qui les économistes de Duke ont été en contact a souligné que la consommation d'énergie des électroménagers est donnée en dollars par durée d'utilisation, ce qui est l'équivalent des litres aux 100 kilomètres. Cette fonctionnaire est spécialiste de la manière de présenter l'information pour aider les consommateurs à faire des choix éclairés.