Coup double pour la justice internationale. Deux criminels de guerre en fuite depuis plus de 15 ans ont été arrêtés hier. Le premier pour son rôle dans les massacres des Balkans, au milieu des années 90; le second pour avoir contribué à orchestrer le génocide rwandais du printemps 1994.

L'arrestation de Ratko Mladic, surnommé «le boucher des Balkans», est la plus spectaculaire. À l'époque de la guerre de Bosnie, il formait un tandem de choc avec un autre chef de guerre, Radovan Karadzic, dont le procès se poursuit actuellement devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, à La Haye.

Psychiatre machiavélique, Radovan Karadzic a été responsable du lavage de cerveau qui a ouvert la porte aux pires crimes de guerre commis en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale. Ratko Mladic, lui, était son homme de main, celui qui a organisé l'implacable siège de la ville de Sarajevo. Celui, aussi, qui a mis au point le piège de Srebrenica, cette supposée enclave humanitaire où près de 8000 hommes désarmés, à qui l'on avait promis la protection de l'ONU, ont été froidement assassinés en quelques jours, en juillet 1995.

Quelques jours avant ce massacre, Ratko Mladic donnait des bonbons aux enfants et tentait de rassurer leurs parents, tandis que les autobus qui allaient mener des milliers de Bosniaques à la mort attendaient déjà aux portes de Srebrenica, raconte Richard Dicker, de Human Rights Watch.

«Il était l'incarnation du cynisme et de la brutalité, c'était le Terminator!»

L'arrestation de Ratko Mladic, qui a longtemps bénéficié de complicités en Serbie (il y a deux ans, une vidéo l'a montré en excursion de chasse avec des amis), permettra de tourner une page très sombre de l'histoire européenne. D'abord, pour les proches des victimes, en Bosnie. Mais aussi pour la Serbie, qui n'a toujours pas fait la paix avec son passé. Encore aujourd'hui, de grands pans de l'opinion publique serbe nient le massacre de Srebrenica. Le procès de Mladic mettra les preuves sur la table. Enfin, c'est le début d'un processus de normalisation qui ouvrira à la Serbie les portes de l'Union européenne.

L'autre criminel de guerre en fuite, Bernard Munyagishari, ex-leader des milices hutues qui ont massacré plus de 800 000 Rwandais, en majorité des Tutsis, au printemps 1994, s'est fait prendre en République démocratique du Congo. Il sera traduit devant le Tribunal pénal international pour le Rwanda, qui l'accuse d'avoir contribué à planifier et à préparer le génocide.

Cette double arrestation envoie un signal aux autres bouchers de la planète, tels le Libyen Mouammar Kadhafi et le Soudanais Omar al-Bachir, qui sont toujours en état de nuire. «C'est un message clair: la justice n'oublie jamais», dit Richard Dicker.

Les procès de criminels de guerre ont tendance à s'éterniser. Slobodan Milosevic, responsable politique des guerres des Balkans, est mort avant d'avoir fini d'être jugé. N'empêche: 16 ans après la fin du conflit des Balkans, les principaux responsables de ce tragique épisode de l'histoire européenne ont été traduits devant la justice. Une douzaine ont été condamnés. Leurs procès ont permis de documenter les responsabilités et la mécanique d'une série de conflits qui auront fait, au total, plus de 100 000 morts.

Voilà une chose qui n'arrivera pas avec Oussama ben Laden, qui n'aura jamais à s'expliquer devant la justice. Pardonnez-moi d'enfoncer ce clou, une fois de plus...