Dans le cas d'Omar Khadr, le gouvernement Harper a posé des gestes qu'aucun autre pays industrialisé n'a posés. Le Canada se retrouve à être le seul gouvernement à continuer, contre vents et marées, à soutenir les politiques les plus contestables de l'administration de George W. Bush, que les États-Unis eux-mêmes ont désavouées.

Dans le cas d'Omar Khadr, le gouvernement Harper a posé des gestes qu'aucun autre pays industrialisé n'a posés. Le Canada se retrouve à être le seul gouvernement à continuer, contre vents et marées, à soutenir les politiques les plus contestables de l'administration de George W. Bush, que les États-Unis eux-mêmes ont désavouées.

L'attitude du gouvernement canadien a été scandaleuse. Je sais que ce n'est pas cela qui fera perdre beaucoup de plumes aux conservateurs, parce que bien des citoyens ne sont pas mécontents que l'on réserve la manière forte aux terroristes.

Mais nous vivons dans une société civilisée qui doit défendre certaines valeurs et qui doit respecter les principes du droit. Ce n'est pas être complice du terrorisme, ni faire preuve de complaisance envers l'islam radical, ni une façon de faire d'Omar Khadr un héros.

Qu'est-ce qui n'est pas acceptable dans le traitement qui lui a été réservé? Cinq choses.

Premièrement, le cadre légal de son arrestation, en 2002, en Afghanistan, après un combat avec les forces américaines dont il était le seul survivant. On ne sait pas s'il a lancé la grenade qui a tué un soldat américain, ce dont on l'accuse. Il est cependant clair qu'il était du côté des forces d'Al-Qaïda. Mais cet incident sanglant est survenu dans un cadre de guerre. On ne peut pas vraiment décrire ces belligérants comme des meurtriers, ni comme des terroristes au même titre que les lâches assassins qui massacrent des civils. Si on a pu l'accuser de meurtre, c'est parce qu'il n'a pas le statut de prisonnier de guerre auquel ont droit les militaires, et parce que les États-Unis ont utilisé le concept flou de «combattants ennemis», abandonné par l'administration Obama.

Deuxièmement, Khadr avait 15 ans au moment des incidents; 13 ou 14 ans quand il a été dans un camp d'entraînement d'Al-Qaïda, où l'avait amené son père, mort depuis, un fanatique proche de ben Laden. Ça ressemble à du lavage de cerveau. Omar Khadr mérite certainement d'être traité comme un enfant-soldat, qu'une convention internationale, dont le Canada a été l'un des premiers signataires, qualifie de victime.

Troisièmement, il a été soumis à un système de justice parallèle. L'internement à Guantanamo a permis de contourner les règles de droit qui se seraient appliquées sur le territoire américain: d'où de mauvais traitements, des aveux sous la contrainte, huit ans sans procès. Ce régime a amené tous les pays occidentaux à rapatrier leurs ressortissants détenus à Guantanamo.

Quatrièmement, il a été jugé devant une «commission» qui ressemble à un tribunal militaire: un juge militaire, un procureur militaire, un jury de militaires, des règles qui n'offrent pas les garanties d'impartialité d'un vrai procès. Cela a amené Khadr à plaider coupable à toutes les accusations portées contre lui, pour éviter la prison à vie. Est-ce concluant? Non. Quand le procureur, le capitaine John Murphy, s'est exclamé: «Omar Khadr n'est pas une victime, il n'est pas un enfant-soldat. Omar Khadr est un meurtrier et un terroriste d'Al-Qaïda», on avait l'impression d'être dans un mauvais film de cowboys.

Cinquièmement, le gouvernement Harper a été complice de tout cela. Il a soutenu les Américains dans les mauvais traitements d'Omar Khadr. Il ne l'a pas rapatrié, il n'a pas protégé ses droits, comme l'ont dit la Cour fédérale et la Cour suprême. Et il s'est réfugié derrière une défense pathétique: la gravité du crime et le souci de laisser la  «justice» américaine suivre son cours. Une ligne que maintient toujours, sans gêne, le ministre des Affaires étrangères, Lawrence Cannon, même si on sait que les Américains font tout pour renvoyer Khadr au Canada.

Il y a de quoi avoir honte.