Après des mois de fuites, de rumeurs, de faux départs, François Legault et ses partenaires feront aujourd'hui le lancement officiel de la Coalition pour l'avenir du Québec. Legault sera-t-il capable de recréer l'enthousiasme que son projet avait suscité, quand un sondage lui donnait presque autant de voix que libéraux et péquistes réunis avant même qu'on connaisse son programme?

Après des mois de fuites, de rumeurs, de faux départs, François Legault et ses partenaires feront aujourd'hui le lancement officiel de la Coalition pour l'avenir du Québec. Legault sera-t-il capable de recréer l'enthousiasme que son projet avait suscité, quand un sondage lui donnait presque autant de voix que libéraux et péquistes réunis avant même qu'on connaisse son programme?

Évidemment pas. Ce succès instantané décrivait moins un appui à François Legault lui-même qu'un désir presque désespéré de nouveauté de l'électorat. Mais l'ancien ministre péquiste pourra de nouveau puiser dans ce capital de sympathie, parce que sa démarche répond, à bien des égards, à cette «autre chose» que cherchent les Québécois.

À commencer par sa volonté de s'extraire du débat constitutionnel. Ce souverainiste, qui estime que l'indépendance n'est pas réalisable et qui accuse ses anciens alliés de faire du déni, veut passer à autre chose et est prêt à travailler avec des fédéralistes pour s'attaquer aux problèmes du Québec. Ce refus de se définir en fonction des choix constitutionnels, qui agace tellement les junkies de la politique, est justement ce qui va séduire un grand nombre de Québécois. C'était aussi ce qui avait contribué au succès de Mario Dumont.

L'autre élément séduisant, c'est la place de cette coalition sur l'échiquier politique. C'est essentiellement un groupe de centre droit, conservateur sur le plan fiscal, soucieux d'accroître l'efficacité de l'État, et préoccupé par l'économie. On ne retrouve pas, dans le document de la coalition, de populisme antiétatique, d'idéologie néolibérale ou de thèses de la droite sociale populaires à l'ADQ ou dans le PCC de Stephen Harper. C'est plutôt une forme de conservatisme modéré dans lequel un très grand nombre de Québécois se reconnaîtront.

Le troisième point fort de la coalition, c'est le vent de fraîcheur qu'elle apporte. Le document qu'elle rendra public n'est pas vraiment un grand manifeste, mais plutôt une ébauche de programme, que ses auteurs décrivent comme un work in progress. Un plan d'action, simple, concret, qui cible un nombre restreint d'enjeux - éducation, culture, gestion publique, économie -, qui n'est pas révolutionnaire mais qui lance pas mal d'idées.

Il faut entre autres noter que François Legault fait de l'éducation une priorité absolue. Il est le seul politicien québécois à oser le faire. C'est un pari courageux, parce que ce thème n'est pas nécessairement populaire. Mais ce choix de l'éducation est certainement ce dont le Québec a besoin.

François Legault et sa coalition rencontreront toutefois bien des écueils sur leur route. Le premier, évident, c'est qu'il est très difficile de lancer un nouveau parti. Le second tient au fait que François Legault n'a jamais démontré qu'il avait de grands talents de stratège. Il semble être davantage naïf et impulsif que calculateur. On l'a vu au démarrage hésitant de son mouvement à l'automne, quand une absence de sens du timing l'a empêché de profiter de l'appui spontané que son initiative suscitait.

Le troisième écueil, c'est que la coalition, parce qu'elle est centriste, n'a pas de niche bien à elle, comme l'ADQ qui était seule à droite. M. Legault devra jouer du coude pour gagner des appuis, soit chez les adéquistes modérés, soit chez les péquistes déçus, soit chez les libéraux. En fait, sur le plan idéologique, c'est paradoxalement du Parti libéral que la coalition est la plus proche ou, plus précisément, du PLQ d'il y a huit ans, avant qu'il ne souffre de l'usure du pouvoir et qu'il ne perde sa cohérence interne.

Mais en attendant, dans l'immédiat, l'arrivée de ce nouveau joueur permettra à tout le moins de brasser la cage et de susciter des débats. Et ça, nous en avons bien besoin.