Cette semaine, il était difficile de résister à la tentation de comparer la politique et le hockey. Pendant que bien des partisans du Canadien réclamaient la tête de Jacques Martin parce que le club était incapable de gagner une partie, des militants du Parti québécois voulaient celle de Pauline Marois parce qu'elle ne «score» pas dans les sondages.

On a rapidement vu les limites de ces comparaisons. Il a suffi d'une victoire de 5-1 contre les Flyers pour que la grogne contre l'entraîneur-chef du Tricolore s'estompe. Dans le cas du Parti québécois, les choses sont pas mal plus compliquées, à commencer par le fait que Mme Marois n'est pas le « coach » du Parti québécois - un employé salarié que l'on peut facilement sacrifier - mais son véritable patron.

Il est surtout illusoire de croire que le PQ s'en sortira en changeant de chef. Ça a déjà été essayé. Les difficultés du parti ne tiennent pas seulement aux lacunes de Mme Marois. Si le PQ était une entreprise, on pourrait dire qu'il a quatre problèmes : son PDG, sa marque, son produit, et son marché.

Commençons par la chef. Ça a été un choc pour bien des militants de découvrir, lundi, avec le sondage CROP-La Presse, que le PQ a encore perdu des plumes, en passant de 25 % à 22 % des intentions de vote, même si Jean Charest venait probablement de connaître la pire semaine de sa carrière. Et Mme Marois n'est vue comme le meilleur premier ministre que par 10 % des répondants.

Mme Marois ne passe donc pas. Mais pourquoi ? Les allusions à son image, à son snobisme, à son style sont agaçantes. Il faut qu'il y ait quelque chose de plus profond. Mme Marois, qui a été une bonne ministre, et un bon chef de parti, n'est pas un bon chef de l'opposition : des erreurs de jugement, des orientations contestables, une façon si enragée de dénoncer le gouvernement qu'on n'arrive plus à dégager une cohérence dans les politiques péquistes et à imaginer ce que cela donnerait une fois au pouvoir. C'est peut-être pour cela que les gens n'arrivent pas à la voir comme premier ministre.

De toutes façons, si on changeait le chef, on ne changerait pas le parti. Et ce parti souffre d'un sérieux problème de marque. Le PQ est vieilli et usé. Il s'est marginalisé avec ses chicanes internes, ses cycles d'enthousiasme et de désespoir, la quête à répétition d'un sauveur qu'on s'empresse ensuite de renverser. Recommencer avec un autre ? Ce sera la risée. Les péquistes qui magouillent contre Mme Marois la plébiscitaient à 93,08 % le 16 avril dernier.

Et derrière les psychodrames péquistes, il y a le produit. Contrairement aux autres partis, le PQ ne veut pas vendre une équipe, il vend un projet. Or ce projet, les consommateurs, très majoritairement, n'en veulent pas. Le PQ se retrouve dans la situation inconfortable où il essaie de convaincre des végétariens d'acheter du steak. Cela contribue à créer dans le parti un sentiment d'échec permanent et un mécontentement récurrent contre le chef qui ne livre pas la marchandise.

Enfin, le PQ a un gros problème de marché. Dans un contexte normal, le PQ aurait été moins affecté par ses déboires, parce que le marché politique québécois était un duopole, que se partageaient deux partis avec chacun leur option. Le PQ, comme les libéraux, pouvait compter sur une clientèle captive. Mais ses clients ont maintenant d'autres options, un vote symbolique avec Québec solidaire, ou une alternative honorable avec le futur parti de François Legault.

Ce sont là de bien gros problèmes. Tellement gros qu'il devient plus simple de changer de chef... jusqu'à la prochaine crise.