En 2008, la victoire de Barack Obama a été accueillie avec enthousiasme au Canada, parce que le nouveau président incarnait le changement et l'espoir, mais aussi parce qu'on se réjouissait de voir la Maison-Blanche occupée par un homme politique dont les valeurs se rapprochaient des nôtres.

Et pourtant, depuis que Barack Obama occupe la Maison-Blanche, les relations entre le Canada et les États-Unis sont pires que du temps de George W. Bush. Les trois dernières années ont été ponctuées plus que jamais de chicanes, d'incidents vexatoires, de sursauts protectionnistes.

Le dernier incident à affecter les relations entre les deux pays, c'est la décision du département d'État de reporter le projet Keystone XL, cet oléoduc de 2700 km devant acheminer le pétrole des sables bitumineux jusqu'au Texas, une décision étonnante de la part d'un président qui veut réduire la dépendance de son pays à l'énergie d'outre-mer. Le choc a été assez fort pour pousser le premier ministre Harper à penser au libre-échange avec l'Asie.

Mais ce désaccord s'ajoute à une longue liste. À commencer par les clauses «Buy America» incluses dans les programmes du gouvernement américain pour soutenir la reprise, qui font très mal aux entreprises exportatrices canadiennes.

Ou encore la multiplication des mesures protectionnistes qui visent à entraver notre accès au marché américain. Comme l'instauration d'une règle forçant à préciser l'origine des viandes vendues aux USA - une bonne chose en soi - mais conçue d'une façon qui rend le processus d'identification si coûteux que les ventes de boeuf et de porc canadien ont chuté sensiblement. Cette manoeuvre, cautionnée par le secrétaire à l'Agriculture de l'administration Obama, a été récemment condamnée par l'OMC.

Cela s'ajoute à la kyrielle de mesures vexatoires à nos frontières dont la dernière en liste est le fait que les Canadiens cesseront d'être exemptés de la taxe d'entrée de 5,50$. Celle-ci leur sera imposée dès le début de 2012 s'ils se rendent aux États-Unis en avion.

Ces relations tendues, on les a aussi vues dans la croisade insensée du fisc américain qui exige des résidants américains au Canada - plus de 700 000 personnes - qu'ils produisent une déclaration de revenus aux États-Unis même s'ils paient leurs impôts au Canada, avec des amendes salées pour ceux qui ne se conforment pas.

Il y a bien sûr des circonstances atténuantes, comme le traumatisme du 11 septembre 2001. Mais les manifestations de méfiance les plus grossières auraient dû s'atténuer avec le passage du temps et le départ du président Bush. Mais la paranoïa est restée la même. C'est l'administration Obama qui, entre autres, a véhiculé l'idée - sans fondement - que le Canada était la porte d'entrée des terroristes.

On peut aussi comprendre que la dure récession et la bataille pour créer des emplois aient exacerbé les réflexes protectionnistes américains.

Mais il y a autre chose. En temps normal, les tendances protectionnistes du Sénat et de la Chambre des représentants sont tempérées par la Maison-Blanche, qui joue un rôle de contrepoids. C'est ce mécanisme qui ne joue plus, parce que le président reste imprégné par la culture protectionniste de la gauche démocrate.

Cela m'avait frappé lors des primaires de 2008, quand M. Obama, encore candidat à l'investiture de son parti, avait promis que, s'il était élu président, «je téléphonerais immédiatement au président du Mexique et au président (sic) du Canada pour essayer de modifier l'ALENA». Une phrase malheureuse qui traduisait son ignorance du Canada et ses réflexes protectionnistes.

Eh bien, il n'a pas tellement changé. Ce que l'on sent, dans plusieurs de ces incidents, c'est le réflexe de repli sur soi économique, mais aussi une incompréhension des liens d'intégration particuliers entre le Canada et les États-Unis.