Voilà, c'est fait. Quelques semaines après sa naissance officielle, la Coalition avenir Québec a absorbé l'ADQ. C'était écrit dans le ciel.

Il s'agit certainement d'un mariage de raison. Les adéquistes rejoignent la CAQ parce qu'ils n'ont pas le choix. Depuis l'arrivée de François Legault, leur espace politique s'était réduit comme peau de chagrin.

Il est pas mal vrai, comme le dit le premier ministre Jean Charest dans une formule qui fait image, que les adéquistes «adhèrent à un sondage». Mais par leur adhésion, ils bonifient ce même sondage. Les appuis à la CAQ, de 33% selon notre dernier sondage CROP,  passent à 42% avec la fusion, ce qui pourrait annoncer une victoire convaincante.

Mais ce mariage de raison est-il un mariage contre nature? Tant Jean Charest que la chef péquiste Pauline Marois soulignent les différences idéologiques et les désaccords possibles entre les nouveaux mariés. Ce n'est pas faux.

Toutefois, ces différences ne sont pas plus importantes que celles que l'on retrouve au sein des deux vieux partis, qui sont des coalitions hétérogènes construites autour d'une option constitutionnelle. La CAQ, avec l'absorption de l'ADQ, est de son côté une coalition «niniste», ni fédéraliste ni souverainiste.

Ce qui a caractérisé l'ADQ depuis le début, et ce qui a permis le grand succès de la troisième voie de Mario Dumont, c'était ses efforts pour s'extraire du débat national traditionnel avec son opposition entre fédéralistes et souverainistes. C'est ce même désir qui est à l'origine de la naissance de la CAQ - convier des fédéralistes et des souverainistes à travailler ensemble.

Le rapprochement est donc naturel. François Legault, dans les discussions entourant les fusions, a accepté d'adopter le terme autonomiste, utilisé par l'ADQ, pour décrire ce point de vue. Ça sonne quand même mieux que «niniste», et ça décrit parfaitement l'esprit d'une majorité de Québécois. Tout dépendra ensuite de la façon dont on l'exprimera dans l'action.

Au plan économique, même si on peut placer les deux partis à droite de l'échiquier politique, les différences de doctrine sont assez importantes, du moins sur papier. François Legault se décrit comme un partisan de la gauche efficace, qui ne s'oppose pas à l' État, mais qui veut plus de productivité dans ses missions.

Traditionnellement, l'ADQ se méfie du gouvernement. Mais dans les faits, ce parti populiste a été si peu cohérent sur ces questions que la fusion ne pose pas problème. Sauf pour les protestations véhémentes du vrai courant néolibéral au sein de l'ADQ, représenté par les hommes d'affaires Claude Garcia et Adrien Pouliot, trop marginal pour faire une différence.

L'ADQ, à ce chapitre, a obtenu une concession significative, en amenant François Legault à accepter l'idée d'un projet pilote pour tester le rôle du privé en santé. C'est une bonne chose. On ne comprenait d'ailleurs pas pourquoi M. Legault se refusait à une telle démarche. Même si le renforcement du réseau public est sa priorité, l'apport du privé, bien balisé, peut encourager la concurrence et l'innovation dont le réseau public a besoin pour s'améliorer.

S'il peut y avoir des dissensions ou des gaffes, c'est plutôt du côté des politiques sociales. L'ADQ incarne parfois une droite plus rurale, aux accents harperistes, par exemple sur les accommodements raisonnables. Il n'y a rien de tel dans le projet de la CAQ. C'est sans doute là qu'il y a un potentiel pour des désaccords et des faux pas.

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À la fin de ma chronique de lundi, j'ai décrit le Dr Gaétan Barrette comme le président de la FMOQ, plutôt que de la FMSQ. M. Barrette préside évidemment la Fédération des médecins spécialistes, pas celle des omnipraticiens. Ce lapsus n'a pas échappé à de nombreux généralistes! Toutes mes excuses.