Commençons par la seule chose qui compte vraiment: le petit Arthur Marois devrait jouer au hockey cet hiver. Et pas seulement dans la ruelle derrière son domicile du secteur Centre-Sud.

La suspension imposée à l'endroit du gamin de 11 ans et de la trentaine d'autres jeunes de son quartier pour avoir refusé l'invitation de se joindre au hockey élite sera levée. C'est du moins ce qu'Yves Pauzé, président de l'Association qui chapeaute toutes les associations de l'île, a indiqué à La Presse lors d'une conversation téléphonique hier après-midi.

De fait, M. Pauzé clame avec vigueur que les jeunes délinquants qui ont refusé de venir démontrer si leurs niveaux d'habiletés devaient, oui ou non, leur ouvrir les portes du hockey d'élite n'ont jamais été suspendus. Qu'ils peuvent jouer!

Ce n'est pas tout à fait faux. Mais attention! On est aussi très loin de la vérité.

Car s'ils refusent d'évoluer dans le hockey d'élite, les hockeyeurs seront surclassés comme le prévoit le livre de règlements. Ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'Arthur Marois, 11 ans, devrait rejoindre une équipe de niveau bantam (13 et 14 ans) alors qu'il amorce son séjour dans les rangs pee-wee (11 et 12).

«Mon gars est l'un des plus petits de son groupe. Il serait non seulement ridicule, mais dangereux de le forcer à monter de catégorie. Le forcer à jouer dans le bantam ne représenterait rien de moins qu'une sanction déguisée. Une autre forme de suspension», a lancé Jean Marois, le père du petit Arthur.

Et il a bien raison!

Les modalités entourant les réintégrations des hockeyeurs lésés du secteur Centre-Sud au sein de l'Association de hockey mineur de leur quartier seront discutées demain au cours de la réunion du conseil d'administration de Hockey Montréal.

Il faudra donc attendre les décisions prises lors de cette réunion avant de claironner que le gros bon sens a triomphé dans cette histoire qui a soulevé les passions hier. Des passions vives et opposées. Pour chaque bravo dénonçant l'attitude des bonzes du hockey mineur, des insultes et des accusations de collusion de la part des parents et responsables du secteur Centre-Sud faisaient contrepoids.

Recherche d'équilibre

Yves Pauzé était en colère lorsque La Presse l'a joint hier après-midi. Non, il était en furie. J'espère d'ailleurs qu'il est plus sélectif dans ses choix de mots quand il passe un savon à l'un ou l'autre des 7000 jeunes hockeyeurs qui sont sous sa responsabilité sur l'île de Montréal...

Mais bon! Entre deux critiques, trois insultes et un blasphème, il a toutefois avancé un point de vue qui mérite réflexion. Celui de l'équilibre entre les différentes équipes d'un même niveau.

«Vous montrez une belle photo d'un petit gars dans une ruelle, mais vous ne montrez pas les visages des jeunes qui se font planter par des équipes trop fortes parce que des jeunes, ou leurs parents, ont décidé de monter des «Dream Team» en gardant des joueurs de haut niveau dans une catégorie inférieure? On perd des jeunes tous les ans. On fait tout pour les garder et en attirer d'autres. Mais un gars qui perd tout l'hiver se décourage et perd le goût de jouer. C'est important ça aussi. Vous avez mis votre nez là-dedans ce matin. Vous avez mis le feu. On va l'éteindre, moi et les membres du conseil d'administration. Et ça monsieur, ce n'est pas un «power trip», c'est le côté de la médaille dont les parents et les responsables de Centre-Sud n'ont pas parlé quand ils ont dénoncé ce qu'ils vivaient», a lancé le président Pauzé.

L'enfant avant tout

La quête d'équilibre est louable. Elle est même souhaitable. Mais elle ne devrait pas outrepasser la décision d'un jeune de tourner le dos au hockey élite.

Surtout que les surdoués, ceux qui peuvent multiplier les buts et miner le moral de l'adversaire, sont généralement, pour ne pas dire naturellement, attirés par le défi de se mesurer aux meilleurs.

Dans le cas d'un déséquilibre évident et navrant il faut l'admettre - on ne combat pas un problème avec un autre - les Associations de hockey pourraient simplement demander à Hockey Québec d'intervenir.

Ça éviterait au petit Arthur et à la trentaine de jeunes pris dans le même piège administratif que lui de patiner dans le sable où on les confine en ce moment.

La meilleure solution et la plus simple serait d'intégrer le hockey dans les écoles. Il faudrait bien sûr une volonté politique et un brin ou deux de créativité administrative.

Mais depuis le temps qu'on se demande comment combattre le décrochage scolaire, particulièrement celui des garçons, on pourrait faire d'une pierre deux coups: les garder à l'école et leur donner la chance de jouer au hockey. Ce serait mieux que se contenter de patiner bien assis sur le divan en profitant de la dernière version de NHL Hockey sur PlayStation...

Photo: André Pichette, La Presse

Le jeune Arthur Marois pourra jouer cet hiver. Mais dans quelle catégorie?