À défaut de pouvoir promettre des victoires, garantir une place en séries éliminatoires et assurer un printemps fleuri au Centre Bell, le directeur général Pierre Gauthier devait faire quelque chose pour relancer son équipe.

Il a congédié un coach. Pas son entraîneur-chef Jacques Martin comme de nombreux partisans et plusieurs observateurs l'anticipaient... voire l'espéraient. Non! Il s'est plutôt tourné vers Perry Pearn.

Responsable des unités spéciales loin de l'être du Tricolore depuis le début de la saison, Pearn était une cible facile. Aux yeux de plusieurs, il représente d'ailleurs une perte collatérale pour apaiser la grogne et acheter du temps dont Gauthier lui-même et son entraîneur-chef Jacques Martin pourront bénéficier.

Du moins pour un temps.

«M. Pearn est un très bon entraîneur. Mais il n'y avait plus de place pour lui dans le nouvel organigramme que j'ai établi», a simplement expliqué Pierre Gauthier qui a annoncé à Perry Pearn son congédiement avant de le confirmer aux joueurs 90 minutes seulement avant le match.

Un vrai coach des défenseurs

Perry Pearn parti, Randy Ladouceur qui était juché sur la galerie de presse depuis le début de la saison, débarque derrière le banc. Il devient le premier défenseur de carrière à prendre les rênes de la brigade défensive depuis le départ de Rick Green, congédié en même temps que Claude Julien en janvier 2005.

L'absence d'un «vrai» défenseur au sein du groupe d'entraîneurs du Tricolore a été plusieurs fois décriée au fil des dernières années. Comptant 931 matchs d'expérience dans la LNH, mais surtout adjoint de carrière depuis 1996 à Hartford, en Caroline et à Toronto avant de travailler avec le club-école du Canadien à Hamilton l'an dernier, Ladouceur fait d'une pierre deux coups en comblant le vide laissé par le congédiement de Pearn. Non seulement apporte-t-il l'expérience d'un «vrai» défenseur, mais il amène aussi une énergie nouvelle derrière le banc. Dès les premières minutes du match opposant le Canadien aux Flyers hier, on l'a vu distribuer des encouragements et des directives avec un enthousiasme et une énergie qui étaient bien plus associés à Kirk Muller qu'à Perry Pearn.

Le spectre de Kirk Muller

Les styles et des philosophies diamétralement opposés de Pearn et de Muller ont d'ailleurs été au centre de tensions au sein du groupe d'entraîneurs l'an dernier. Muller, qui ne se gênait pas pour critiquer vivement les joueurs du Tricolore lorsqu'ils se trainaient les pieds durant les matchs, ne comprenait pas pourquoi Pearn n'intervenait pas, ou trop peu à son goût, avec les défenseurs, dont le tout jeune P.K. Subban, durant les matchs.

Ces tensions ont d'ailleurs contribué au départ de Kirk Muller qui s'est joint à l'organisation des Predators de Nashville dont il est aujourd'hui l'entraîneur-chef du club-école.

À Milwaukee où il prépare ses Admirals en vue des trois matchs en trois jours qui les attendent samedi, dimanche et lundi contre Chicago, Grand Rapids et Texas, Kirk Muller n'a certainement pas célébré le congédiement de Pearn lorsqu'il l'a appris. Il s'est peut-être demandé une seconde, ou deux, s'il serait encore avec le Canadien si Jacques Martin s'était rangé de son côté plutôt que de rester fidèle à son vieux complice du temps des Sénateurs d'Ottawa l'an dernier. On ne le saura jamais.

Lorsque le nom de Kirk Muller a été prononcé au hasard de quelques questions posées à Pierre Gauthier, lors de son point de presse, il était plus qu'évident que ces questions l'agaçaient au plus haut point.

Émotions sur la glace et derrière le banc

Pierre Gauthier l'a répété plusieurs fois: il refuse de regarder derrière pour se concentrer sur ce qui s'en vient droit devant.

«Je dois être meilleur, Jacques Martin doit être meilleur, tous les membres de l'organisation doivent être meilleurs. Nous devons prendre les moyens pour freiner la séquence actuelle et éviter d'en revivre une autre cette année», a indiqué le patron du Canadien.

Est-ce à dire que le congédiement de Jacques Martin est maintenant exclu jusqu'à la fin de l'année?

«Ce n'est pas un geste d'encouragement que j'ai effectué aujourd'hui. J'ai pris une décision pour changer la philosophie de l'équipe. Pour donner un nouvel élan», a assuré Gauthier.

Jacques Martin devra-t-il être plus enjoué derrière le banc afin que l'équipe le soit davantage sur la patinoire?

«Le hockey est un jeu d'émotions. Regardez autour de la LNH. Il n'y a pas nécessairement de liens entre l'émotion des coachs et celles des joueurs. Même que dans la majorité des cas, les entraîneurs doivent justement canaliser leur émotion pour garder le contrôle sur l'équipe.»

Si l'émotion était loin de faire défaut sur la patinoire hier, elle était vive également dans les gradins. Et pour une rare fois cette saison, elle était positive. Comme quoi, au-delà de tout congédiement, il n'y a rien comme une victoire pour acheter du temps. Pourvu que la prochaine ne se fasse pas attendre trop longtemps.

Photo: Bernard Brault, La Presse

Le départ de Perry Pearn a permis à Randy Ladouceur de prendre place derrière le banc pour s'occuper des défenseurs, dont le jeune P.K. Subban.