Quand on gribouille des chiffres entre deux annonces sur un napperon en papier, qu'on jongle avec le contrat de Scott Gomez, qu'on laisse partir Hal Gill, Travis Moen et peut-être le frère André, on se rend compte d'une chose: oui, le Canadien aura assez d'argent pour s'offrir Carey Price, P.K. Subban et Josh Gorges l'an prochain.

Malgré l'acquisition de Tomas Kaberle et de son gros contrat? Oui!

Mais pas à n'importe quel prix.

Carey Price engloutira le plus d'argent. C'est acquis. Combien? Beaucoup! Comme dans énormément.

Lorsqu'il échangera avec Pierre Gauthier, l'agent de Price (Gerry Johannsson) aura un argument de poids. Son gardien étant, et de loin, le meilleur joueur du Canadien, la pierre d'assise de l'équipe, il devra être le mieux payé.

Un motif de plus pour convaincre Geoff Molson de se débarrasser, coûte que coûte, du contrat de Gomez qui touche 7,5 millions cette année. Car il pourrait en coûter presque autant pour garder Price à Montréal.

Pekka Rinne a obtenu 49 millions pour sept ans à Nashville. Price peut viser le même genre de contrat. Il peut viser plus haut que les 6 ans et 37,8 millions consentis à Cam Ward en Caroline. Il peut aussi lorgner les 51 millions que les Flyers paieront à Ilya Bryzgalov pour les 9 prochaines années. Car Price est meilleur que Bryzgalov. Ou plus prévisible...

Cela dit, les fluctuations en matière de performances chez les gardiens sont si grandes d'une saison à l'autre qu'il me semblerait hasardeux d'imiter les Canucks de Vancouver en offrant à Price le genre de contrat accordé à Roberto Luongo. Le gardien de Saint-Léonard se sera enrichi de 64 millions à la fin de son contrat... en 2022.

Aux fins de l'exercice, disons que Price coûtera 44 millions. Son contrat s'échelonnera sur 6 ans si Price obtient gain de cause, et sur 7 ans si Pierre Gauthier négocie serré.

Subban: le ciel peut attendre

Avec Carey Price, P.K. Subban est le joueur le plus aimé à Montréal. Tout ce qu'il fait de beau et de bon est vénéré. Tout ce qu'il fait de moins beau et de moins bon est vite pardonné.

Malgré son talent fou et son charisme plus fou encore, P.K. ne joue pas à la hauteur du rang de supervedette qu'il occupe.

Ses 12 points sont loin de faire contrepoids au fait qu'il est 2e chez les défenseurs de la LNH avec 17 pénalités mineures. En dépit de sa 10e place avec une moyenne de 2,7 tirs par match, il est bon dernier avec une efficacité de 1,2% (un but sur 83 tirs). P.K. est parmi les «meilleurs» défenseurs du circuit (5e sur 264) avec 38 tirs qui ont raté la cible et 31 remises de la rondelle à ses adversaires. Un de ses revirements a d'ailleurs coûté le premier but des Islanders mardi.

Il ne casse rien pour les mises en échec (65e avec 38 coups d'épaule), les tirs bloqués (62e avec 46) et les vols de rondelle (61e avec 10).

Ces statistiques n'ont pas pour but de faire mal paraître Subban. Elles illustrent simplement le fait que P.K. est encore en développement. Et que, de ce fait, il ne peut prétendre à des contrats dont ont profité les Drew Doughty (56 millions sur 8 ans à Los Angeles) ou Tyler Myers (38,5 millions sur 7 ans à Buffalo). Du moins pas encore...

Comme l'a fait Price une fois son contrat de recrue écoulé, Subban devra accepter une collation avant de passer au buffet. Price avait obtenu 5,5 millions sur deux ans. De la façon dont Subban joue depuis le début de l'année, il serait très mal venu de lever le nez sur une telle collation!

Gorges: jusqu'où aller?

Le dossier Josh Gorges sera le plus difficile à régler, mais le plus intéressant à suivre. Deux réalités s'opposeront: combien Gorges peut-il obtenir? Combien le Canadien est-il prêt à lui offrir?

Gorges s'est élevé au rang d'indispensable pour Carey Price et Jacques Martin. C'est un guerrier. Un gars de caractère aussi. Un leader. Un candidat à la succession de Brian Gionta à titre de capitaine.

Tout ça est vrai.

Mais Gorges demeure un fantassin et non un tireur d'élite. Il joue de la guitare western, pas du violon. Il peinture au rouleau au lieu de peindre à l'aquarelle...

Le Canadien acceptera-t-il alors de dépasser le cap des 3 millions par année? Se rendra-t-il à 3,5 millions. Se laissera-t-il tordre le bras jusqu'à 3,75 millionsavant de mettre son poing sur la table et de refuser une moyenne de 4 millions par saison?

Le Canadien aurait pu éviter tous les ennuis qui l'attendent dans le détour si Pierre Gauthier avait agi l'été dernier. Car il me semble qu'un contrat oscillant entre 15 et 16 millions pour 5 ans aurait été justifié dans le cas de Gorges. Stéphane Robidas touche 3,3 millions à Dallas. Francois Beauchemin, 3,65 millions à Anaheim. Ces Québécois représentent des bases de comparaison équitables.

L'ennui, c'est que l'été prochain, libéré des 8,5 millions que le Canadien a acceptés pour acquérir Tomas Kaberle, les Hurricanes de la Caroline - d'autres clubs seront aussi intéressés - pourront se lancer dans une surenchère.

Si James Wisniewski, qui est bien meilleur offensivement que Gorges, mais ô combien plus mauvais en défensive, a obtenu 33 millions pour 6 ans l'été dernier, la facture pourrait alors être salée une fois les folies du 1er juillet lancées.

Et c'est là que les contrats de Kaberle, Gomez, Markov, Cammalleri et Gionta feront mal. S'ils sont encore tous là. Ce dont on peut douter un brin... ou deux.

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Photo: Bernard Brault, La Presse

Carey Price et P.K. Subban