La famille royale des Américains, les mythiques Kennedy, passe au hachoir dans la minisérie éponyme (et controversée) que Super Écran présente à partir de dimanche à 21 h. Si, comme moi, vous êtes pro-Kennedy, vous respectez l'héritage politique laissé par JFK et que vous imaginez ce clan batifoler sur une plage ensoleillée de Martha's Vineyard en chemise blanche et en pantalon de lin, cette série de huit heures vous déplaira. On est à des kilomètres des magnifiques portraits très preppy du Vanity Fair, mettons.

Car Les Kennedy, série déclinée en quatre tranches de deux heures, s'attarde surtout aux frasques de la dynastie et insiste lourdement sur l'omniprésence du patriarche, Joe Kennedy, dépeint comme un être manipulateur, corrompu, infidèle, machiavélique et obsédé par la présidence des États-Unis.

En fait, l'oeuvre aurait pu être baptisée Joe Kennedy... et les autres

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Aux États-Unis, The Kennedys devait initialement jouer sur History Channel, qui l'a larguée, prétextant que la version définitive ne respectait pas les standards de la chaîne. C'est finalement une station obscure - ReelzChannel - qui l'a récupérée, après que plusieurs autres gros acteurs eurent passé leur tour. Les journaux américains ont aussi rapporté que Maria Shriver (la fille d'Eunice Kennedy Shriver) et Caroline Kennedy, le seul enfant encore vivant de John F. Kennedy et de Jackie, auraient fait pression pour empêcher la diffusion de l'oeuvre tournée à Toronto, qui écorche plusieurs de leurs proches.

À Hollywood, le créateur du projet The Kennedys, Joel Surnow, qui a aussi bricolé 24, ne cache pas ses affinités pour le Parti républicain. Il admire Ronald Reagan et est ami avec l'animateur de radio conservateur Rush Limbaugh. Qu'un producteur républicain s'attaque à la plus grande famille démocrate a irrité plusieurs membres du clan Kennedy.

Vous comprendrez pourquoi. Dès les premières minutes, la caméra de Jon Cassar, réalisateur de 24, montre John F. Kennedy (Greg Kinnear) se bourrer de pilules, pour ensuite enfiler un corset devant le miroir. Jamais il n'est spécifié que JFK porte cette gaine - médicale - pour soulager ses maux de dos. Le téléspectateur croit plutôt que le futur président est dopé, coquet, vaniteux, et qu'il désire aplanir son ventre.

Ensuite, le côté séducteur des Kennedy, très documenté au fil des ans, ressort rapidement, autant chez le père Joe (excellent Tom Wilkinson), que chez son fils John, que l'on voit pratiquement en train de tromper Jackie (Katie Holmes) le soir de son élection historique du 8 novembre 1960. Katie Holmes n'est pas une grande actrice, soit dit en passant. Physiquement, avec ses perles, ses gants blancs et sa coiffure impeccable, elle ressemble beaucoup à la vraie Jackie. Côté charisme, ça passe difficilement.

Les deux premières heures tapent sur le même clou à répétition: c'est Joe Jr que le père chouchoutait. C'était lui, le vrai Kennedy, l'héritier parfait, John n'étant que le deuxième choix. La mère, Rose Kennedy, est une énorme caricature. Elle passe la série à prier. Quant aux soeurs Kennedy, dont Eunice, Jean, Kathleen et Patricia, elles ont pratiquement été éliminées du récit. La seule qui occupera un peu de temps d'antenne, c'est Rosemary, que Joe a fait lobotomiser à l'âge de 23 ans, parce qu'elle était hors de contrôle et qu'elle entachait la réputation de la famille.

Photo: fournie par Super Écran

Les critiques sur The Kennedys, qui démarre aussi ce dimanche sur ReelzChannel, ont été désastreuses: mauvais soap, pas regardable, émission ennuyeuse, fouillis, peinture à numéros, etc. Honnêtement, ce n'est pas si pire. Les perruques et les costumes rendent bien l'époque et le tout est bien emballé, visuellement parlant.

Le problème, ce sont les choix éditoriaux qui ont été faits. Bien sûr, la malédiction des Kennedy et toutes leurs mésaventures ont fait l'objet de nombreux livres, et ne pas les évoquer aurait été une grossière erreur. En contrepartie, il faut avoir l'honnêteté intellectuelle de saluer dignement les bons coups de JFK, dont le lancement du programme Apollo, ses efforts pour stopper la guerre froide et sa lutte contre la ségrégation raciale, plutôt que de braquer les projecteurs sur sa dépendance aux amphétamines.

Les Kennedy, qui a nécessité un investissement de 30 millions, a été coproduite par une boîte de Montréal, Muse, qui est aussi derrière Trafic humain et Les piliers de la terre.

Du nouveau à TVA?

La boîte Duo Productions, dirigée par les auteurs à succès Anne Boyer et Michel d'Astous (Yamaska, Le gentleman), vient de déposer un nouveau projet de téléroman à TVA intitulé Sacrée liberté du scénariste Jacques Savoie (Les Lavigueur, Les soeurs Elliot). L'histoire? Celle d'un homme qui sort de prison et qui retourne vivre avec les siens, dans une ville nichée au bord du fleuve. «Ça pourrait être un endroit comme Varennes ou Sorel. C'est une histoire de rédemption. Peut-on refaire sa vie après avoir été incarcéré?» demande Michel d'Astous.

L'ex-prisonnier ne sera évidemment pas accueilli à bras ouverts. Ses anciens alliés pourraient-ils devenir des ennemis? Sacrée liberté a été développé comme un «téléroman plus», c'est à dire dans la lignée des Yamaska et Providence. Au départ, Sacrée liberté s'appelait Un homme libre, un titre qui rappelait trop Un homme mort de Fabienne Larouche, ont vite constaté les producteurs.

Photo: fournie par Super Écran

La série sur les Kennedy est bien emballée visuellement parlant et le problème est plutôt du côté des choix éditoriaux.