Oui, c'est un concept tout nouveau articulé autour de Christian Bégin, donc pas tout à fait peaufiné, rodé et installé. Oui, il faut saluer l'audace et l'originalité de ce Bar ouvert, un cabaret éclaté qui ne ressemble à rien de ce qui pullule au petit écran actuellement.

Mais est-ce que c'est bon? La réponse: très moyen. Du moins, pour le premier épisode, que Télé-Québec présente demain à 21h. Cette première heure ne lève pas avant l'arrivée de la sixième invitée, la drag queen Mado Lamotte, qui sort littéralement d'une boîte à surprises. Cette portion, qui reviendra toutes les semaines avec une surprise différente, s'avère d'ailleurs une des belles trouvailles de l'émission: on roule un immense coffre sur la scène du Lion d'or, Christian Bégin ne sait pas qui s'y cache et doit improviser un numéro avec l'invité mystère.

Et Mado Lamotte, une pro du cabaret, transporte l'animateur dans des zones inconnues, tout en chantant une version jazzée de Touch Me de Samantha Fox. Autre numéro surprenant de ce Bar ouvert: les Sublimes rondeurs, deux jeunes femmes bien en chair qui se déshabillent, façon Lili St-Cyr, tandis que la comédienne Kathleen Fortin des Invincibles roucoule Fever accotée sur le piano. Très rigolo de voir la réaction outrée d'une dame dans la salle quand elle aperçoit les seins de ces effeuilleuses nouveau genre.

C'est précisément avec ce type de segments inusités que Bar ouvert se démarquera et titillera la curiosité des téléspectateurs les vendredis soirs. Pas avec Normand D'Amour qui chante Stand by Me, car on a vu ce type de performance mille fois à Belle et bum.

Normand D'Amour, grand ami de Bégin dans la vraie vie, est l'invité principal de cette grande première. En coulisse, les deux potes répètent une prestation à la Ti-Gus et Ti-Mousse, mais n'y arrivent pas tellement ils rient, ils rient et ils rient. Comme téléspectateur, on se sent totalement exclu de cette complicité un peu forcée et répétée, soyons honnête. L'émission s'appelle Bar ouvert, mais c'est plutôt fermé à ce moment précis.

Portant un noeud papillon défait et un borsalino, Christian Bégin chante ensuite The Girl from Ipanema, un classique du répertoire bossa-nova. L'ambiance à l'intérieur du cabaret s'inspire des lounges avec petites tables, nappes rouges et lampes, martinis avec olives et trio de musiciens jazzy.

À son ouverture de bar, Bégin a également convié le magicien un peu trash Vincent C. (que l'on a vu à Un gars le soir) et l'humoriste engagé Christian Vanasse. La première se conclut avec un joli duo entre Christian Bégin et Normand D'Amour, qui reprennent Question de feeling de Richard Cocciante et Fabienne Thibeault.

Le concept de Bar ouvert regorge de potentiel, que ses créateurs apprennent à exploiter. La semaine prochaine, Clara Furey et Céline Bonnier y offriront un numéro «sexuellement chargé», selon Christian Bégin. Gilles Latulippe donnera des cours de cabaret, Jean-Thomas Jobin et Julianne Côté proposeront un sketch inédit de la série Père poule et le comédien Kim Lavack Paquin, un des participants de l'hilarant Cabaret biodégradable, lira des extraits d'une biographie de Jacques Boulanger. Tout ça semble bien intrigant.

Faudra donc être patient avec ce produit, qui subira sans doute plusieurs ajustements en cours de route. En espérant que Bégin nous surprenne et nous déstabilise plus que dans ce premier chapitre, trop tranquille.

Tout sur Tout sur moi

Fans de Tout sur moi, la cinquième et dernière saison démarre ce soir à 21h30, tout de suite après Mauvais karma. Après avoir visionné les trois premiers épisodes, je le confirme: Éric, Macha et Valérie s'enfoncent encore plus dans le pathétisme et le ridicule. À notre plus grand bonheur, bien sûr. Car ce trio-là jongle avec le malaise de façon épatante.

Plus que jamais, on sent que l'auteur Stéphane Bourguignon a énormément puisé dans l'absurde pour tricoter ses intrigues, ce qui s'éloigne de l'esprit des premiers épisodes de cette délicieuse comédie, toujours à cheval entre la réalité et l'invention. À l'époque, on se questionnait systématiquement: est-ce que nos trois amis ont vraiment subi toutes ces humiliations? C'était tiré par les cheveux, mais plausible.

Maintenant, le mystère et l'ambiguïté du départ n'existent plus, ou très peu. Tout sur moi, c'est de la fiction pure et dure. Éric Bernier n'a jamais coupé les cheveux du maestro Kent Nagano. Même si cela aurait pu être très rigolo.

Et Éric n'a jamais organisé d'auditions pour dénicher un copain à la célibataire Macha, comme au petit écran. Un brin névrosée, Macha sabote trois fois (en un seul jour) un début de rancard avec Marc Labrèche. Et ça lui coûte plus de 200$ de psy (Marie-Andrée Corneille).

Valérie, de son côté, magasine d'immenses maisons avec son nigaud de policier (Antoine Vézina), qu'elle a épousé l'an passé, en plus d'hériter d'une fortune, rappelez-vous. Valérie se lance à corps perdu dans la téléréalité, sans aucune considération pour ses deux amis.

Dans la première saison, on pouvait facilement imaginer Valérie Blais, dans sa vraie vie d'actrice, suer et râler dans son costume d'écureuil de Cornemuse. Et on se grattait la tête: a-t-elle déjà été attaquée par une bande de morveux?

Aujourd'hui, on ne peut plus transposer les niaiseries de Valérie dans le réel. Ni celles d'Éric ou de Macha, d'ailleurs. Est-ce que cela fait de Tout sur moi une émission moins captivante? Pas du tout. Juste différente. Et pas mal plus pétée.