Vous croyez que les cas traités par les chirurgiens de Trauma ou Grey's Anatomy sont irréalistes, invraisemblables ou farfelus? Détrompez-vous. Dans le tout premier épisode de l'excellente série documentaire Soins intensifs de Claire Lamarche à Télé-Québec, un jeune patient débarque aux urgences de l'hôpital du Sacré-Coeur avec un poteau de clôture Frost qui lui transperce le bas de l'abdomen. Pour vrai.

C'est le docteur Ronald Denis, chef du département de traumatologie de cet établissement spécialisé du nord de Montréal, qui soignera l'éclopé, Michel Pelchat, victime d'un bête accident de voiture. En dérapant sur l'autoroute 440, le soir de son bal de fin d'études, la voiture de Michel a percuté une clôture. Au 911, sa copine dira, paniquée: «Mon ami a un poteau dans son corps.»

Quasiment en mode téléréalité, la caméra de Soins intensifs nous montre tout: de l'ambulance qui a cueilli le blessé jusqu'à son opération et sa convalescence. On se croirait dans ER, mais tout est authentique ici. La plaie ouverte, la chair exposée, le retrait du morceau métallique de cinq pieds, vous en serez témoin le lundi 9 janvier à 21h. «Il est béni du ciel. Il a échappé à la mort par deux centimètres», expliquera le Dr Ronald Denis, qui a conseillé Fabienne Larouche dans la rédaction de Trauma.

Vraiment, c'est du documentaire de grande qualité que Claire Lamarche et sa fille Stéphanie Couillard, coproductrice, ont élaboré en passant beaucoup de temps dans les hôpitaux, CHSLD, cliniques privées, ambulances, maison de soins palliatifs et même dans la rue avec une infirmière attitrée à des prostituées ou des sans-abri. C'est humain, pertinent, étoffé et télévisuellement bien ficelé.

Toutes les semaines pendant trois mois, la mère et la fille radiographieront un seul sujet: les soins intensifs auprès des nouveau-nés, les soins intensifs au chevet des mourants ou les soins intensifs en pédopsychiatrie. Elles suivent une personne par émission, comme le Dr Denis, qui nous ouvre les portes de son univers, autant personnel que professionnel.

Claire Lamarche pose les bonnes questions, parfois délicates, à ce spécialiste aux multiples talents: a-t-il parfois hésité à opérer des criminels? Oui, une fois. C'était un «monsieur qui avait toutes les maladies, sida, hépatite, et qui avait sodomisé une fillette de huit ans», répond le Dr Ronald Denis, qui a bien sûr opéré le malade. Vous découvrirez aussi que même si les traumatologues côtoient la mort tous les jours, ça ne veut pas nécessairement dire qu'ils en ont moins peur que nous.

Les médecins, infirmières et ambulanciers filmés pour Soins intensifs partagent plusieurs traits de personnalité: empathiques, dévoués, doués et compétents. C'est un peu l'envers de la médaille des manchettes criardes qui dénoncent la décrépitude de notre système de santé. «On ne nie pas les problèmes d'accès. Mais une fois qu'on entre dans le système de santé, on est bien traité. On trouvait ça important de le faire vivre aux gens», confie Claire Lamarche, 66 ans, qui planche sur une série semblable dans le milieu de l'éducation.

Fini, pour elle, le monde de l'hôtellerie: elle a fermé et planté une pancarte «à vendre» devant son auberge de santé à Saint-Félix-de-Kingsey, au sud de Drummondville. «Il faut peut-être que je rétrécisse ma palette», constate-t-elle.

Autres temps, autres moeurs

Alors que la SRC célèbre les 30 ans de RBO, qui ont obtenu beaucoup de notoriété en ridiculisant des publicités moches, c'est le contraire qui se produit chez V. L'émission Boutique MC Gilles ne connaîtra pas de deuxième saison en raison de la frilosité de la jeune station avec les grandes marques de commerce. Officiellement, V a indiqué à Dave Ouellet, alias MC Gilles, que son produit ne rejoignait pas assez de téléspectateurs (moyenne de 238 000), notamment les jeunes et ceux qui le suivent sur Twitter. Et selon la porte-parole de V, Diane Patenaude, MC Gilles n'a jamais été brimé dans ses élans créatifs.

De son côté, Dave Ouellet affirme exactement le contraire: V a torpillé sa parodie de Zéro à Gilles et il ne pouvait prononcer aucun nom de marque connue en ondes. Pas le droit de concocter une poutine au Paris Pâté, pas le droit de tester la poutine congelée en vente au Couche-Tard, pas le droit de rire des pubs «What's nous?» de CTV et pas le droit de parler d'argent Canadian Tire. Il a même fallu retirer un plan d'une entrevue parce qu'un camion identifié à Purolator passait derrière l'interviewé. Impossible, non plus, de diffuser des extraits de vraies infopubs québécoises.

«En humour à la télé, on peut parler de tout sauf de ce qui a rapport aux marques. Ce n'est pas de la censure, mais il y a une extrême prudence. Aucun producteur ne veut prendre de risque. Avant, on n'avait peur d'être poursuivi, maintenant on a peur de juste recevoir une mise en demeure», explique Dave Ouellet.

Au départ, Boutique MC Gilles se voulait «un Infoman du consommateur, une sorte de critique de la société de consommation», détaille Dave Ouellet. Mais comme il lui était impossible de présenter des produits québécois à l'antenne, il a dû commander tous ses objets aux États-Unis, donc pas en vente ici, ce qui diminue l'intérêt, soyons honnête.

Dave Ouellet avait signé un contrat de 14 semaines avec possibilité de renouvellement en hiver. V a plutôt abandonné le projet. «Je n'aurais pas fait une autre saison comme celle que je viens de faire, c'est clair», ajoute MC Gilles.