Sept ans, déjà.

Sept ans que La Presse m'offre cette tribune exceptionnelle. Sept ans que j'ai le privilège de couvrir et de commenter pour vous l'actualité sportive. Sept ans de hauts et de bas du Canadien, de Jeux olympiques, de Coupe du monde, de Coupes Grey, de F1, de scandales de dopage et que sais-je encore. Sept ans de chroniques, de reportages, d'entrevues et de portraits, en provenance des quatre coins du monde.

Mon premier papier est paru le 15 septembre 2003. Je débarquais tout juste d'Angleterre. J'y avais passé les trois années précédentes, plus attentif aux exploits de Thierry Henry qu'à ceux de José Théodore, plus préoccupé par les coups de gueule de Sir Alex Ferguson que par ceux de Don Matthews.

Prétendre que je n'étais pas nerveux à l'idée de partager avec Réjean Tremblay la page 5 du vieux tabloïd des Sports serait mentir. Je me revois encore consulter mes courriels, le matin de la publication de mon premier texte. Sept heures à peine et déjà un message de bêtises: un lecteur m'invitait à retourner à Londres par le premier avion pour avoir osé dire que l'éventuelle perte du Grand Prix de Montréal nuirait plus à la popularité de la F1 au Québec que le retrait de la compétition de Jacques Villeneuve.

Bienvenue aux Sports!

Sept ans, donc, et des souvenirs pour toute une vie. La désinvolture et l'allégresse contagieuses d'Usain Bolt à Pékin. L'électricité dans l'air du Centre Bell les soirs de matchs des séries. Clara Hughes qui s'effondre sur la glace après avoir gagné l'or aux Jeux de Turin. La victoire de l'Espagne (et le chant des vuvuzelas) au Mondial 2010. La remontée des Alouettes contre les Roughriders en finale de la Coupe Grey, l'an dernier. Pedro Martinez qui passe le K.-O. à Don Zimmer par un soir d'automne frisquet au Fenway Park.

Quoi d'autre? Voyons voir. La nouvelle vie - dans une cabane perdue dans les bois du Nouveau-Brunswick! - de la double médaillée olympique en patinage de vitesse Anouk Leblanc-Boucher. Quatre jours dans la froidure du Nunavik avec Joé Juneau, sa blonde et leurs deux filles. La joie de Frédéric Bilodeau quand son frère Alexandre a gagné l'or olympique dans les bosses de Cypress Mountain, en février.

Sept ans de belles rencontres (les moins belles, je préfère les oublier). Clara et Joé. Des entraîneurs passionnés comme Robert Tremblay et Gregor Jelonek. Chantal Petitclerc. François-Olivier Roberge. Tania Vicent. Mike Cammalleri. Ben Cahoon. Alexandre Despatie. Patrick Carpentier. Dominick Gauthier et toute sa bande de B2Dix. La belle équipe de la Fondation de l'athlète d'excellence du Québec. Et bien d'autres encore.

Sept ans que je n'ai pas vus passer. C'est ce qui se produit quand on jouit d'une aussi grande liberté que celle dont j'ai disposé au sein de la section des Sports de La Presse. Une section à laquelle je suis profondément attaché, même si, vous l'aurez sans doute deviné, la chronique que vous lisez en ce moment est ma dernière dans ces pages.

Je ne m'en vais pas bien loin: une vingtaine de pieds à peine séparent mon pupitre actuel de mon nouveau fauteuil. À compter de mardi, j'occuperai le poste d'adjoint au directeur de l'Information, responsable des Sports.

Le contact quotidien avec vous, les lecteurs, me manquera (quoique j'espère que vous continuerez de m'écrire et de me suivre sur Twitter). Je vais aussi certainement m'ennuyer du travail sur le terrain. C'est avec un pincement au coeur que je renonce, entre autres, à aller à Londres pour les Jeux de 2012... et à couvrir la conquête par le Canadien de sa 25e Coupe Stanley, le printemps prochain. (C'est beau, rêver.)

En contrepartie, j'aurai la chance de diriger le meilleur groupe de journalistes sportifs à Montréal, une équipe qui sera renforcée dans quelques mois par l'arrivée d'un nouveau columnist, Philippe Cantin. Celui-là même qui, à l'époque où il était le grand patron de la rédaction, a eu l'idée pour le moins audacieuse d'aller pêcher son nouveau chroniqueur de l'autre côté de l'Atlantique. La roue tourne.

Le défi qui nous attend, collectivement, est le même que celui que je m'étais lancé dans ma chronique inaugurale, en 2003, et que j'espère avoir relevé avec succès: «Garder un regard frais et enthousiaste sur le sport tant professionnel qu'amateur, tout en professant un sain scepticisme. Ne pas avoir peur de poser des questions difficiles, tout en restant capable de transmettre l'extase bien particulière que procurent les grands exploits sportifs.»

Osons une promesse: le cahier des Sports de La Presse - sur papier et dans ses déclinaisons numériques - sera plus que jamais le rendez-vous incontournable des amateurs de sports francophones à la recherche de journalisme de premier ordre et d'histoires originales, fouillées et bien écrites.