La fronde qui menace de faire imploser le Parti québécois est bourrée d'illogismes.

La fronde qui menace de faire imploser le Parti québécois est bourrée d'illogismes.

Voici donc les péquistes en train de conspuer un leader à qui leurs militants viennent tout juste d'accorder un vote de confiance de 93%!

Dans le sondage CROP que La Presse publiait hier, 62% des Québécois (incluant une majorité d'électeurs péquistes!) réclament la démission de Pauline Marois. Mise à part l'erreur énorme d'avoir piloté un projet de loi indéfendable sur le Colisée, de quoi donc Mme Marois se serait-elle rendue coupable depuis le congrès d'avril dernier?

On a du mal à croire que cette femme de tempérament généralement conciliant ait pu soudainement devenir ce tyranneau que les démissionnaires accusent d'autoritarisme.

Quels sont au juste les motifs des démissionnaires? Et par qui donc veulent-ils la remplacer?

Louise Beaudoin et Pierre Curzi ont découvert, deux ans après s'être représentés aux élections, qu'ils n'aiment plus la politique partisane. D'où vient ce désir de «changer la politique»? De convictions venues sur le tard (tous deux sont dans la soixantaine!) ou des sondages qui montrent une désaffection populaire envers les politiciens?

Mme Beaudoin avait-elle déjà l'intention de quitter la politique, auquel cas l'affaire du Colisée n'aurait été qu'un prétexte? Quant à M. Curzi, pourquoi ce désenchantement soudain? Ne venait-il pas de gagner, au congrès, sa grande bataille concernant l'assujettissement des cégeps à la loi 101, une mesure que Mme Marois avait acceptée contre son meilleur instinct politique?

Lisette Lapointe et Jean-Martin Aussant, eux, reprochent à Mme Marois un soi-disant manque de conviction souverainiste et voudraient qu'elle s'engage tout de suite à tenir un référendum dès après une éventuelle prise du pouvoir.

Ce serait pourtant, à l'évidence, une stratégie suicidaire que de passer la prochaine campagne électorale à «promettre» un référendum - que dis-je, à menacer les électeurs de leur envoyer par la tête un référendum qu'ils refusent farouchement, comme l'indiquent tous les sondages depuis des années.

Hier encore, le CROP montrait que 82% des électeurs (dont 68% des souverainistes !) désirent un «bon gouvernement» qui mettrait la pédale douce sur la souveraineté, pour ne pas dire plus.

En déstabilisant le leadership de Mme Marois, que cherche Jacques Parizeau? Par qui veut-il la remplacer? S'imagine-t-il que Gilles Duceppe, avec sa nouvelle image de perdant, réussirait là où elle aurait échoué? Croit-il vraiment que M. Duceppe, prospère rentier du fédéral qui est peut-être en réserve de la République, serait assez téméraire pour s'engager à tenir un référendum indépendamment de l'humeur de l'opinion publique? M. Duceppe n'est pas du genre casse-cou. Qu'est-ce que les purs et durs gagneraient à troquer Mme Marois contre un politicien qui vient de mordre la poussière au fédéral?

Bernard Landry, alors? L'ancien chef, qui regrette amèrement d'avoir impulsivement démissionné dans les minutes suivant un vote de confiance décevant, est sur toutes les tribunes et cultive toujours ses fidèles, et il n'y a pas de doute qu'il serait prêt à revenir aux affaires. Pourtant, alors qu'il était au pouvoir, lui aussi a toujours prudemment spécifié qu'il ne ferait de référendum que dans «des conditions gagnantes».

Alors, pourquoi cette fronde, si c'est pour remplacer Mme Marois par quelqu'un qui, une fois investi de la responsabilité suprême, aurait grosso modo une approche également pragmatique envers la souveraineté?

En outre, cette question n'avait-elle pas été réglée démocratiquement, par un vote massif lors du congrès d'avril, il y a moins de deux mois?

Les frustrés reviennent à la charge, en quête d'un autre chef... un autre chef jetable, comme les Lévesque, Johnson, Bouchard, Landry, Boisclair et maintenant Marois. Avis aux volontaires.