Le président du Conseil de la souveraineté du Québec, Gérald Larose, vient d'annoncer la tenue, en 2012, d'états généraux sur la souveraineté, de concert avec les partis indépendantistes et la myriade de groupuscules qui ont poussé ici et là comme des champignons sur les cendres du Bloc québécois.    

M. Larose et ses camarades devront multiplier les neuvaines et les prières à Saint-Jude, patron des causes désespérées, s'ils veulent que leur colloque soit alimenté par l'enthousiasme populaire.

Un sondage CROP parrainé par le groupe de réflexion «L'idée fédérale» en septembre dernier, donne raison à François Legault: les Québécois non seulement ne veulent plus entendre parler du vieux débat entre fédéralisme et souveraineté, mais refusent farouchement de s'identifier en fonction des anciennes étiquettes.

À preuve, 77% des répondants souhaitent un moratoire sur le débat constitutionnel; 70% (incluant le tiers des indépendantistes) ne croient pas que le Québec deviendra un pays souverain; si 63% se disent d'accord avec le fédéralisme (une augmentation de 8% par rapport à avril 2009), la tendance de fond est au rejet des étiquettes.

Ainsi, 19% s'identifient comme souverainistes; 20% comme fédéralistes; 17% comme nationalistes, et 8% comme autonomistes. Une forte proportion de 37% se considère hors-catégorie - surtout le fait des plus jeunes répondants, qui n'ont pas été moulés comme leurs parents par ces concepts et qui ont d'autres intérêts.

Si 83% des répondants se disent «fiers d'être Québécois», les trois-quarts (76%) se disent «fiers d'être Canadiens»; 24% des francophones sont «fiers d'être Québécois seulement», mais une solide majorité de 65% se dit fière «d'être Québécois et Canadien».

En fait, les Québécois ont toujours cultivé cette double identité, même à l'époque où la souveraineté suscitait les passions. C'est d'ailleurs pourquoi les deux questions référendaires, en 1980 et en 1995, jouaient sur l'équivoque du maintien du lien canadien. Mais ajoutée aux autres résultats du sondage, la double appartenance prend une dimension encore plus importante, posant un obstacle presque insurmontable à la sécession.

Si les Québécois s'accommodent du statu quo constitutionnel (41% veulent rester dans la fédération canadienne, même non amendée, seulement 25% souhaitant la sécession), ils restent très majoritaires à trouver «important» la reconnaissance de la nation québécoise dans la constitution ou l'accroissement des pouvoirs du Québec.

Toutefois, on note une évolution dans la perception du Canada: la moitié (50% versus 47%) pense qu'il y a des valeurs communes aux Québécois et aux autres Canadiens, ce qui va contre l'idée reçue inlassablement propagée par le Bloc.

Les Québécois francophones ont maintenant «adopté» la Charte des droits. Les trois quarts approuvent la protection de la minorité anglophone au Québec. Plus étonnant, ils sont très partagés sur la question de savoir si la charte doit avoir préséance sur la loi 101 (51 pour, 49 contre).

Ce sondage voulait marquer le 30e anniversaire du rapatriement de la Constitution. Mais pour nos répondants, c'est de la vieille histoire. Plus du quart n'ont pas d'opinion sur l'attitude du fédéral en 1982, et plus du tiers n'en ont pas sur la réaction du Québec à la même époque...

Le sondage n'annonce pas la mort de l'idée d'indépendance (nul ne peut prédire l'avenir) ni le triomphe durable de l'idée fédéraliste. Ce qui en ressort le plus clairement, c'est le déclin lent mais net de l'option souverainiste, le refus des anciennes étiquettes constitutionnelles, et le désir de fermer le dossier de la «question nationale» au moins temporairement. Ce sondage explique clairement, si besoin en était, la popularité de la coalition de François Legault.