Avez-vous vu combien de citoyens ont signé la pétition demandant officiellement une consultation publique sur l'agriculture urbaine? Je l'avoue, j'ai été moi-même très surprise, hier, quand le nombre a été dévoilé: 25 082 Montréalais ont apposé leur nom.

C'est beaucoup. Plus de 5% du nombre d'électeurs qui ont voté aux élections municipales de 2009 ont signifié publiquement qu'ils voulaient qu'on discute d'un sujet qui ne fait pourtant jamais les manchettes. Mais il faut croire que l'autosuffisance alimentaire intéresse les gens. Tout comme le verdissement de leur quartier. Et le goût des oeufs frais et des bons légumes.

Cette pétition, toutefois, n'a pas circulé toute seule. Sur le terrain, des organismes citoyens qui veulent faire bouger les choses, efficaces et déterminés, ont choisi de relever ce défi. Celui-là comme plusieurs autres. Actuellement, partout dans la métropole, cette volonté de groupes et d'individus, bien ancrés dans leur quartier, de remuer Montréal sans attendre après l'hôtel de ville est de plus en plus évidente.

L'été dernier, un bon exemple de ce phénomène a été toutes les audacieuses et efficaces initiatives privées qui ont émergé ici et là pour apporter de la cuisine dans les rues, en zigzaguant entre les interdictions. Attendre que la mairie se réveille pour bouger? Pas question, ont rétorqué ces hardis entrepreneurs.

À Notre-Dame-de-Grâce, jeudi dernier, on a annoncé une nouvelle initiative pilote du Centre d'écologie urbaine de Montréal, pour transformer en «quartier vert et en santé» le secteur situé à l'ouest et un peu au nord du chantier du Centre de santé McGill. C'est le quatrième projet de la sorte mené par le Centre d'écologie urbaine, qui travaille aussi sur l'est du Plateau, Parc-Extension et l'est de Mercier.

Officiellement, l'arrondissement de Côte-des-Neiges-Notre-Dame-de-Grâce, dont Michael Applebaum est le maire, participe au projet. Mais qui est allé chercher l'aide du Centre d'écologie? Une mère de famille du quartier. Et qui enjoignait aux citoyens, la semaine dernière, de venir nombreux à la présentation du nouveau plan? La mairie? Non, même si M. Applebaum avait quelques annonces à faire, ce sont surtout les groupes de résidants du quartier qui se sont manifestés - même les scouts! -, enthousiastes au cube, enjoignant aux concitoyens de venir à la réunion et d'embarquer dans ces transformations très locales, dont le suivi sera assuré par le Conseil communautaire de Notre-Dame-de-Grâce. Parlez de transformer un quartier pour faciliter les déplacements, ralentir la circulation dans les rues résidentielles, mieux encadrer le parking, dégager les carrefours ou verdir les rues et les citoyens répondront présents, s'ils ne sont pas déjà en train de militer...

Menacez de fermer une bibliothèque ou une piscine et ils sortiront dans la rue, comme on l'a vu l'an dernier à Notre-Dame-de-Grâce aussi et très récemment dans le dossier du bain Schubert, sur le Plateau.

L'indignation serait-elle un peu partout, sous toutes sortes de formes et d'intensités? Tant pompée à bloc au square Victoria pour revendiquer la fin du capitalisme que sous une forme douce dans les jardins de Villeray et du Plateau ou les salons de NDG, pour réclamer une ville plus allumée et mieux adaptée aux défis urbains, sociaux et environnementaux d'aujourd'hui?

Hier, pendant que le Groupe de travail en agriculture urbaine dévoilait sa pétition, favorablement accueillie par la Ville et les partis de l'opposition, l'Agence métropolitaine de transport (AMT) a annoncé, elle, son plan stratégique de développement des transports collectifs pour les 10 prochaines années. Davantage de métros vers Laval et la Rive-Sud, du train électrique vers l'ouest, une traversée sur rail dans le couloir du pont Champlain... Des thèmes connus, mais pas moins nécessaires pour améliorer le réseau de transports collectifs dans toute la région métropolitaine. La facture? Quelque 17 milliards en 10 ans. Cher? «Ne pas agir coûte trop cher», a lancé le président de l'AMT, Joël Gauthier. Ne pas agir, c'est-à-dire ne pas réparer, ne pas améliorer, ne pas rénover, «c'est acheter des problèmes pour plus tard», a-t-il aussi déclaré.

Pour financer le tout, M. Gauthier lance des idées: augmenter la taxe sur l'essence, une mesure équitable, dit-il, puisque les automobilistes paient ainsi selon leur usage de leur véhicule. Il parle aussi de demander aux promoteurs immobiliers qui profitent directement de la présence des transports en commun près de leurs constructions d'assumer une portion de la note. Ou alors de trouver des mécanismes pour profiter fiscalement de l'augmentation de la valeur des propriétés situées près des gares et stations de métro. L'idée d'étendre aux immatriculations commerciales la contribution obligatoire pour les transports collectifs a aussi été lancée.

Le succès du métro de Laval et ensuite des BIXI montre bien que lorsqu'on leur donne de bonnes solutions, les résidants de la région métropolitaine sont prêts à adopter de nouvelles habitudes de déplacement. L'AMT fait donc bien d'insister sur la nécessité de trouver des moyens nouveaux pour investir à tout prix dans les transports collectifs, même si la facture a l'air gigantesque et même si ni Montréal ni Québec ne débordent de moyens financiers.

Car ce qu'on constate partout dans la métropole, actuellement, qu'on parle de train ou de métro, de qualité de vie dans les quartiers, d'agriculture urbaine, peu importe, c'est une réelle et forte volonté de changement - allô vague NPD et avènement de la CAQ.

Alors, pensons argent autrement et essayons d'avancer différemment.