Taxes, taxes, taxes et taxes. C'est la meilleure façon de résumer le budget présenté hier par le maire Gérald Tremblay.

Budget sans imagination, a dit un des chefs de l'opposition, Richard Bergeron. Au contraire, je trouve que le maire a fait preuve d'imagination en dénichant toutes ces taxes qui tombent sur la tête du pauvre Montréalais.

En janvier 2010, Gérald Tremblay avait adopté un chapelet de taxes. Résultat: le fardeau fiscal des Montréalais avait grimpé de 6%.

Hier, rebelote, le maire persiste et signe. Cette fois, la facture augmente de 4,3%. Douloureuse année 2011 en vue pour les contribuables.

Faites le calcul: 6% en 2010 " 4,3% en 2011 = 10,3%.

C'est drôle. Deux jours avant les dernières élections municipales, soit le 30 octobre 2009, La Presse avait publié une nouvelle: «Le maire s'apprête à hausser les taxes de 16% s'il est réélu, soit 6% en 2010, 4% en 2011, 3% en 2012 et 3% en 2013».

Le cabinet du maire avait quasiment fait une syncope en lisant notre manchette. À 48 heures du vote, alors que Gérald Tremblay n'avait soufflé mot de ce festival de taxes pendant la longue, très longue campagne électorale.

Le jour même, le maire avait donné une entrevue au réseau TVA. L'animateur lui avait demandé avec une rare complaisance: «Êtes-vous monsieur 16%?»

«Mais non, mais non, avait répondu Gérald Tremblay. C'est faux!»

Tiens, tiens.

Question: les campagnes électorales n'ont-elles pas été inventées pour que les candidats à la mairie discutent de leur programme? Une hausse de taxes de 16% étalée sur quatre ans ne mérite-t-elle pas une petite mention? C'est vrai que ce n'est pas très vendeur, mais, en politique, il faut avoir le courage de ses idées.

Si M. Tremblay avait été franc, les Montréalais ne seraient pas en train de tomber des nues en voyant toutes ces taxes les frapper de plein fouet.

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J'oubliais. Le maire a aussi décrété une taxe sur l'immatriculation, une nouveauté. Les Montréalais qui ont une auto devront payer 45$ de plus lorsqu'ils renouvelleront leur certificat.

J'oubliais un autre truc, la hausse des tarifs de la Société de transport, annoncée mardi: 4% en 2011.

Hier, pendant le point de presse, le maire a lancé: «Nous ne pouvons pas indéfiniment augmenter les taxes.»

Éclair de lucidité?

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Donc, des taxes, des taxes et des taxes. Et pourquoi? Pour faire de Montréal une ville formidable qui déborde de projets? Non.

Pour donner davantage d'argent aux arrondissements qui sont près des citoyens et s'occupent, entre autres choses, des bibliothèques et des piscines? Non plus. Les budgets des arrondissements sont gelés.

Il y a bien quelques dizaines de millions pour les parcs, les pistes cyclables, les familles, l'environnement et la propreté, mais ce sont des grenailles.

Les dépenses, les grosses, les vraies, nourrissent la machine: les régimes de retraite, la dette, les salaires.

Le budget grimpe de 5%, soit deux fois le rythme de l'inflation, pour s'établir à 4,5 milliards. C'est énorme. Comme si la machine s'était emballée et que le maire était incapable de la maîtriser.

D'ailleurs, la masse salariale totale augmente de 11,3%. À elle seule, la rémunération grimpe de 5,6%. Le nombre d'employés fait aussi un bond: 400 postes supplémentaires.

Plus de policiers et de pompiers, mais aussi davantage de personnel qualifié aux travaux publics. La Ville veut retrouver son expertise lorsqu'elle attribue des contrats. Elle essaie de casser sa dépendance vis-à-vis des firmes externes, ce qui est une excellente idée. Le maire a aussi mis sur pied une équipe d'enquête pilotée par le contrôleur général, Pierre Reid. Une autre excellente idée.

La dette plombe les finances. La dette nette est de 6,3 milliards, en comptant les régimes de retraite. La Ville doit débourser 633 millions par année pour en payer les intérêts et le capital. Méchant trou dans le budget.

La Ville n'a pas fait le ménage dans son orgie de structures, d'unités, de services et de je ne sais quoi encore. Elle promet de le faire. Le directeur général, Louis Roquet, planche sur le dégraissage de la machine. Grosse commande. Son mandat: trouver 125 millions par année pendant deux ans. Pour l'instant, il n'a déniché que 22,5 millions. Il lui reste beaucoup de pain sur la planche et bien des millions à trouver.

La Ville ne contrôle pas ses dépenses, mais visiblement, elle ne contrôle pas non plus ses économies. Pour les taxes, par contre, elle est championne. Contrôle parfait.