S'il y a des Oscars pour les cours universitaires les plus bidon de la province, j'aimerais soumettre la candidature de La science face aux phénomènes paranormaux, du professeur Régis Olry, de l'Université du Québec à Trois-Rivières.

Le prof Olry enseigne normalement l'anatomie. Mais il a fait d'une passion de jeunesse - les phénomènes paranormaux - le sujet d'un cours optionnel donné pour la première fois à l'UQTR l'an dernier. Une centaine d'étudiants s'y sont inscrits.

«Ça fait une quarantaine d'années que je m'intéresse à un certain nombre de choses, et plus particulièrement au syndrome de possession diabolique», m'a-t-il dit en entrevue, dans le cadre d'un reportage des Francs-Tireurs.

J'ai assisté au dernier cours du trimestre, en décembre dernier. Thème du cours: la combustion humaine spontanée. Si vous ignorez de quoi je parle, c'est que vous n'êtes pas un assidu du grand buffet du paranormal, où la combustion humaine spontanée se trouve entre la télépathie et les maisons hantées (dont le prof Olry a parlé dans son cours).

Je n'ai assisté qu'à un seul cours du prof Olry. Je ne peux pas porter de jugement sur ceux que je n'ai pas vus. En quatre ans en communications à l'université, j'ai eu ma dose de cours faciles. Mais je n'ai jamais vu un cours aussi «Mickey Mouse» que celui donné par le professeur Olry.

D'abord, un cours «normal», à l'université, dure généralement trois heures. Celui auquel j'ai assisté? Une heure à peine!

Ensuite, les sources citées dans le cours étaient souvent des livres d'enquêteurs patentés du paranormal. Des livres que je googlais en temps réel dans mon iPhone et qui faisaient l'objet de déculottages en règle sur le site d'une association de sceptiques américains, pour divers péchés d'inexactitudes.

Enfin, les critères d'évaluation sont aussi difficiles que de mâcher de la guimauve. Tenez-vous bien: la moitié de la note du cours de Régis Olry consiste à décrire une expérience paranormale. Et si l'étudiant n'en a jamais vécu, il peut en inventer une! «Je leur demande (...) de réfléchir sur ça, c'est-à-dire, c'est une forme de mémoire très court - ça fait deux pages -, qu'est-ce que ça leur évoque...»

Quand le prof Olry m'a dit ces mots, j'ai pensé avoir mal entendu. Voici un extrait de notre échange:

«Cinquante pour cent de la note: c'est leurs impressions face à ces phénomènes-là?

- Oui, a répondu le prof de l'UQTR. C'est un cours d'enrichissement.

- Ça n'a pas l'air ben, ben compliqué...

- C'est pas fait pour l'être. C'est fait pour être instructif.»

Voilà. C'est fait pour être instructif. J'ai failli tomber sur le derrière: on ne parle pas d'un cours d'épanouissement personnel, ici. On parle d'un cours optionnel - trois crédits - à l'Université du Québec à Trois-Rivières, une institution de haut savoir. Et sans rire, un prof me dit que son cours n'est «pas fait» pour être compliqué! Régis Olry m'a aussi dit qu'il n'exigeait pas que ses étudiants citent des références, pour le travail qui vaut 50% de la note globale: «Les sources, c'est ce qu'eux pensent.»

Se pourrait-il, en fait, que le sujet du cours donné par Régis Olry, la science et le paranormal, soit si mince que ça n'ait pas sa place dans une université sérieuse?

Il n'y a pas de communauté scientifique qui se penche sur les maisons hantées. Il n'y a pas de revue savante qui traite de possession démoniaque.

Serge Larivée est prof à l'École de psychoéducation de l'Université de Montréal. Il débusque les mythes du paranormal pour les Sceptiques du Québec depuis des années. Ce qu'il a vu du prof Olry aux Francs-Tireurs l'a renversé.

«Ce cours n'a pas sa place à l'université. Regardez le travail final: c'est du niveau de deuxième secondaire! Et encore, c'est insultant pour les élèves de deuxième secondaire. Ce cours-là, pour moi, c'est l'équivalent de Chantal Lacroix et de ses tables, à TVA.»

Au-delà de la bêtise de l'approche Olry, Serge Larivée voit dans l'existence même de ce cours une autre preuve du nivellement par le bas à l'université. «Les universités se financent avec des inscriptions aux cours. Peut-on attirer des étudiants en médecine, en génie? C'est dur: il y a le plafond des notes. En sciences humaines, le plafond des notes est plus bas: il y a une tentation de créer des vaches à lait avec ce genre de cours.»

À l'UQTR, Rémi Tremblay, adjoint de Sylvain Delisle, vice-recteur aux études de premier cycle, m'a assuré que l'université est parfaitement à l'aise avec le cours donné par Régis Olry. J'ai demandé à M. Tremblay si le vice-recteur Sylvain Delisle a déjà assisté au cours du prof Olry sur les maisons hantées et la possession démoniaque.

Réponse: non, le vice-recteur n'y a jamais assisté.

Ah non?

Il pourrait y assister de façon télépathique.