À première vue, l'ordre du jour du conseil municipal de ce soir est banal: achat de radios pour le service des incendies, installation de fibre optique, attribution de récompenses civiques. Rien de tout cela ne détonne dans une modeste ville de 250 000 personnes, située au sud des États-Unis.

Mais soudain, le point numéro 10 apparaît. Et celui-là aura un impact profond sur les gens de Winnipeg et de Québec, rêvant au retour des Jets et des Nordiques.

Les sept membres du conseil municipal de Glendale approuveront en effet, selon toute vraisemblance, la reconduction d'une entente avec la LNH. Celle-ci permettra aux Coyotes de demeurer au moins une autre saison en Arizona.

La semaine dernière, Glendale a expédié un chèque de 25 millions à la LNH pour éponger en partie les pertes des Coyotes en 2010-11, estimées à 36 millions.

En vue du calendrier 2011-12, cette garantie sera de nouveau fournie à la LNH, propriétaire des Coyotes depuis la faillite de l'équipe en 2009. Cet engagement empêchera son transfert à Winnipeg.

La stratégie de la LNH et des élus de Glendale est simple. Ce délai additionnel, croient-ils, permettra de conclure l'achat de la concession par Matthew Hulsizer, un homme d'affaires de Chicago, ou toute autre personne tentée par la fabuleuse aventure du hockey dans le désert.

Les Coyotes n'ont touché aucun profit depuis leur arrivée en Arizona en 1996, ce qui n'empêche pas Gary Bettman de déclarer que le vent tournera. Et il s'en trouve pour le croire.

Si aucun acheteur ne mord à l'hameçon, malgré les 200 millions que Glendale veut injecter pour l'appuyer, les élus de cette municipalité auront pompé 50 millions en deux ans dans l'équipe. À moins qu'ils ne changent d'idée ce soir, ce qui serait étonnant.

Cinquante millions partis en fumée, c'est tout de même renversant!

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Le cas des Coyotes réglé pour la prochaine saison, l'avenir des Thrashers d'Atlanta prendra le haut du pavé. L'équipe a perdu 20 millions depuis septembre dernier et ses propriétaires veulent vendre la concession.

La recherche de nouveaux actionnaires ne progresse pas. Et contrairement à Glendale, la ville d'Atlanta, aux prises avec de multiples problèmes sociaux, ne volera pas au secours des Thrashers.

Quant à la LNH, déjà propriétaire des Coyotes et tutrice des Stars de Dallas, il serait risible qu'elle prenne une autre concession sous son aile.

Les Thrashers pourraient donc déménager à Winnipeg en vue de la prochaine saison. La transaction serait de 170 millions: 110 pour les vendeurs et 60 pour la LNH, en frais de transfert.

Québec, vous demandez? À première vue, ce scénario ne constitue pas une bonne nouvelle. Car il est clair que la LNH multipliera les efforts pour garder à long terme les Coyotes à Phoenix. Cet objectif a en effet perdu tout caractère rationnel.

Gary Bettman et Elaine Scruggs, la mairesse de Glendale, avaient concocté un joli plan pour permettra à Hulsizer d'acheter l'équipe et de gérer l'amphithéâtre. La Ville lui aurait versé 197 millions pour le financer!

Un groupe de défense des intérêts des contribuables, l'Institut Goldwater, a menacé de poursuivre Glendale si ce plan était mis à exécution. Sa présidente, Darcy Olsen, a résisté à toutes les pressions. Mais Bettman, peu habitué à voir son pouvoir contesté, ne lâche pas prise.

Le commissaire de la LNH s'est même étonné qu'on empêche des élus de mener leur projet à bien. Comme si la participation de la société civile au débat public ne constituait pas une caractéristique de la démocratie.

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Le pouvoir de Bettman est devenu énorme au fil des ans. Une autre preuve en a été fournie la semaine dernière au Championnat du monde de hockey, en Slovaquie.

Un journaliste de La Presse Canadienne a demandé à René Fasel, président de la Fédération internationale, s'il croyait que les joueurs de la LNH participeraient aux Jeux olympiques de Sotchi, en 2014. Celui-ci a rappelé avoir estimé à 90 %, en novembre dernier, les chances de réussite du projet.

«J'ai fait une prévision ce jour-là, et Gary n'était pas tellement content, a dit Fasel. Donc, il faut qu'il soit heureux, et que je me contente de dire: Je ne sais pas».

Bettman pourra faire durer le suspense. Mais si NBC, le partenaire télé de la LNH, obtient les droits sur les Jeux de Sotchi plus tard cette année, les joueurs de la LNH iront en Russie en février 2014.

En revanche, si Fox ou ESPN emporte la mise, le scénario pourrait être différent.

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En annonçant la construction d'un nouveau Colisée en février dernier, le maire Régis Labeaume avait mentionné que Québec profitait d'une fenêtre d'un an pour obtenir une concession de la LNH.

Ce raisonnement tient la route. L'ennui, c'est que le nouvel amphithéâtre ne sera pas disponible avant septembre 2015. On voit mal une équipe de la LNH jouer trois ou quatre saisons dans le Colisée actuel, un édifice vétuste qui générerait peu de revenus.

S'il est possible que les amateurs de Winnipeg célèbrent bientôt le retour de la LNH dans leur ville, ceux de Québec devront s'armer de patience. Et ne pas réclamer trop fort une équipe. Car Bettman n'aime pas se sentir sous pression. Et, comme le dit René Fasel, pour que les choses fonctionnent, il faut que Gary soit heureux.

Photo: AP

Le souhait de cet amateur a été exaucé: les Coyotes de Phoenix ont la vie sauve pour au moins une autre saison.