Une méchante langue pourrait prétendre qu'un boulot au Festival Juste pour rire constitue la préparation idéale pour un futur président de la Régie des installations olympiques (RIO). À force d'accumuler les malheurs, le Stade et ses dépendances ont suscité plusieurs blagues. Et l'humour est parfois le dernier rempart contre les petits et grands malheurs.

David Heurtel, le nouveau capitaine de la RIO, a justement été collaborateur de Gilbert Rozon à Juste pour rire. D'humeur joyeuse, il devient vite sérieux en évoquant l'avenir du célèbre quadrilatère de l'est de Montréal.

«Il faut arrêter de traiter le Parc olympique en île à part, dit-il. On doit développer un concept de parc urbain, rendre le site vivant et magnétique. Je sais que c'est possible.»

M. Heurtel, avocat de formation, est un solide gaillard de 6'3 passionné de sport. Durant ses études au Collège Brébeuf, il a joué au basketball et applaudi les exploits de Larry Bird. Sa passion pour les Celtics de Boston date de cette époque.

Comme des milliers de jeunes Montréalais, il a trippé sur les Expos et n'a rien oublié du coup de circuit de Rick Monday qui, il y a 30 ans, a privé les Z'Amours d'une participation à la Série mondiale. «À l'école, on nous avait laissés regarder le match à la télé...»

Un vrai fan de sport à la tête de la RIO, c'est une excellente nouvelle. L'avenir du Parc olympique ne peut se résumer à des choix purement économiques, où on transforme un vélodrome en Biodôme. L'héritage du site doit aussi orienter son développement. M. Heurtel l'a compris. Sa première décision recèle un puissant symbolisme.

«Nous soulignerons désormais la date de 17 juillet, jour d'ouverture des Jeux olympiques de Montréal, dit-il. Et en 2016, nous célébrerons leur 40e anniversaire. Les Jeux ont marqué l'histoire de Montréal. La planète nous a vus, nous avons applaudi de grands champions comme Sugar Ray Leonard et Nadia Comaneci. Il faut se souvenir de cela aussi, pas seulement du déficit.»

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Âgé de 40 ans, David Heurtel est le premier président de la RIO assez jeune pour ne pas avoir vécu les dérapages liés à la construction du Parc olympique. Il n'en ignore rien, bien sûr, mais préfère préparer l'avenir.

Au milieu des années 2000, il a travaillé au Seattle Center. Ce complexe, comptant plusieurs installations sportives et culturelles, a été construit pour l'exposition internationale de 1962. Après une période de flottement, l'endroit constitue de nouveau un pôle de la ville. Cet exemple l'inspire.

Dès son entrée en fonction en juillet dernier - il a été recruté chez evenko, où il venait d'accepter un poste important -, M. Heurtel a préparé un plan d'action. Si le comité de Lise Bissonnette étudie l'avenir à long terme du Parc olympique, le nouveau président n'entend pas rester inactif durant son mandat de cinq ans.

Son arrivée donne un coup de pouce à l'Institut national du sport du Québec, un centre d'entraînement pour les athlètes d'élite, qui ouvrira ses portes en 2014, autour du Centre sportif existant.

L'Esplanade ouest, qui s'étend le long du boulevard Pie-IX, sera aussi mise en valeur, notamment par une programmation culturelle et sportive. Une patinoire extérieure sera aménagée à l'hiver 2012-13.

Une somme de 4 millions sera investie afin d'améliorer l'expérience client des visiteurs à la Tour du Stade olympique. Un éclairage extérieur lui permettra de mieux se découper dans le ciel montréalais. Et si un modèle d'affaires est trouvé, M. Heurtel souhaite y implanter un Musée des sports. «C'est une très bonne idée», dit-il, à propos de ce projet porté par des passionnés comme Edgar Théorêt.

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Reste l'épineuse question du Stade et... du toit du Stade.

«La construction d'un nouveau toit est prioritaire, explique M. Heurtel. Depuis 1999, nous avons 12 mois de dépenses par année, mais 8 mois de revenus! Pas étonnant qu'on ne fasse pas d'argent. Il faut un toit pour être rentable. Le Stade est un atout pour Montréal et il faut le démontrer aux citoyens.»

Les experts de la RIO travaillent avec Infrastructure Québec pour trouver la meilleure solution. Un toit rétractable ou pas? Souple ou rigide? Le comité de Lise Bissonnette livrera aussi ses premières réflexions sur le sujet en décembre prochain.

«Nous proposerons une solution pour le toit au début de 2012», explique M. Heurtel. Si tout va bien, un appel d'offres aura lieu un an plus tard, une fois le dossier d'affaires complété.

Afin de générer des revenus, la RIO examine la possibilité de vendre les droits d'appellation du Centre sportif, de l'Esplanade, de la Tour... et peut-être même du Stade.

«Nous étudions cela de manière préliminaire, dit M. Heurtel. On attendra le dépôt du dossier d'affaires du toit pour approfondir. Mais nous devons améliorer le financement privé du Parc olympique et ne pas toujours dépendre de l'État. Nous songeons à des partenariats corporatifs responsables, qui respecteront le caractère patrimonial du site.»

Pour beaucoup de Montréalais, le Parc olympique est un endroit fantôme. C'est loin d'être le cas: 3 millions de personnes fréquentent annuellement les installations du quadrilatère. Mais transformer cet ensemble disparate en un tout cohérent constitue un défi de taille.

Beaucoup de travail et sans doute quelques controverses attendent David Heurtel.

Photo: François Roy, La Presse

La construction d'un nouveau toit au Stade est une priorité pour David Heurtel, qui compte rendre son pouvoir d'attraction au Parc olympique, avec notamment une patinoire extérieure.