Zdeno Chara n'a pas été suspendu hier par la Ligue nationale et c'est très bien ainsi. Selon les us et coutumes de la Ligue nationale, Zdeno Chara n'a fait que compléter sa mise en échec et au pire a causé de l'obstruction contre Max Pacioretty.

Dans les faits, n'importe où sur la patinoire sauf près de ce poteau de soutien de la baie vitrée, Zdeno Chara n'aurait mérité qu'une pénalité de deux minutes. C'est en voyant Pacioretty étendu sans connaissance sur la glace que l'arbitre a décidé de décerner un cinq minutes à Chara pour obstruction. Les règlements le prévoyaient ainsi. Et puisque la blessure de Pacioretty était sérieuse, il a expulsé Chara du match. C'était aussi correct même si c'était les conséquences que l'arbitre punissait et non le geste.

Évidemment que les fans et fefans se sont déchaînés. J'ai lu des citations complètement folles dans les différents blogues traitant du match. Un client de François Gagnon réclamait même une tête, que dis-je, des têtes en pâture. Un autre, pourtant un professionnel, demandait qu'on fasse descendre le SWAT par des câbles du toit du Centre Bell.

Ce sont les mêmes extrémistes qui hurlent de satisfaction quand un Glorieux «complète sa mise en échec». Il n'y a rien de plus dangereux au hockey que cette notion absurde défendue et appliquée depuis les années 60. Compléter sa mise en échec veut dire en réalité frapper un joueur qui n'est plus en possession de la rondelle. Ce qui est interdit.

Mais depuis que les équipes d'expansion, St. Louis en premier, ont innové avec l'échec avant à outrance, les arbitres ont reçu l'ordre de tolérer «qu'on complète les mises en échec». D'ailleurs, à Montréal, le roi de la mise en échec complétée était Bob Gainey. Il avait le don de frapper l'adversaire deux ou trois secondes après qu'il eut passé le disque à un coéquipier. Et on applaudissait.

Tous les anciens entraîneurs qui sévissent à la télé et à la radio vantent les joueurs qui complètent leurs mises en échec. Dans les faits, ces joueurs commettent une faute qui n'est plus sanctionnée.

C'est comme sur les autoroutes du Québec. La loi dit que la vitesse maximale est de 100 kilomètres à l'heure. Mais les policiers qui ont plus de courage et d'intelligence que les politiciens ont décidé qu'on tolérait jusqu'à 119 kilomètres. Qui donc va accuser un conducteur de conduite dangereuse s'il est impliqué dans un accident à 115 kilomètres sur la 40 dans des conditions normales?

De bons moments aux jeux de la semaine

Donc Zdeno Chara a complété sa mise en échec. Sans doute voulait-il se faire un petit plaisir en balançant Pacioretty sur le banc des joueurs de l'autre côté de la bande. Ça se peut, ça donne toujours de bons moments aux jeux de la semaine que la LNH elle-même envoie aux réseaux de télévision.

Mais qu'on me foute la paix avec les analyses au super slo-mo de la mise en échec. Le bras de Chara était-il levé un peu trop? Pour le plaisir, à quelle hauteur levez-vous votre bras si vous voulez ralentir quelqu'un qui patine ou court en parallèle à vous? Au moins à la hauteur de votre épaule pour avoir un minimum de force. Va-t-on punir Chara juste parce qu'il mesure 6'9? Après tout, Pacioretty mesure 6'2. Ce n'est pas pire qu'un joueur de 6'1 qui frappe Gionta. Même différence.

Et la mise en échec ne s'est pas donnée en super slo-mo. Toute la scène dangereuse ne dure pas une seconde et demie.

À l'encontre des règles et de l'esprit du hockey

Il est extrêmement pénible de voir un jeune homme comme Pacioretty dans l'état où on l'a vu sur la glace du Centre Bell. Et je n'ose imaginer l'angoisse de ses parents et de ses proches.

Mais ça fait 40 ans et plus que la Ligue nationale tolère et favorise un concept qui va à l'encontre des règles et de l'esprit du hockey. La «mise en échec complétée». Si la Ligue nationale tolère ce concept qui par ailleurs sert merveilleusement Jacques Martin et le Canadien, alors Zdeno Chara a reçu la punition qu'il méritait (et encore!) pendant le match.

Tout le reste, c'est de la grosse émotion contredite par d'autres grosses émotions quand c'est votre favori qui donne le coup ou qui complète sa mise en échec. Lâchez le SWAT.

Le hockey est devenu un sport brutal, vous êtes 21 300 fanatiques à applaudir et à encourager cette brutalité, alors ne venez pas jouer les vierges offensées avec Zdeno Chara.

Les vrais morons, ce sont ceux qui payent et qui encouragent les cochonneries et tout ce qui se passe partout dans la Ligue nationale de hockey. Quand bien même cent chroniqueurs de hockey et un éditorialiste critiqueraient la Ligue nationale et se pourfendraient de grands mots, s'il y a encore 21 300 fanatiques au prochain match, tous ces mots ne servent à rien. Le pouvoir est économique et c'est vous qui avez les dollars.

DANS LE CALEPIN J'écoutais Richard Legendre parler du nouveau stade Saputo à CKAC et j'avais deux raisons de me réjouir. Le stade sera magnifique et la collaboration du gouvernement du Québec permet de bâtir un équipement collectif haut de gamme. Et deux, entendre Richard Legendre parler clairement et intelligemment est toujours réconfortant. On peut se dire qu'on aura eu à Québec un ministre des Sports qui savait de quoi il parlait.