Dans le tourbillon de commentaires et d'indignation qui ont suivi l'incident Chara-Pacioretty, il ne manque, à mon avis, que la réaction de l'Archevêché de Montréal.

Ne riez pas. Qui a le monopole de l'autorité morale au Québec? Hockey-Québec? Stephen Harper? Michael Ignatieff - que je soupçonne de n'avoir jamais regardé un match de hockey au complet? Le directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec? RDS? Des milliers et des milliers d'internautes?

Si tous ces gens peuvent se prononcer, pourquoi pas monseigneur Turcotte? Je crois qu'il rate une belle occasion, lui qui se mêle pourtant de choses qui ne le regardent pas. Comme la vie sexuelle. Vous savez ce que disent les Américains à ce sujet? Si tu ne joues pas la game, tu ne dictes pas les règlements...

Et le geste très méchant de Zdeno Chara? L'avenir de notre jeunesse? Vous demeurez silencieux? Pas fort, monseigneur, pas fort...

La démocratie

Quant aux politiciens, à mes yeux, leur opinion n'a aucune valeur. Ils cherchent uniquement à être réélus et nous disent ce que nous voulons entendre. Oh, les méchants Bruins! Il faut faire quelque chose!

N'importe quoi...

Prenez l'exemple de l'amphithéâtre de Québec, une décision difficile à justifier de la part d'un premier ministre en 2011. Mais Jean Charest n'est pas très populaire de ce temps-là et quoi de mieux que du hockey pour flatter le troupeau.

À peu près tout le monde était content, d'ailleurs, même les partis de l'opposition, qui eux aussi veulent nos votes. Imaginons la scène inverse: le maire Labeaume demande 200 millions$ à la première ministre Pauline Marois pour construire un aréna, sans appui du secteur privé. Pensez-vous que madame aurait dit oui aussi rapidement? Elle dit pourtant oui aujourd'hui.

Il n'y a pas que les politiciens qui récupèrent les histoires de hockey. Considérons l'exemple de Louis Dionne, ci-devant directeur des poursuites criminelles et pénales du Québec. Souvenez-vous, il vient de passer un mauvais quart d'heure pendant la grève des procureurs. On lui reprochait de s'être tenu à l'écart de l'action, bref, de s'être caché. Le voilà qui sort de l'ombre dans son costume de super héros et demande une enquête policière sur l'incident Chara-Pacioretty.

Je ne suis pas un expert en la matière, mais il me semble que tout ce temps et cet argent seraient mieux utilisés ailleurs. Bien essayé, M. Dionne, mais cette enquête est tout à fait inutile. Vous n'arriverez jamais à prouver, hors de tout doute, que Zdeno Chara avait l'intention de blesser son adversaire. Jamais. Si vous ne me croyez pas, demandez à vos collègues, ils vous expliqueront. Tout ça est de la poudre aux yeux et d'un opportunisme un peu gênant.

C'est bien pour dire, le hockey est toujours capable, plus que tout autre domaine, de nous faire commettre et avaler des paroles et des gestes insensés.

Attention!

Mais tout ça pourrait changer.

Le commentaire qui, à mon avis, est le plus troublant dans cette affaire, vient d'une dame qui s'est mêlée d'une conversation entre gars où il était question de Chara et Pacioretty: «En tout cas, mon fils veut que je l'inscrive au hockey et ça me tente beaucoup moins quand je vois des choses comme ça.»

Depuis l'incident, j'ai entendu plusieurs fois, de la part de connaissances et de quidam qui ont des jeunes enfants, la même remarque. Elle venait du fond du coeur. Se faire cogner la tête sur un poteau parce que le coach l'exige, non merci.

Le hockey fermé pour cause d'écoeurement?

Gary Bettman est totalement déconnecté de la base de sa clientèle. Un accident, dit-il à propos de l'affaire, mais ça fait pas mal d'accidents.

Il se fout des jeunes parents inquiets qui cherchent d'autres activités pour leurs jeunes. Et croyez-vous qu'il va convaincre les clubs européens de se joindre à sa ligue internationale de cette manière? De plus en plus d'excellents joueurs européens vont demeurer chez eux où ils obtiendront des salaires équivalents sans risque de se faire décapiter.

Il n'y a que dans certaines villes américaines, celles qui n'apprécient pas le pourtant très beau sport qu'est le hockey, que des scènes violentes peuvent vendre des billets. Et pas tellement, d'après ce qu'on voit.

Le pauvre «Call Me Gary» est peut-être en train de détruire la LNH et il ne le sait même pas. Son entourage lui jure pourtant qu'il est un visionnaire, ce qui est le propre des entourages.