Vers minuit trente, les soirs où le Canadien disputait un match au vieux Forum, je terminais mes textes à cheval sur l'heure de tombée, pressé et stressé. Je sortais ensuite du Forum et traversais la rue Sainte-Catherine pour aller décompresser dans un petit bar presque tranquille.

Eddy Palchak arrivait à peu près au même moment, après avoir mis de l'ordre dans le vestiaire du ch. On s'asseyait ensemble, on buvait quelques bières et on bavardait. Jamais, dans ces dizaines de conversations, il n'a été question du Canadien ni de notre travail. Il ne m'est jamais venu à l'idée de tenter de lui soutirer une indiscrétion, une confidence, un scoop. D'abord, ça n'aurait rien donné et puis Eddy n'aurait pas apprécié.

Eddy Palchak est décédé mercredi à l'Hôpital général de Montréal. Il avait 71 ans.

Pendant ses 31 années au service du Canadien, comme soigneur et gérant de l'équipement, il était devenu un personnage public, avec ses propres fans. Il signait des autographes.

Dans une ville folle de hockey et qui gagnait la Coupe Stanley avec une belle régularité, même le soigneur était une star. Une star bien modeste et discrète, une star sans sautes d'humeur, avec un ego tout à fait sain. Il était impossible de ne pas aimer cet homme.

Pour les joueurs du Canadien, il était le grand frère qui réglait toute sorte de petits problèmes. Les recrues lui donnaient du monsieur. Eddy était aussi la cible de nombreuses blagues et mauvais coups de la part des vétérans. À l'époque des très populaires poupées Bout d'chou, Chris Nilan l'avait surnommé Cabbage Patch. La ressemblance était frappante et le surnom est resté.

Pour les journalistes aussi, il était une sorte de grand frère. À l'étranger, quand vous aviez un problème, on vous disait: «Demande à Eddy». Une valise brisée? «Demande à Eddy». Besoin d'une pharmacie? D'un restaurant? D'une voiture? «Demande à Eddy». Et il vous rendait service tout de suite sans changer de visage et sans attendre de remerciements.

Il était impossible de ne pas apprécier ce monsieur toujours d'humeur égale.

À la fin de sa longue carrière au Forum, Eddy souffrait beaucoup. De la goutte surtout. Plus le temps passait et plus la direction du club embauchait des adjoints pour aider Eddie. Il n'était pas question de le pousser à la retraite. Eddy allait décider lui-même du moment où il quitterait l'équipe.

Je me souviens des derniers voyages où il boitait péniblement. Nous portions ses valises, tous les membres de l'expédition souffraient avec lui, Larry Robinson, qui l'adorait, le disputait parce qu'il ne suivait pas son régime...

Nous savions qu'Eddy avait été un brillant joueur dans le hockey mineur d'Ahuntsic. Puis, un entraîneur. Il s'était joint au Canadien pendant la saison 1966-67 comme adjoint à Larry Aubut. Nous savions que, dans la vie, il prenait soin de sa mère. Eddy Palchak était totalement dévoué à sa mère et au Canadien.

Photo: Réal St-Jean, archives La Presse

Eddy Palchak a été au service du Canadien pendant 31 ans comme soigneur et gérant de l'équipement.