Souvenez-vous des Fêtes de l'année dernière - pas l'année dernière de la semaine passée, l'autre année dernière, celle d'il y a 12 mois et des poussières. Qu'avions-nous dans notre bas de Noël? Du Purell, du Purell et encore du Purell. On gardait nos mitaines pour se donner la main. On ne s'embrassait pas sous le gui, on s'envoyait des textos. On se toussait dans le coude et on se mouchait dans le genou. Aucun échange de salive dans les partys de bureau. Personne ne se touchait. On avait trop peur de l'attraper, la maudite, la grippe. Elle était si expéditive qu'elle avait même un code postal: A(H1N1). Les pages des journaux étaient pleines d'avertissements et de rendez-vous. Tout le monde chantait, sur l'air du Blues du businessman: J'aurais voulu être vacciné, sans avoir besoin d'numéro...

C'était la folie, la phobie. Et que s'est-il passé? Rien ou presque. Pas de pénurie de cercueils. On a continué à mourir régulièrement, comme il se doit. La Terre ne s'est pas dépeuplée. La grippe aviaire n'est pas passée à l'histoire. On a eu peur pour rien. Pour se venger, on a ri des autorités qui nous avaient ameutés. On a montré du doigt les pharmaceutiques qui ont écoulé leurs stocks de vaccins. Et on a recommencé à se tousser dans les mains, à se moucher dans la rue, à s'embrasser sous le gui et sous le Dany, à se toucher à qui mieux mieux.

Résultat des courses: l'année dernière, j'ai passé l'hiver sans avoir la grippe. Cette année, je l'ai déjà. C'est toujours quand on s'y attend que les choses n'arrivent pas. Et c'est toujours quand on se s'y attend pas que les choses arrivent.

Rappelez-vous le bogue de l'an 2000. On craignait la fin du monde. Les avions allaient tomber. Les métropoles seraient paralysées. On s'y attendait tellement que rien ne s'est produit. Puis un jour, le 11 septembre 2001, quand on ne s'attendait plus à rien, les avions sont tombés et les métropoles ont été paralysées.

L'homme et sa conjointe de fait sont bipolaires. C'est soit la fin du monde, soit la vie en rose. Soit c'est la pandémie, soit on se promène dehors tout nu. Pourtant, ce n'est pas ça, la vie. La vie, elle est rose fin du monde. Cette année, personne ne parle de la grippe et tout le monde va l'attraper.

C'est comme la droite ou la gauche. Pourquoi l'idéologie politique s'est-elle construite en opposition? On est contre la pauvreté ou on est contre les pauvres. On est pour la sécurité ou on est pour les terroristes. C'est gauche ou droite, droite ou gauche. Alors qu'il est évident que la bonne vision est au milieu. Quand vous allez au cinéma, où vous assoyez-vous? À gauche, à droite ou au centre? Au centre, bien entendu.

Mais se réclamer du centre, c'est poche. Ça manque de caractère. Tout est noir ou blanc. On aime les débats à la 110%. Pour ou contre. Les gens qui nuancent, ça nous énerve. Ça devient complexe et on n'aime pas ça. Les politiciens nuancés, on ne les élit pas. Trop intellectuels. On préfère les gens carrés. Les rigides.

On est Price ou on est Halak. Pourtant, les deux peuvent être bons et moins bons certains soirs, ça dépend dans quelle situation de jeu et contre quelle équipe. Contre une équipe talentueuse, Halak a plus de succès (exemple: Pittsburgh ou Washington). Par contre, contre des équipes qui brassent, il en a moins (exemple: Philadelphie). Price, pour sa part, grâce à son physique imposant... Stop! Stop! C'est trop long! C'est trop compliqué à comprendre. Fini la nuance! Halak est bon, Price est pourri! On aime ça de même. La droite pue, la gauche sent bon!

Si on fait de l'exercice, on en fait tous les jours, une heure par jour, ou on n'en fait pas pantoute. On suit un régime durant un mois, puis on mange des cochonneries durant six mois.

Pour nous, la vie est une porte. Ouverte ou fermée. Alors que la vie est un coeur. Jamais complètement ouvert, jamais complètement fermé.

La santé, tant physique que mentale, est dans la nuance. Manger, mais pas trop. Bouger, mais pas à 150 km/h dans une zone de 30. S'en faire, mais pas trop. Se détacher, mais pas trop.

La grippe de cette année ne devrait pas vous faire peur, mais elle risque de vous faire tousser. Alors pas besoin de prendre une douche au Purell... Mais de temps en temps sur les mains, ça ne peut pas nuire.

Saisir la nuance, c'est ce que je nous souhaite pour 2011.