(Cannes) Julianne Moore, Natalie Portman, Leonardo DiCaprio et Robert De Niro ont été les grandes vedettes du sixième jour du Festival de Cannes. En compagnie de Todd Haynes, réalisateur de May December, et de Martin Scorsese, dont le Killers of the Flower Moon a suscité des éloges, les stars ont assuré avec panache leur journée médiatique.

Le Festival de Cannes présente dans ses sélections des films d’auteur purs et durs, lesquels bénéficient ainsi d’une tribune privilégiée pour se faire valoir. Il suffit cependant de voir comment la Croisette s’embrase dès que s’y pointent de grandes vedettes américaines pour constater qu’en dépit de ceux qui aimeraient affirmer le contraire, Hollywood occupe toujours un espace colossal dans l’imaginaire collectif des cinéphiles.

En choisissant un film avec Johnny Depp pour l’ouverture (Jeanne du Barry, de Maïwenn), en programmant hors compétition des productions comme Indiana Jones and the Dial of Destiny (Indiana Jones et le cadran de la destinée, une réalisation de James Mangold) et Killers of the Flower Moon, de Martin Scorsese, la direction du festival mesure très bien les effets médiatiques anticipés, engendrés par la simple présence des super vedettes sur le tapis rouge.

Un film « dangereux »

Dimanche, les hasards de la programmation ont fait en sorte que les équipes de May December, de Todd Haynes, et de Killers of the Flower Moon se sont soumises aux impératifs de la conférence de presse. Julianne Moore et Natalie Portman, les deux têtes d’affiche de cette « comédie mélodramatique » qu’est May December, ont lancé le bal. Même si cet excellent film, très bien accueilli par la presse, ne s’inspire pas directement d’un fait divers précis, l’histoire de cette femme (Julianne Moore) ayant fait les manchettes il y a 20 ans à cause d’une histoire avec un mineur, devenu aujourd’hui son conjoint (Charles Melton), rappelle néanmoins une affaire réellement survenue, dont la presse à scandale a fait ses choux gras. Mary Kay Letourneau, une enseignante, fut en effet condamnée pour avoir entretenu une relation avec un élève de 12 ans.

PHOTO PATRICIA DE MELO MOREIRA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Charles Melton, Natalie Portman, Todd Haynes, Julianne Moore et Cory Michael Smith ont posé pour les photographes lors de la projection officielle de May December, un film de Todd Haynes.

« La raison pour laquelle ce film paraît si dangereux est que personne ne sait où se situent les limites, a commenté Julianne Moore. Une différence d’âge est une chose, mais une relation entre un adulte et un mineur en est une autre, complètement différente. »

Natalie Portman, qui joue une actrice devant tenir le rôle de la femme dans un drame biographique inspiré de l’histoire du couple, a par ailleurs fait écho aux attentes « injustes » auxquelles doivent répondre les femmes invitées à Cannes. « Ce qu’on attend des femmes dans ce festival est très différent de ce qu’on attend des hommes, a-t-elle déclaré. C’est constant et il vient un moment où cela affecte le comportement. Ce film parle de performance et des différents rôles qu’on joue dans différents environnements, parfois même envers soi-même. »

Près de la Nation osage

Trois heures plus tard, c’était au tour de l’équipe de Killers of the Flower Moon de se présenter devant les journalistes, moins de 24 heures après la projection officielle, marquée par une ovation de neuf minutes.

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Martin Scorsese était encore sous le coup de l’émotion que lui a procurée l’ovation de neuf minutes ayant suivi la présentation de Killers of the Flower Moon.

« Ça ressemblait à un moment très important, a déclaré Leonardo DiCaprio, d’autant que nous avions le privilège de pouvoir vivre ce moment avec Chief Standing Bear, chef de la Nation osage. Nous sommes très fiers de ce film. »

C’est d’ailleurs en demandant à Martin Scorsese où était vraiment le cœur de l’histoire du film que Leonardo DiCaprio a fait dévier le projet d’adaptation du livre de David Grann afin que le récit se concentre davantage sur l’impact du drame auprès des membres de la Nation osage plutôt que sur les agents du FBI qui enquêtent sur les meurtres.

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Leonardo DiCaprio, Lily Gladstone et Robert De Niro, peu avant la conférence de presse de l’équipe de Killers of the Flower Moon, un film de Martin Scorsese

Accompagnant les vedettes à la conférence de presse, Chief Standing Bear, qui a agi à titre de consultant, estime que le drame vécu par son peuple dans les années 1920 est évoqué de façon respectueuse par Martin Scorsese.

« Notre peuple a grandement souffert et nous en subissons les effets encore aujourd’hui, a-t-il dit. Mais au nom de la Nation osage, je peux dire que Marty et son équipe ont rétabli le lien de confiance. Nous savons que ce lien ne sera pas trahi. »

« J’ai voulu tout connaître de la Nation osage, a ajouté Martin Scorsese. Plus j’en apprenais, plus je voulais intégrer tous ces éléments dans le film ! »

De son côté, Robert De Niro a rappelé que sa dernière présence au Festival de Cannes en compagnie de Martin Scorsese remonte à 1976. Cette année-là, Taxi Driver avait gagné la Palme d’or. Dans Killers of the Flower Moon, il se glisse dans la peau d’un personnage vénéneux, un éleveur arriviste, très impliqué dans le dossier de la disparition mystérieuse de plusieurs autochtones. En parlant de son personnage, l’acteur n’a pu s’empêcher de penser à un ancien président – et maintenant candidat à l’investiture républicaine – dont il préfère taire le nom.

« La banalité du mal, voilà ce que nous devons surveiller. On la voit aujourd’hui, bien sûr. Nous savons tous de qui je vais parler, mais je ne dirai pas son nom. Cet homme est stupide. Imaginez ce que ce serait s’il était intelligent ! »

Rappelons que Killers of the Flower Moon, une fresque de 3 h 26 min, prendra l’affiche en salle le 20 octobre en Amérique du Nord. Il sera ensuite diffusé sur la plateforme Apple+.

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