Hugo Latulippe était à Percé, au festival Les Percéides, l’été dernier, lorsque son regard a croisé celui du directeur photo Yves Bélanger. « On était face à face et on est venus les yeux dans l’eau. On ne s’est presque rien dit, mais on avait la même idée en tête », se souvient le cinéaste.

Ils pensaient tous les deux à leur ami Jean-Marc Vallée, disparu subitement le jour de Noël 2021. Yves Bélanger était le directeur de la photographie attitré de Jean-Marc Vallée sur ses projets américains depuis Dallas Buyers Club. Hugo Latulippe est devenu ami avec le cinéaste de C.R.A.Z.Y. en 1997. Il a travaillé pendant six mois sur une série documentaire à Los Angeles alors que Vallée y tournait son premier film en anglais, Los Locos.

Dès qu’il a été nommé directeur général du Festival de cinéma de la ville de Québec (FCVQ) en avril dernier, Latulippe a contacté Yves Bélanger afin de lui soumettre l’idée d’un hommage à leur ami commun. Il a ensuite demandé à l’ex-conjointe de Vallée, la scénariste Chantal Cadieux, et à leurs deux fils – qu’il a connus enfants – s’ils étaient d’accord.

C’est ainsi qu’est né le nouveau prix hommage Jean-Marc Vallée, qui sera décerné dans le cadre du 12e FCVQ, du 13 au 17 septembre. Le prix sera déterminé par un vote du public et remis au long métrage coup de cœur du Festival par Alex Vallée, l’un des fils du regretté cinéaste. Ses films C.R.A.Z.Y. et Wild seront par ailleurs projetés respectivement sur la place d’Youville et au théâtre Le Diamant, quartier général du festival.

« Tout le monde est embarqué dans le projet en se disant qu’on allait réunir la gang, raconte Hugo Latulippe. Je vais inviter une partie de la distribution de C.R.A.Z.Y. et on est en conversation avec des collègues et amis à L.A. pour créer ce premier prix du public Jean-Marc Vallée. »

Ce nouveau prix est en phase avec le ton qu’espère donner au FCVQ son nouveau directeur général.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Hugo Latulippe, directeur général du Festival de cinéma de la ville de Québec

Il y a dans le cinéma de Jean-Marc quelque chose qui est assez intéressant comme ligne directrice pour le festival et qui correspond à ma vision pour son avenir : il ralliait autant le grand public que les cinéphiles.

Hugo Latulippe, directeur général du Festival de cinéma de la ville de Québec

Hugo Latulippe souhaite préciser le mandat du FCVQ afin de lui donner une « personnalité propre forte » et singulière, dans un marché de festivals où il y a toutes les niches, rappelle-t-il. « Je veux vraiment me battre pour qu’on ait à Québec des festivals d’envergure de grande ville », précise-t-il.

Lorsqu’il était adolescent à Limoilou, le cinéma international présenté à Québec ainsi que le théâtre de Robert Lepage ont, dit-il, « fait entrer dans [son] imaginaire le monde entier ». L’an dernier, pour cause de pandémie, la sélection n’était constituée que de films québécois de fiction. Cette année marquera le retour du documentaire et des films internationaux, ainsi que des projections gratuites à la place d’Youville.

« J’embarque dans le train en marche, rappelle Hugo Latulippe. Je me joins à une équipe qui avait déjà une vision. C’est sûr qu’à l’automne, on va faire un reboot. J’ai déjà des intuitions d’où on devrait aller. Je n’ai pas pris le mandat parce que je n’avais plus envie de faire des films. »

Le FCVQ, cela dit, ressemble déjà au cinéaste d’Alphée des étoiles et de Je me soulève. Latulippe, candidat défait du Nouveau Parti démocratique aux élections fédérales de 2019, milite depuis longtemps pour les causes sociales et environnementales.

Aussi, ce n’est pas un hasard si l’invitée d’honneur du 12e Festival de cinéma de la ville de Québec sera la comédienne Christine Beaulieu. « On a une connivence évidemment sur la question écologique, dit Latulippe, qui animera une discussion avec la comédienne. On va programmer quelques-uns des films dans lesquels elle a joué et on va rencontrer le public pour parler d’être une artiste et aussi une citoyenne. »

Christine Beaulieu est bien sûr l’auteure et interprète de la formidable pièce J’aime Hydro. On l’a vue au cinéma chez André Forcier (Embrasse-moi comme tu m’aimes, Les fleurs oubliées), Ricardo Trogi (Le mirage) ou encore chez Maxime Giroux (Norbourg).

« C’est une amie. J’y vais avec les liens. Je crois beaucoup à ça. C’est ce qui fait les festivals qui fonctionnent bien : quand il y a un esprit familial et convivial », estime Latulippe, en donnant l’exemple du Festival de Namur, en Belgique.

Une autre nouveauté du FCVQ qui va dans le sens de l’engagement écologique de son nouveau directeur général : l’évènement convergera dès cette année vers la carboneutralité.

Les festivaliers seront invités à bonifier la compensation de leurs émissions de carbone de 1 $ par billet vendu versé par la billetterie électronique du festival.

« On fait ça avec Arbre-Évolution, une boîte très crédible qui ne fait pas ça pour des questions de communication, précise Hugo Latulippe. Je le sais parce que je suis allé sur le terrain avec eux. Ils suivent les arbres concrètement, afin de s’assurer qu’ils ne vont pas faire du greenwashing, mais contribuer à réduire notre impact sur les écosystèmes. »

Le FCVQ présentera par ailleurs, les 16 et 17 septembre, en formule ciné-concert, Le mécano de la Générale de Clyde Bruckman et Buster Keaton. La musique sera composée et dirigée par le réputé maestro Gabriel Thibaudeau et interprétée par Les Violons du Roy. L’ensemble de la programmation du FCVQ sera dévoilé en août.

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