(Park City) Le cinéaste Yance Ford était encore dans l’« ambiance Sundance » lorsqu’il a rencontré les dirigeants de Netflix après la première de son documentaire Strong Island en 2017.

À l’époque, la plateforme de diffusion continue en ligne était encore un peu nouvelle dans le créneau « documentaire original ». Mais Netflix avait fait plusieurs bons coups avec des documentaires aussi différents que The Square, sur la révolution égyptienne et la place Tahrir, ou What Happened, Miss Simone ?, portrait de Nina Simone par Liz Garbus, tous deux finalistes aux Oscars.

Strong Island obtiendra d’ailleurs lui aussi une nomination aux Oscars, tout comme un autre documentaire de Netflix présenté à Sundance, Icarus, sur le dopage russe, qui remportera le prix du meilleur documentaire en 2018 à Hollywood et à Sundance.

Dix ans après The Square, une acquisition qui a fait connaître les documentaires de Netflix, le diffuseur en ligne est de retour au 40e Festival du film de Sundance, avec un œil tourné vers les acquisitions et deux films originaux très différents.

Le plus récent documentaire de Yance Ford, Power, une enquête sur l’évolution du maintien de l’ordre aux États-Unis, a été présenté en première mondiale jeudi soir à Park City, dans l’Utah. The Greatest Night in Pop, de Bao Nguyen, sur la création de l’hymne caritatif We Are the World, devait être présenté vendredi avant d’être diffusé le 29 janvier sur la plateforme.

« Netflix est en grande partie responsable du paysage documentaire qui existe aujourd’hui, estime Yance Ford. Grâce à [cette plateforme en continu], le public a accès à des films comme le mien. »

Avec Power, qui examine le maintien de l’ordre du haut des airs – 9000 mètres –, Ford admet qu’il n’était pas trop intéressé par le débat sur le financement de la police. « Je n’étais pas particulièrement intéressé par la rhétorique [du mouvement] Back the Blue. Ce qui m’intéressait, c’était cette chose que je voyais en jeu, qui n’était que cette manifestation du pouvoir de l’État exercé sur les gens. »

Une grande portée de diffusion

Adam Del Deo, vice-président du documentaire chez Netflix, a rejoint la société à l’époque de The Square et c’est lui qui a commandé What Happened, Miss Simone ?.

« Nous étions vraiment les petits nouveaux qui essayaient de persuader les documentaristes de l’importance d’une telle plateforme pour la portée de diffusion. »

Au cours des dix années qui ont suivi, l’audience de Netflix est passée d’environ 37 millions d’abonnés à plus de 250 millions dans le monde – et l’appétit pour les documentaires n’a fait que s’intensifier. Ce succès a permis à Netflix d’expérimenter des commandes et des acquisitions dans des séries et des longs métrages de fiction, notamment Chef’s TableMaking a MurdererWild Wild Country, lauréat d’un Emmy, American Factory, gagnant d’un Oscar, et Crip Camp, finaliste aux Oscars.

The Greatest Night in Pop, présenté vendredi à Sundance, a été produit par Lionel Richie et offre des images inédites de la réalisation de We Are the World, cette chanson caritative mémorable qui a commencé avec Harry Belafonte et a réuni des artistes aussi divers que Bruce Springsteen, Smokey Robinson, Cyndi Lauper, Dionne Warwick ou Huey Lewis.

Même si le réalisateur Nguyen n’avait que deux ans environ lorsque la chanson est sortie en 1985, elle a pris davantage de sens au fil des années. C’était l’un des disques que ses parents, réfugiés vietnamiens, jouaient souvent. Et puis récemment, alors qu’il rendait visite à sa mère au Vietnam, son chauffeur de taxi l’a fait jouer et sa résonance intemporelle et mondiale s’est installée.

« C’était un groupe tellement improbable d’artistes qui se sont réunies du jour au lendemain, a déclaré Nguyen. C’est formidable de pouvoir partager ce film avec le monde, car la chanson a touché les gens du monde entier. »