Avant de recevoir une nomination aux Oscars pour son court métrage, Vincent René-Lortie était prêt à arrêter le cinéma.

« C’était une période difficile pour moi. Nous sortions tout juste de la pandémie et je ne gagnais pas d’argent », a raconté le réalisateur montréalais lors d’un appel vidéo depuis Los Angeles.

« J’avais vraiment des conversations sérieuses sur le fait de changer toute ma carrière et de devenir infirmier. »

Heureusement, le parcours de carrière du jeune homme de 30 ans est devenu beaucoup plus clair lorsque son film Invincible a été nommé pour un Oscar dans la catégorie du meilleur court métrage de fiction, qui sera décerné dimanche lors de la cérémonie à Los Angeles.

Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux montre René-Lortie et son équipe criant et sautant de joie en réaction à l’annonce de la nomination en janvier.

« Nous étions bouleversés parce que nous ne nous attendions pas à être ici, a-t-il dit. Je ne sais pas si je serais encore cinéaste aujourd’hui sans l’accueil qui a été réservé à ce film. »

Invincible raconte les 48 dernières heures de la vie d’un garçon de 14 ans alors qu’il s’échappe d’un centre de détention pour mineurs et lutte contre ses démons intérieurs. Le film francophone s’inspire d’évènements réels impliquant l’ami d’enfance de René-Lortie, Marc-Antoine Bernier, décédé après avoir conduit une voiture volée dans une rivière.

Il se mesure à quatre autres films, dont La merveilleuse histoire de Henry Sugar de Wes Anderson et Steven Rales.

Une idée de longue date

Vincent René-Lortie a eu l’idée du film il y a cinq ans, juste après avoir obtenu son diplôme de l’École de cinéma Mel-Hoppenheim de l’Université Concordia. Toujours affecté par le décès de son ami, il a entamé des conversations avec la famille du défunt afin de mieux comprendre la tragédie.

« L’une des premières choses que son père m’a dites, c’est qu’il y avait une possibilité qu’il s’agisse d’un suicide », a-t-il relaté.

« Cette information m’a vraiment frappé parce que j’ai réalisé qu’il y avait beaucoup de choses chez mon ami que je ne comprenais pas et que je me sentais très loin de lui. J’ai commencé à faire des recherches pendant environ un an et ce faisant, je me suis senti plus proche de lui. Et cette idée de faire un film a commencé à grandir en moi. »

René-Lortie dit avoir voulu qu’Invincible, qu’il a écrit et réalisé, soit un film sur quelqu’un « qui se sent ignoré, qui a l’impression de se noyer, qui a l’impression que personne ne l’écoute ».

Léokim Beaumier-Lépine, originaire de Victoriaville, incarne Marc-Antoine Bernier dans son premier rôle d’acteur principal. René-Lortie dit avoir choisi quelqu’un avec peu d’expérience parce qu’il souhaitait une prestation « honnête et pure ».

« Quand Léokim est entré dans la salle d’audition, j’ai tout de suite su que ce serait lui, car il était très proche de ses émotions. À sa manière, il pouvait comprendre le vrai Marc », a-t-il expliqué.

Une expérience « surréaliste »

René-Lortie qualifie la préparation aux Oscars de « surréaliste ». Il s’est envolé pour Los Angeles à la mi-février pour participer au déjeuner des nommés aux Oscars 2024, où il a rencontré deux de ses plus grandes inspirations : la cinéaste canadienne Celine Song et Steven Spielberg.

« Avec Steven, nous avons beaucoup parlé de tourner au Québec, car il y tournait beaucoup et il adorait travailler avec les gens là-bas », a-t-il témoigné.

« J’espère pouvoir nouer de nouvelles relations et potentiellement travailler avec certaines personnes que j’ai rencontrées ici. »

René-Lortie est depuis à Los Angeles pour rencontrer des agences, des gérants et des sociétés de production, établissant des liens qu’il espère pouvoir lui être utiles pour son premier long métrage, You Were Always An Island, sur lequel il travaille actuellement. Il le décrit comme « un film de science-fiction très réaliste ».

« C’est encore une fois très personnel, cette fois encore plus (qu’Invincible). Cela parle de santé mentale, mais plus précisément de beaucoup de choses que j’ai vécues au cours des dernières années, notamment pendant la pandémie. »

René-Lortie affirme que lui et le producteur d’Invincible, Samuel Caron, fouleront le tapis rouge avec leurs partenaires, ainsi qu’une douzaine de membres de l’équipe du film.

« Ça va être amusant. Nous allons tous séjourner dans le même Airbnb et nous habiller. Nous allons avoir une équipe glamour qui viendra nous coiffer et nous maquiller. Je dois me réveiller à 5 heures du matin pour commencer à me préparer. »

René-Lortie portera un costume de la marque italienne Tagliatore et des bijoux de la boutique montréalaise Coming Age.

Une vague d’amour du Québec

Le cinéaste est ravi de représenter sa ville natale à la remise des prix.

« Je ressens vraiment, pour la première fois de ma vie, une vague d’amour venant de Québec et de Montréal », raconte René-Lortie.

« Nous étions si jeunes lorsque nous avons commencé à travailler sur ce film et je me sens encore très jeune et nouveau dans ce monde. C’est fou, mais aussi émouvant et beau de voir des gens tendre la main. »

La 96e cérémonie des Oscars, animée par Jimmy Kimmel, sera diffusée dimanche soir sur ABC et CTV.