Andrea Arnold avait traité de l'adolescence dans les quartiers durs de la banlieue de Londres dans l'excellent Fish Tank, en 2009. Voilà que la cinéaste britannique s'intéresse aux difficultés de la fin de l'adolescence dans le Midwest dans son nouveau long métrage American Honey, Prix du jury du plus récent Festival de Cannes.

Ce road-movie contemplatif gravite autour d'une jeune femme de 19 ans, Star (Sasha Lane), qui quitte sa famille dysfonctionnelle pour rejoindre une bande de jeunes faisant du porte-à-porte pour vendre des magazines.

La PME clandestine dirigée par une princesse trash (Riley Keough) et son homme à tout faire subalterne (Shia LaBeouf, en grande forme) relève de l'arnaque. Mais offre un parfait prétexte à Star afin d'échapper à son quotidien sombre et brutal (son «père» abuse d'elle; elle a à sa charge les enfants d'une mère qui les a abandonnés).

Épousant les codes du réalisme social façon Ken Loach, avec l'acuité d'un Larry Clark dans le regard posé sur la jeunesse américaine, Andrea Arnold parvient à brosser un portrait générationnel engageant et inspiré.

Elle observe cette bande bigarrée, ses codes, ses amours naissants et ses excès, sans complaisance ni condescendance. Sans porter de jugement sur ce mode de vie nomade.

Une révélation

Sasha Lane, une actrice non professionnelle découverte par la cinéaste sur une plage de Floride pendant la relâche scolaire - au terme d'un casting sauvage, à l'instar de la majorité de la distribution -, est une véritable révélation. Elle incarne avec conviction un personnage à la fois fragile mais farouche, désorienté mais déterminé, ouvert à la rencontre de son prochain mais fermé sur lui-même.

Le scénario, minimaliste, fait beaucoup place à l'improvisation, ce qui en rebutera plusieurs. On s'attend constamment à ce qu'un drame bouscule la trajectoire de cette jeune femme qui ne craint pas de se mettre en danger (et que le danger guette sans cesse). Mais American Honey n'est pas un film hollywoodien qui a réponse à tout ou qui enchaîne les rebondissements et les résolutions de conflits - et c'est tant mieux.

Andrea Arnold a plutôt brodé une histoire d'amour atypique, bercée par une musique de circonstance (très présente), mettant en scène l'envers du rêve américain, les déceptions du quotidien et, finalement, l'espoir de jours meilleurs.

* * * 1/2

American Honey. Drame d'Andrea Arnold. Avec Sasha Lane, Shia LaBeouf, Riley Keough. 2h42.

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Image fournie par A24 Films