Le film Lignes de fuite, qui réunit Catherine Chabot, Mariana Mazza et Léane Labrèche-Dor, raconte les retrouvailles – qui tournent mal – de trois amies du secondaire. L’œuvre vue par ses créatrices et interprètes.

« À quel point l’amitié peut être réconfortante, mais toxique et chiante. » Avec son franc-parler habituel, Mariana Mazza n’aurait pu mieux résumer la trame du film Lignes de fuite, qui prend l’affiche le 6 juillet.

Dans cette comédie hautement dramatique, inspirée de la pièce de théâtre de Catherine Chabot, qui cosigne le scénario de son adaptation au cinéma avec Émile Gaudreault et qui porte le chapeau de coréalisatrice avec Miryam Bouchard, trois amies du secondaire se retrouvent à Montréal pour faire la fête. Or, la soirée dégénère rapidement en règlement de comptes et conflit de valeurs.

Fille d’immigrants, Sabina (Mariana Mazza) travaille en finance et fait beaucoup d’argent. Elle habite à Montréal, tout comme Valérie (Léane Labrèche-Dor), chroniqueuse culturelle pigiste dont les revendications sociales et écologiques cachent une jalousie face à l’argent. Quant à Audrey (Catherine Chabot), elle vit en Beauce, où elle s’occupe de sa mère malade et mène une vie trop rangée à son goût.

Les retrouvailles des trois amies commencent au vernissage d’Amber, la copine de Sabina (une anglophone francophile de la Colombie-Britannique interprétée par Victoria Diamond). Valérie et Audrey sont accompagnées de leurs amoureux.

Plombier, amateur de chasse et propriétaire d’un pick-up, le personnage de Maxime de Cotret (le fiancé d’Audrey) incarne « le gros bon sens » et l’authenticité. Pour sa part, Mickaël Gouin se glisse dans la peau d’un professeur de philosophie qui roule à vélo. Pauvre, il se considère néanmoins comme intellectuellement supérieur à la moyenne et il prône un couple ouvert avec Valérie…

Bien que tous cherchent à avoir du plaisir, leurs conversations finissent toujours par tourner au vinaigre en abordant des sujets chauds de leur génération comme l’environnement, la parentalité, l’argent et la reconnaissance, mais surtout, la dualité entre l’image et le bonheur.

  • Catherine Chabot et Maxime de Cotret incarnent un couple qui mène une vie rangée et confortable en Beauce.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Catherine Chabot et Maxime de Cotret incarnent un couple qui mène une vie rangée et confortable en Beauce.

  • Couple aussi dans la vraie vie, Léane Labrèche-Dor et Mickaël Gouin incarnent un couple de Montréalais intellectuels qui mettent de l’avant leurs valeurs environnementales avec un certain snobisme.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Couple aussi dans la vraie vie, Léane Labrèche-Dor et Mickaël Gouin incarnent un couple de Montréalais intellectuels qui mettent de l’avant leurs valeurs environnementales avec un certain snobisme.

  • Le troisième couple est formé de Salina (Mariana Mazza) et Amber (Victoria Diamond.) En quête de reconnaissance, la première fait beaucoup d’argent dans le domaine de la finance, tandis que la deuxième est une artiste née en Colombie-Britannique qui apprivoise le tissu social francophone.

    PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

    Le troisième couple est formé de Salina (Mariana Mazza) et Amber (Victoria Diamond.) En quête de reconnaissance, la première fait beaucoup d’argent dans le domaine de la finance, tandis que la deuxième est une artiste née en Colombie-Britannique qui apprivoise le tissu social francophone.

  • Le film est produit par Denise Robert et Émile Gaudreault. Ce dernier cosigne également le scénario.

    PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

    Le film est produit par Denise Robert et Émile Gaudreault. Ce dernier cosigne également le scénario.

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Le concept de Lignes de fuite vient du philosophe Gilles Deleuze, a expliqué en conférence de presse Catherine Chabot, qui incarne une jeune femme anxieuse qui voudrait une vie « moins prévisible ». « C’est d’écouter la voix intérieure qui crie en nous […] d’écouter la pulsion d’être nous-mêmes. »

Catherine Chabot dit avoir pris toutes « ses angoisses et contradictions » pour les intégrer dans six personnages qui ont l’« âge carrefour » de la trentaine. « Ce soir-là, tous vivent une crise et ont des angles morts. »

Malgré leurs grandes différences, tous se posent les mêmes questions. « Suis-je à la bonne place et ai-je fait les bons choix ? », poursuit-elle.

Chose certaine, la tension monte tout au long de la soirée de retrouvailles. « On sent que le presto va péter », comme le dit si bien Catherine Chabot.

IMAGE TIRÉE DU FILM (LES FILMS SÉVILLE)

Scène de Lignes de fuite

Faire rire et réfléchir

Catherine Chabot a travaillé en coréalisation avec Miryam Bouchard (Mon cirque à moi, 23 décembre). Cette dernière a aimé que le film aborde l’écoanxiété avec humour. Pour reprendre ses mots, Lignes de fuite nous fait à la fois « rire et sentir vraiment coupables ».

Il y avait aussi beaucoup de défis techniques emballants pour une réalisatrice avec une scène de 45 minutes et des scènes de grêle.

Miryam Bouchard, coréalisatrice

On ne vous en dit pas plus sur ces fameuses scènes… Mais sachez que Lignes de fuite porte bien son titre de comédie dramatique.

Le choc des valeurs des personnages donne lieu à des dialogues savoureux qui peuvent rappeler ceux du Déclin de l’empire américain.

IMAGE TIRÉE DU FILM (LES FILMS SÉVILLE)

Catherine Chabot, Léane Labrèche-Dor et Mariana Mazza lors d’une scène de karaoké

Pour Léane Labrèche-Dor, le film dénonce le statu quo qu’on endure jour après jour jusqu’à ce que « la balloune pète ». Elle se réjouit de voir des personnages imparfaits au cinéma, dont le sien. Comme Valérie, nous sommes tous jaloux de nos amis à un moment ou un autre de notre vie. Le film nous fait habilement comprendre « qu’on ne veut pas être ça ».

En fait, il y a de nous et de nos entourages dans chacun des six personnages. « Nous avons tous une amie angoissée ou une autre qui fait des commentaires chiants », souligne Mariana Mazza.

« Nous avons tous vécu une soirée où l’alcool arrive et on se met à dire des vérités qu’on n’aurait pas dû dire, renchérit Mickaël Gouin. Ce que j’aime du film, c’est que personne n’a raison et que personne n’a tort. »

« L’humour est souvent la meilleure façon de traiter un sujet », ajoute celui qui se réjouit d’être dans un film aussi drôle qu’intelligent.

Un huis clos de 45 minutes

La scène qui mène à la fin s’avère un huis clos d’une quarantaine de minutes. Pour que le jeu soit le plus convaincant possible, la réalisatrice Miryam Bouchard souligne que les acteurs et actrices ont répété une semaine avant d’allumer les caméras et que le tournage s’est fait en bonne partie dans l’ordre chronologique. « C’était un grand luxe. »

PHOTO DAVID BOILY, LA PRESSE

Miryam Bouchard, coréalisatrice de Lignes de fuite

De son côté, Mariana Mazza a tenu à remercier Catherine Chabot pour le rôle qu’elle lui a donné sans audition, « sur un plateau d’argent ». « Tu as vu ma sensibilité », lui a-t-elle dit.

En conférence de presse, Mariana Mazza a aussi dit admirer Léane Labrèche-Dor et Catherine Chabot, qui allaitaient leurs poupons pendant le tournage.

Dire que Catherine Chabot a écrit à l’origine Lignes de fuite parce qu’elle se demandait si elle pouvait avoir des enfants dans notre monde qui se réchauffe…

« La réponse a 16 mois et s’appelle Joséphine. Donc oui, il y a de l’espoir ! », a-t-elle conclu.

Lignes de fuite prendra l’affiche le 6 juillet.